On ne naît pas écolo, on le devient. Que ce soit Nicolas Hulot ou Jean-Paul Besset. Celui-ci, trotskiste, héritier des lumières du Progrès pour débarrasser le monde du capital, des patrons et des petits livres rouges, avait remarqué que chaque fois qu’il quittait la ville, l’agitation, les bagnoles et qu’il venait s’asseoir sous un arbre, il respirait mieux, ça allait mieux. Il regardait les nuages, il écoutait le vent, la pluie, les insectes, il aimait gratter la terre, il se disait : « Voilà mes vraies richesses ! » (Comment ne plus être progressiste…sans devenir réactionnaire – Fayard, 2005)
Je ne suis pas né écolo, mais ma propre démarche remonte à loin, il y a quarante ans. Assigné par ma naissance à la génération 1968, j’ai été lecteur assidu d’Hara-Kiri, formaté par le réalisme du slogan « élections, piège à cons »…. J’ai donc déchiré en deux ma carte d’électeur début 1970. Affichée sur les murs de ma faculté, elle y est restée l’année entière. La politique, un jeu de marionnettes dans les mains du marché et des lobbies, ce n’était pas pour moi. Le 15 Juin 1972, je découpe un entrefilet sur la conférence des nations unies sur l’environnement qui se tient à Stockholm. Mais je n’ai encore aucune idée de l’importance que prendra l’écologie politique. Le terme écologiste fait son entrée dans le Petit Larousse en 1976 seulement ! La même année 1972, je lis le rapport du MIT sur les limites de la planète et les vertus de la croissance zéro. C’était prévu, c’était prouvé, l’amour de notre société marchande pour les exponentielles dans un monde fini faisait que nous allions droit dans le mur ; j’étais prêt à devenir militant. Lorsque René Dumont, poussé par des associations environnementalistes, s’est présenté à la présidentielle française de 1974 au nom de l’écologie, j’ai compris qu’un vote significatif pouvait enfin avoir lieu pour préparer un avenir moins perverti : nous allions manquer d’eau, les voitures allaient s’arrêter faute de pétrole, le nucléaire militaire et civil était le mal absolu. René parlait vrai. Il me fallait réagir, j’ai voté pour la première fois, j’avais 27 ans.
Depuis, j’ai toujours voté écolo au premier tour pour le ou la présidentiable écolo. Il n’est pas encore venu le temps où nous aurons un ou une président(e) écologiste, mais cela viendra. J’ai aussi voté chaque fois qu’il y avait une liste écolo, je ne pouvais voter que s’il y avait un candidat écolo. L’indifférence totale des partis politiques à l’égard de l’enjeu écologique continuait de me rebuter. J’avais gardé une méfiance viscérale envers des organismes « de pouvoir » qui ne voulaient toujours rien savoir du message de René Dumont : l’écologie scientifique est le rempart principal contre nos erreurs industrielles, agricoles, financières, et même contre la bêtise humaine. Reste à écologiser les politiques ! Mais, l’inertie sociale étant ce qu’elle est, l’écologie politique est restée minoritaire jusqu’à la fin du XXe siècle, en France et ailleurs. L’état de la planète a empiré, les prédictions de René se sont installés dans les faits, et même dans les journaux télévisés. Les sommets de Terre se sont succédés depuis 1972, rien n’avait changé. Personne n’a entendu parler du sommet de 1982, et même la grande kermesse de Rio en 1992 n’a été que des mots. Il me fallait faire quelque chose… je me devais de m’engager personnellement en politique ! Alors va pour les Verts en 1997, qui disaient porter le message de l’écologie. (à suivre)
NB : pour lire la version complète de cette autobiographie, ICI