Le mensuel « La Décroissance » occulte soigneusement des termes comme Démondialisation, Démilitarisation, Dépopulation, Désurbanisation… mais il donne souvent la parole a des spécialistes de la décroissance qui savent ce que raisonner veut dire. Exemple, sur cette question :
La décroissance semble plus que jamais provoquer un rejet radical, voire l’hystérie…
comment le comprendre ?
Serge Latouche : Il s’agit à l’origine de ne pas voir l’ampleur de la pollution généralisée de la Terre ; c’est le déni. Autrement dit, l’idée qu’une croissance économique infinie est incompatible avec une planète finie apparaissait comme « folklorique ». Dans un deuxième temps, comme les faits sont têtus, il devient impossible de nier qu’il se passait quelque chose avec la biodiversité, le climat, etc. Nous eûmes droit au développement durable. Lorsqu’il ne fit plus recette, nous passâmes à la croissance verte, l’économie circulaire, etc. Aujourd’hui, avec l’épuisement de ces stratégies de communication par l’écoblanchiment, la dernière cartouche : anathématisation des partisans d’un véritable changement. On crée des repoussoirs comme « l’écologie punitive », les Khmers verts, etc. Chacun est sommé de s’écrier de façon hystérique : « Non, non, je ne suis pas pour la décroissance. » Mais plus nous serons outrageusement diffamé, plus ce sera le signe que nous disons la vérité.
Luc Semal : Tantôt ce sont les membres du RN qui accusent les Macronistes de condamner la France à la décroissance, tantôt c’est Emmanuel Macron qui dénonce le projet du RN comme un projet de décroissance. De leur point de vue, la décroissance est considérée comme une proposition délirante. La nouveauté, c’est cette intensification de l’invective par un seul mot. Il est navrant de constater combien tout cela est déconnecté du débat scientifique sur les limites planétaires et leurs implications. Il est désormais bien tard sur l’horloge d’une décroissance en catastrophe, nous sommes au pied du mur. Le problème, c’est que cette décroissance abrupte sera seulement perçue comme une proposition encore plus délirante par les défenseurs de la croissance qui répondent toujours par une surenchère de promesses techniques.
Martin Steffans : Si la décroissance est à ce point dénigrée, c’est que le débat politique ne procède plus tout simplement du réel. La croissance économique est impossible, voilà la seule analyse ajustée à un réel fondé sur des savoirs scientifiques. Car s’il y a bien une chose de certaine, c’est que le système Terre est insensible à la communication politique. Pendant des siècles, on a pu définir la politique comme l’instance qui définissait le réel contre la fatalité des dieux ou de la nature. C’est maintenant le réel qui doit redéfinir la politique ! Voyez notre président de la république faisant des vidéos à destination des jeunes sur des questions écologiques sans, à aucun moment, évoquer des savoirs scientifiques. Voyez ce sujet récent au bac de sciences économiques et sociales : « Vous montrerez la façon dont l’innovation permet de repousser les limites écologiques de la croissance. » Je pense malgré tout que, dans quelques temps, la décroissance deviendra un évidence et une réalité.
Nathanaël Wallenhorst : Selon Aristote, un être vivant passe par trois périodes : naître, croître et dépérir. C’est un seul et même mouvement. Est-ce triste ? Oui, si on considère l’arrêt de la croissance comme un mal. Pourtant décroître est un moment de la vie à moins de considérer la vieillesse comme une maladie. Et il y a beaucoup de morts dans le fait de vouloir croître sans cesse : on désole la terre pour les générations qui suivent. Pourquoi a-t-on tant de mal avec ce mot décroissance? Parce que nul n’a envie de céder sa place. Mais qui a envie de ne vivre que pour soi ?
source : La Décroissance n° 209 de mai 2024, page 14 et 15
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Horrible, limiter la liberté d’expression
extraits : Le philosophe John Stuart Mill (1806-1873) avait défini la portée de la liberté d’expression : lorsqu’il est libre, le débat contradictoire peut conduire à une forme d’autorégulation spontanée de la parole. Les contre-vérités, les propos aberrants ou loufoques finissent toujours normalement par être critiqués et neutralisés. Mais à son époque, peu de personnes avaient accès à la parole publique et toutes partageaient les mêmes codes de langage. Le débat éclairé était encore possible. Ce n’est plus le cas aujourd’hui ….
Horrible, je suis un affreux malthusien
extraits : J’adore James Lovelock quand il déclare que « ceux qui ne voient pas que la surpopulation mondiale et le changement climatique sont les deux faces d’une même pièce, sont des ignorants ou des menteurs. Ces deux énormes problèmes environnementaux sont inséparables et discuter de l’un en ignorant l’autre est irrationnel »….
Encore une fois, des 4 pelés… personne ne semble inspiré. Même par le raisonnement de Latouche, qui devrait pourtant leur rappeler ceci :
– « D’abord ils vous ignorent, ensuite ils se moquent de vous, après ils vous combattent et enfin, vous gagnez. »
Phrase attribuée à Ghandi, qui ne l’a jamais prononcée. Par contre voici ce qu’a dit le syndicaliste américain Nicholas Klein dans un discours en 1918 :
– « D’abord ils vous ignorent. Ensuite ils vous ridiculisent. Et après, ils vous attaquent et veulent vous brûler. Mais ensuite, ils vous construisent des monuments. »
Gardons espoir. Un jour Latouche, aujourd’hui pape, sera canonisé. Sa ville natale deviendra un lieu mondial de pèlerinage. Non c’est pas une vanne ! Ma boule me le con firme.
Vannes, comme La Mecque, Lourdes et Lisieux. Mais bien sûr, en attendant, ON continuera à le flinguer, le canonner, le faire brûler, lui et tous ses apôtres. Moi, cette idée me réchauffe.
– « Le mensuel « La Décroissance » occulte soigneusement des termes comme Démondialisation, Démilitarisation, Dépopulation, Désurbanisation… mais [etc.] »
Certes ce n’est qu’un détail… mais comme je suis très attaché au sens des mots je commence donc par là. Ce «soigneusement» me gène. La liste des mots en «Dé» est très longue, on ne va quand même pas reprocher à la Décroissance (journal) de ne pas TOUS les analyser. Pour moi les deux plus importants sont «Décroissance» (bien sûr), pour moi c’est le mot parfait (bien mieux que «post-croissance» etc.). La preuve l’hystérie, voire la panique… qu’il provoque. Le second étant «Décolonisation» (des imaginaires).
La mondialisation, l’armée, la police, les armes, la guerre, l’urbanisation, la bétonisation…
et même la (sur)population… tout ça, le fidèle lecteur de ce journal a eu plus d’une fois l’occasion de lire des articles très intéressants sur ces sujets.
Quant à ce très bon sujet (question), que nous propose aujourd’hui Biosphère, pour moi encore une fois cet article de la Décroissance le traite parfaitement. À lui seul le dessin de Vito permet même de comprendre l’essentiel. Ce que disent les quatre intervenants est pour moi d’une telle clarté, évidence, que je ne vois pas ce que je pourrais rajouter. ( à suivre )
Reste donc à voir ce qu’en pensent les quatre autres pelés de ce blog. 😉
Encore faudrait-il qu’ils aient lu cet article, de la Décroissance (N°209 P.14 et 15).
Je me contenterais donc de recopier les conclusions de cette bande des quatre :
– « Voilà qui doit nous empêcher de désespérer ! » (Serge Latouche)
– « Je crains que ça n’aille pas en s‘arrangeant. » (Luc Semal)
– « C’est pourquoi je pense malgré tout que, dans quelques temps, la décroissance deviendra une évidence et sera «simplement» à organiser. » (Martin Steffens)
– « Pourquoi a-t-on tant de mal avec ce mot décroissance ? Parce que nul n’a envie de céder sa place. C’est tripal. Mais qui a envie de ne vivre que pour soi ? (Nathanaël Wallenhorst)