L’idée d’une répartition forcée des immigrés par quotas* nationaux semble au centre du projet de la Commission européenne. Plus que des questions de quotas, il faut approfondir du point de vue écologique la réflexion politique. Voici un texte proposé par Daniel, un de nos correspondants.
« Je ne reviendrai pas sur les difficultés pour accueillir « décemment » en période de crise une immigration importante. L’Europe présente une des plus fortes densités de population, des surfaces urbanisées en croissance. Doit-on étendre toujours plus les villes, construire plus haut ? Bref, l’accueil reste possible dans certains limites que je me garderai bien de donner.
Mais que faire?
Plutôt que de réfléchir toujours globalement, voyons un exemple concret. Aujourd’hui on assiste à une immigration massive de population érythréenne. Ce petit pays a vu sa population pratiquement doubler en 20 ans, le climat aride ne permet pas de garder une forte densité en milieu rural et les villes n’offrent pas de perspectives de vie décente, le tout sous le régime despotique de Issaias Afeworke. Ceci entraîne une émigration massive de 4 à 5 000 personnes par mois.
Que faire face à une telle situation ?
Toutes ces candidats à l’émigration méritent le statut de réfugié politique vu les conditions effroyables imposées par le régime en place. Si l’Europe décide de les accueillir, c’est l’équivalent d’une petite ville de 5000 habitants qu’il faut construire par mois. Ce n’est sans doute pas insurmontable mais les Erythréens ne sont pas les seuls candidats.
Que faire pour limiter ce flux ?
Agir en Erythrée, mais comment ? Il conviendrait d’instaurer un autre régime politique, mais comment sans être taxé de néo-colonialiste ? Plus de 40% de la population a moins de 15 ans, il faudrait agir sur la démographie, mais comment sans être taxé de néo-malthusien? Favoriser le développement local en soutenant les agricultures vivrières et la souveraineté alimentaire est très certainement un objectif, mais comment aider à sa mise en œuvre ? comment inciter la jeunesse de ce pays à s’investir dans la production locale et à ne pas succomber au mirage de la société de consommation de type occidental ?
C’est très certainement tout un faisceau de propositions qu’il faut mettre en avant. Mais ce qui me semble clair est qu’il faut sortir de l’optimisme béat appelant à abolir les frontières et mettant en place la libre circulation et installation des hommes à l’échelle mondiale (ou européenne). Notre discours est cohérent concernant la circulation des marchandises, la nécessité de protéger les marchés locaux, les circuits courts. L’homme n’est pas une marchandise, mais les flux de population servent un marché de l’emploi qui met en concurrence tous les habitants de la planète. Sur ce marché de l’emploi, comme sur les autres il est nécessaire de mettre en place des régulations et surtout chercher des solutions aux problèmes plutôt que de traiter uniquement le symptôme. »
* quotas : Le principe consiste à répartir les réfugiés selon des quotas contraignants pour chaque État membre de l’Union européenne. Ces quotas tiendraient compte pour chaque pays de sa richesse nationale, de sa population, de son taux de chômage et du nombre de réfugiés déjà accueillis. En la matière, ce sont les pays d’Europe centrale et orientale qui en accueillent le moins, d’une part car ils sont eux-mêmes en partie des pays de départ d’une émigration économique vers l’Europe occidentale, et d’autre part parce que les réfugiés ne désirent pas s’y rendre.
Difficile de savoir si l’Europe doit laisser ses portes ouvertes, les fermer ou mettre en place des quotas. Lorsque l’on voit les naufrages à répétition et la pauvreté de certaines populations, il est difficile de rester insensible. Mais on ne peut pas accueillir tout le monde… C’est une vraie problématique !