Alors que plus de 55 % des humains vivent en ville, ce taux devrait atteindre 68 % d’ici à 2050. Les villes accueilleront alors 7 milliards d’habitants. Invivable, ingérable. Pourtant on rêve encore de renouer les liens distendus avec la nature, « ce poumon vert qui dope notre santé ».
Florence Rosier : Le lien millénaire que les humains ont tissé avec la nature, de fait, s’est considérablement distendu, quand il ne s’est pas rompu. Des professionnels de santé prescrivent des immersions dans la nature pour améliorer notre bien-être physique et mental. En 2021, un urbaniste néerlandais a proposé la règle des 3-30-300 pour la végétalisation des villes : chaque citadin devrait pouvoir voir au moins trois arbres de son domicile, vivre dans un quartier avec au moins 30 % de surface arborée, et habiter à moins de 300 mètres d’un espace vert. Si chaque ville plantait, dans tous ses quartiers, des espaces verts d’une densité égale à celle de ses quartiers les plus verts, la mortalité serait réduite de 3 % à 7 % . Mais le le verdissement des quartiers se traduit souvent par une gentrification. Les prix des logements augmentent, et les populations défavorisées s’en vont.
Du point de vue de la désurbanisation écologique
Un chercheur digne de ce nom peut-il appeler « Nature » ces espaces verts aseptisés que nous connaissons en ville ? Imaginer que des villes qui enfermeraient 7 milliards d’habitus en leur sein en 2050 est quelque chose d’acceptable, c’est ne pas connaître la bidonvillisation du monde et ses innombrables problèmes. En 2015 déjà, près de la moitié de la croissance urbaine se fait dans les bidonvilles.
Imaginons ce qui arriverait à n’importe quelle ville si elle était enfermée sous une coupole de verre qui empêcherait les ressources matérielles nécessaires d’entrer et de sortir. Il est évident que cette ville cesserait de fonctionner en quelques jours et que ses habitants périraient… Ce modèle mental d’une coupole de verre nous rappelle assez brutalement la structurelle vulnérabilité des grandes régions urbaines.
Le terme « bidonvillisation » dans LE MONDE
Près de la moitié de la croissance urbaine se fait dans les bidonvilles (LE MONDE du 22 janvier 2015)
extraits : Le Forum économique mondial de Davos, dans son rapport annuel « Global Risks » publié en préambule du sommet qui s’est ouvert jeudi 21 janvier 2015 pour quatre jours. Ce rapport, qui dresse chaque année la liste des risques qui menacent la planète, consacre pour la première fois un chapitre entier à « l’urbanisation rapide et incontrôlée ». Selon l’ONU-Habitat, plus d’un milliard de personnes, soit un tiers de la population urbaine, vit dans des bidonvilles. En Afrique subsaharienne, c’est 62 % des urbains qui habitent dans des quartiers précaires. Ce phénomène de « bidonvillisation » concentre à lui seul plusieurs des risques considérés comme ayant un fort impact pour la planète dans les années à venir : instabilité sociale, épidémies, crise de l’eau, adaptation insuffisante au changement climatique. Les risques de diabète, de maladies respiratoires chroniques, de maladies cardio-vasculaires ou de cancers qu’engendrent la malnutrition, l’inactivité physique, la consommation d’alcool, de tabac, la pollution affectent les grands centres urbains, dans les pays développés comme en développement….
Les excessives vérités de René Dumont (LE MONDE du 20 juin 2021)
extraits : René Dumont est mort le 18 juin 2001à 97 ans. La misère du monde, dont il est un des rares spécialistes à avoir une connaissance de proximité, le rendait prodigieusement hargneux. Quitte à paraître excessif et à passer pour infréquentable, Dumont hurle son diagnostic : famines, croissance démographique insoutenable, inégalités croissantes, « mal-développement », « bidonvillisation », guerres, épuisement des sols et des ressources, dérèglements climatiques, rupture des écosystèmes… A écouter l’agronome, l’Apocalypse chevauche l’horizon. Trop, c’est trop ! Il est effectivement « trop ». Trop écolo pour les socialistes, trop rouge pour les écolos, trop empirique pour les marxistes, trop étatiste pour les libéraux, trop agronome pour les économistes, trop socio-économique pour les agronomes, trop pragmatique pour les scientifiques, trop enflammé pour les universitaires, trop modéré pour les militants, trop exigeant pour les tiers-mondistes, trop anticonformiste pour les pouvoirs….
En savoir plus grâce à notre blog biosphere
Désurbanisation ou ville autarcique ?
extraits : Tandis que 30 % de la population mondiale vivaient dans les zones urbaines en 1950, cette proportion est passé à 47 % en 2000 et devrait atteindre 60 % en 2030 et 70 % en 2050. En France, c’est déjà plus de 82 %. On assiste véritablement à « l’explosion de l’urbain », il s’agit d’un processus généralisé d’artificialisation de la vie. La vie dans les grandes villes brise les cycles naturels et nous coupe de notre lien intime avec la nature.La solution n’est pas dans les low tech, mais dans la désurbanisation, l’exode des urbains vers la ruralisation. Utopie ? Vers 650 de notre ère, un effondrement vertigineux a frappé l’empire romain. La cité de Rome comptait près de 700 000 habitants lors de sa gloire, il n’y en avait plus que 20 000 au final….
Cultiver la nature en ville ou désurbanisation ?
extraits : Certains essayent désespérément de trouver des solutions agricoles en milieu urbain. Il y a les tentatives de villes en transition (Rob Hopkins), la bonne idée des AMAP (association pour le maintien d’une agriculture paysanne), la vogue des locavores, les incroyables comestibles, etc. Mais les villes étendent leurs tentacules dans toutes les directions et stérilise toujours plus loin les sols. Les bétons et goudrons de la capitale française ne se prêtent pas aux plantations en pleine terre. La solution de long terme se trouve dans la désurbanisation, l’exode urbain qui succédera à l’exode rural….
Logique, si l’on veut absolument mettre toujours plus de milliards de gens sur la Terre il faudra les mettre dans des bidons car ça tient beaucoup moins de place que dans de jolies maisons.
Entassons entassons et sacrifions tout, la nature et nos droits, au dieu du nombre !
Si les êtres humains s’entassent dans les villes, voire demain dans des bidons… ce n’est pas forcément (ou logiquement) parce qu’ils sont trop nombreux.
Ce n’est d’ABORD qu’à cause d’une certaine politique !