La couleur de l’écologie n’est pas le vert, mais le blanc

La couleur de l’écologie n’est pas le vert, mais le blanc.. aux Etats-Unis. Alors que les minorités (Afro-Américains, Latinos…) comptent aujourd’hui pour 36 % de la population américaine, elles restent faiblement représentées dans les organisations de défense de l’environnement, qu’il s’agisse d’ONG, de fondations ou d’agences gouvernementales*. Pourtant la pollution ne frappe pas de manière similaire les différentes classes sociales. Les minorités qui appartiennent en grande partie aux classes modestes sont plus exposées que les classes les plus aisées à la pollution industrielle.

                Entre racisme environnemental et guerres vertes, le 21ème siècle sera empli de bruits et de fureurs. Nous passerons de la catastrophe au cataclysme**. C’est ce que montre Razmig Keucheyan dans son livre, La nature est un champ de bataille***. Le chapitre sur le « Racisme environnemental » bat en brèche l’idée que l’humanité subit uniformément les conséquences de la crise écologique. Tout comme il existe des inégalités économiques ou culturelles, on en trouve dans le rapport des individus ou groupes d’individus aux ressources qu’offre la nature aussi bien qu’à l’exposition des effets néfastes de la croissance, pollution, dégradation de la qualité de l’eau, inégalités d’accès à l’énergie, etc. Les catégories populaires et les minorités raciales ont une propension moindre à recourir à la loi pour empêcher l’enfouissement des déchets toxiques à proximité de leurs quartiers. Les possibilités d’évitement de sacrifices privés ne sont pas équitablement distribuées dans la population. Le Sierra Club, grande organisation environnementale, mena une enquête parmi ses membres pour déterminer s’ils souhaitaient que l’association développe des politiques spécifiquement destinées aux pauvres et aux minorités. Deux tiers de ses membres répondirent par la négative. L’écrasante majorité de ses membres étaient blancs, de classes moyennes et supérieures.

Les gouvernements soutiennent ausi un capitalisme prédateur et inégalitaire. Il est symptomatique que le président François Hollande et son gouvernement acceptent l’influence du lobbying des entreprises. Il est significatif qu’après la constitution de son nouveau gouvernement, Manuel Vall reçoive une standing ovation lors des journées d’été du MEDEF (syndicat des patrons). Il est vrai que le Premier ministre s’est livré à une véritable déclaration d’amour à l’entreprise. L’écologie politique n’aime l’entreprise que si elle ne pollue pas et répond aux besoins fondamentaux de tous, riches et pauvres. Il ne s’agit pas simplement de protéger des espèces emblématiques comme l’ours blanc, il s’agit de montrer que nous partageons le même vaisseau spatial, la Terre ; ce qui n’est utilisé que par quelques-uns l’est au détriment de tous les autres. C’est en ce sens que le combat écologique est aussi un combat social, c’est un combat pour l’égalité des conditions. Les riches savent se défendre contre les atteintes environnementales que ce soit aux Etats-Unis ou en France. Cela ne devrait pas être.

* LE MONDE du 27 août 2014, l’écologie, chasse gardée des Blancs aux Etats-Unis

** Dans la littérature assurantielle, est dit catastrophique un événement dont les dommages s’élèvent à plus de 25 millions de dollars (en 1997). Au-delà il est cataclysmique.

*** La nature est un champ de bataille (sous-titré « essai d’écologie politique »)

éditions La Découverte 2014, 206 pages, 16 euros