La démographie était enfin aux journées d’été d’EELV

Un atelier sur « la démographie, un enjeu pour l’écologie politique » s’est tenu le 21 août lors des journées d’été d’Europe Ecologie – Les Verts. Son objectif : « Déterminer s’il y a aujourd’hui matière à organiser un groupe de travail EELV sur la démographie alors que depuis la campagne présidentielle de René Dumont en 1974, la question malthusienne n’a pas été sujet à débat. » Voici un compte-rendu de l’intervention de Michel Sourrouille.

« Je suis personnellement écologiste depuis 1974, moment de la candidature de René Dumont aux présidentielles. Je n’ai jamais changé depuis quarante ans, le projet écologiste reste pour moi l’enjeu principal du XXIe siècle. Au début des années 1970, c’est le livre « La bombe P »  de Paul Ehrlich qui m’avait convaincu que la démographie était un problème. J’ai compris qu’écologie et démographie étaient liés, nous sommes en effet nécessairement amenés à analyser les interdépendances entre différents phénomènes ; l’approche écologique est une approche écosystèmique. Je vais d’abord envisager le point de vue de Malthus et ses prolongements pour aborder ensuite l’évolution de l’écologie politique en matière démographique.

Le pasteur anglican Malthus avait écrit en 1798 un essai sur « Le principe de population ». Il estimait que celle-ci, lorsqu’elle n’est arrêtée par aucun obstacle, double tous les vingt-cinq ans, et croît de période en période selon une progression géométrique (évolution exponentielle). Par contre on n’obtient pas avec la même facilité la nourriture nécessaire pour alimenter l’accroissement démographique. Il y a des rendements décroissants en agriculture. Les moyens de subsistance ne peuvent donc augmenter que selon une progression arithmétique (évolution linéaire). Le principe de population, de période en période, l’emporte tellement sur le principe productif des subsistances que, pour que la population existante trouve des aliments qui lui soient proportionnés, il faut qu’à chaque instant une loi supérieure fasse obstacle à ses progrès. En conséquence Malthus se positionne en faveur de la maîtrise volontaire de notre fécondité (à l’époque chasteté et retard de l’âge au mariage). Sinon on connaîtra toutes les espèces de maladies, la guerre, la famine.  De mon point de vue Malthus est un écologiste avant la lettre, mettant les humains en relation avec les possibilités des écosystèmes. Mais les néo-malthusiens qui militaient à la fin du XIXe siècle en faveur de la liberté de contraception et de la libération de la femme ont été bâillonnés par la loi répressive de 1920, interdisant avortement et même contraception. Ce n’est qu’au début des années 1970 que la législation sera assouplie, au moment même où paraissait le rapport au club de Rome intitulé judicieusement « Les limites de la croissance ». Ce modèle mathématique et statistique a ajouté aux variables de Malthus la production industrielle, la pollution et l’état des ressources naturelles. Comme les cinq paramètres évoluent de façon exponentielle (géométrique dirait Malthus) dans un monde fini, on prévoyait un effondrement du système thermo-industriel au cours du XXIe siècle. Aujourd’hui on peut compléter cette analyse par une autre formule, I = PAT :  l’Impact de l’espèce humaine sur un territoire est déterminé, à Technique donnée, par sa Population et par ses Affluences (Activités, niveau de vie). Il faudrait lier décroissance économique et décroissance malthusienne quand on a dépassé la capacité de charge de la planète.

                Ce message politique était explicite dans le programme de René Dumont en 1974 : « Il faut réagir contre la surpopulation. En Inde surpeuplée certes, mais surtout chez les riches : 500 fois plus d’énergie consommée par tête à New York que chez le paysan indien. Ce qui remet en cause toutes les formes d’encouragement à la natalité, chez nous en France. » Mais depuis, à de rares exceptions près comme Yves Cochet, ce message n’a été repris ni par les Verts ni par EELV aujourd’hui. Seul texte significatif, la motion « Sortir de la politique nataliste » qui n’a pas été soumise au vote du CNIR en mai 2009 faute de signatures suffisantes. Elle réclamait une mesure de simple équité : la totale neutralité de l’État sur la question de la natalité, c’est-à-dire l’abrogation de toutes les mesures qui visent à maximiser le nombre de Français.

                Entre la perspicacité des études sur les liens entre démographie et épuisement de la planète d’une part et l’inertie actuelle d’EELV sur cette question d’autre part, il me semble nécessaire d’instituer au sein de notre parti un groupe de travail « DEMOGRAPHIE ». Une liste d’inscription circule dans la salle (elle obtiendra 20 signatures). Je laisse maintenant la parole à Cyrille Chatelain… »

3 réflexions sur “La démographie était enfin aux journées d’été d’EELV”

  1. Jean-Paul GUINET

    Bonjour, Monsieur Sourouille
    Votre livre ‘Moins nombreux, plus heureux’ a confirmé ce qui me semblait être une évidence: la décroissance implique celle de l’espèce humaine.
    La solution à la croissance explosive de la population est simple et peu coûteuse: la versement, à la femme (j’insiste pour que cela soit payé à la femme, qui, elle s’occupe de l’enfant), des allocations familiales pour ses premier et deuxième enfant, est lié à son acception de la pose, gratuite, d’un stérilet. La solution est très simple, mais la volonté politique pour le faire doit être très forte! Cela a été utilisé, et a donné de bons résultats, puis abandonné. Bien sûr, l’éducation des femmes, etc …, doit parallèlement être promue.
    Merci d’avoir relancé ce débat au sein même de la décroissance.

  2. Jean-Paul GUINET

    Bonjour, Monsieur Sourouille
    Votre livre ‘Moins nombreux, plus heureux’ a confirmé ce qui me semblait être une évidence: la décroissance implique celle de l’espèce humaine.
    La solution à la croissance explosive de la population est simple et peu coûteuse: la versement, à la femme (j’insiste pour que cela soit payé à la femme, qui, elle s’occupe de l’enfant), des allocations familiales pour ses premier et deuxième enfant, est lié à son acception de la pose, gratuite, d’un stérilet. La solution est très simple, mais la volonté politique pour le faire doit être très forte! Cela a été utilisé, et a donné de bons résultats, puis abandonné. Bien sûr, l’éducation des femmes, etc …, doit parallèlement être promue.
    Merci d’avoir relancé ce débat au sein même de la décroissance.

  3. bonjour,
    merci pour le texte. D’un point de vue pratique, combien de gens ont participé à la réunion ? combien de gens sont passés au stand ? qu’elles ont été leurs questions ? combien de livres « moins nombreux » avez-vous vendu ?
    merci pour vos réponses

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