Le pape François, l’encyclique et la démographie

Nombreux sont ceux, même parmi les non croyants, qui se réjouissent de la prise de position du pape en faveur de protection la nature à l’occasion de la publication de l’encyclique Laudato si. Il était temps en effet qu’une autorité morale du plus haut niveau rappelle aux hommes la gravité des menaces qui pèsent sur notre monde et la responsabilité qui est la leur. Quelques mois avant la tenue des négociations sur le climat (COP 21) cela ne pouvait mieux tomber.

Ce n’est bien sûr pas la première fois qu’un pape s’exprime sur le temporel et un tel message est bienvenu tant ce temporel-là renvoie à une question morale. Comment nous comportons-nous avec la nature, avec le monde, avec la « maison commune »  pour reprendre les mots mêmes du pape (1) ? On ne peut donc qu’applaudir une telle initiative, même si parfois il ressort des propos de François un certain anthropocentrisme qui appuierait la nécessaire protection  de  la nature sur les besoins des hommes et non sur un respect intrinsèque dû à l’ensemble du vivant, démarche plus utilitariste que morale, hélas partagée par nombre d’écologistes.

Toutefois, si le courage et le modernisme du pape sont incontestables, sa position sur la démographie reste absolument conventionnelle et fait bon marché des contraintes écologiques au profit de la défense séculaire d’un natalisme militant. Alors qu’au cours du dernier siècle le monde a multiplié ses effectifs par quatre, alors qu’au cours des 45 dernières années ce sont 50 % des vertébrés qui ont disparu (2) du fait de notre envahissement de tous les territoires, alors que les océans se vident à grande vitesse, alors qu’un continent, l’Afrique, voit nombre de ses efforts de développement obérés par une croissance démographique encore non maîtrisée (au cours du 20ème siècle l’Afrique devrait passer de 1 à 4 milliards d’habitants), voici ce que dit le pape François de la question (chapitre 50 de son encyclique Laudato si)

« Au lieu de résoudre les problèmes des pauvres et de penser à un monde différent, certains se contentent seulement de proposer une réduction de la natalité. Les pressions internationales sur les pays en développement ne manquent pas, conditionnant des aides économiques à certaines politiques de “ santé reproductive ”. Mais « s’il est vrai que la répartition inégale de la population et des ressources disponibles crée des obstacles au développement et à l’utilisation durable de l’environnement, il faut reconnaître que la croissance démographique est pleinement compatible avec un développement intégral et solidaire ». Accuser l’augmentation de la population et non le consumérisme extrême et sélectif de certains est une façon de ne pas affronter les problèmes ».

Le pape offre là une douche froide à tous ceux chez qui était né l’espoir que l’Eglise Catholique s’oriente vers une position plus raisonnable en matière de contrôle de la fécondité. Espoir né en janvier dernier suite à ses déclarations lors d’un voyage aux Philippines. A cette occasion François avait en effet affirmé qu’il n’était pas nécessaire de se reproduire comme des lapins pour être de bons catholiques. Il avait également  réprimandé une femme enceinte déjà mère de nombreux enfants. Las, de toute évidence cette remarque visait à éviter les situations personnelles difficiles mais elle n’indiquait en aucun cas une prise de conscience des limites écologiques à l’explosion démographiques.

François signe là aussi une assez grande méconnaissance du problème. Une méconnaissance du problème écologique proprement dit (mais où le pape mettra-t-il toutes les autres créatures de Dieu si l’Homme augmente encore ses effectifs ? Jésus n’a pas multiplié les mètres carrés, même dans les écritures). Mais aussi méconnaissance des propos des antinatalistes. Dans leur grande majorité, ceux-ci sont profondément écologistes. Ils ne se contentent pas « seulement de proposer une réduction de la natalité », ils affirment que c’est une condition nécessaire bien que non suffisante. Ils regrettent qu’elle soit si souvent passée sous silence mais ils savent aussi qu’elle s’insère dans un ensemble de problèmes encore plus vaste qui est celui de notre rapport à la nature. Caricaturer ainsi leur propos n’est pas très juste et ne fait pas avancer la prise de conscience.

Rien au contraire  « n’indique que la croissance démographique soit pleinement compatible avec un développement intégral et solidaire » Et surtout elle est clairement incompatible avec la protection de la nature qui est pourtant l’objet de cette encyclique.

Plusieurs personnalités ont répondu à cette prise de position du pape François (…) Pour connaître la suite, aller à la source de ce texte :

http://economiedurable.over-blog.com/2018/06/le-pape-l-encyclique-et-la-demographie.html

2 réflexions sur “Le pape François, l’encyclique et la démographie”

  1. C’est en 1784 que Kant formula la devise des Lumières « aie le courage de te servir de ton propre entendement ». Plus de deux siècles après, les églises sont encore là pour nous prouver qu’il n’a pas été écouté.

  2. vidy christophe

    Il est clair que la démographie fait partie du problème.Personnellement, j’ai l’habitude d’illustrer la chose de la façon suivante.
    – dans une salle de bain ou la baignoire déborde et ou le robinet coule, il ne viendrait à personne l’idée de commencer à passer la serpillère avant d’avoir fermé l’eau.
    – Tenter de solutionner le problème dans une fuite technologique sans se préoccuper de la démographie c’est faire exactement la même chose, laisser couler le robinet et tenter d’éponger comme on peut.

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