le pic pétrolier vu par JM Jancovici

Jean-Marc Jancovici* devant une salle comble ** : « Je commence par une question, combien de parlementaires dans cette salle ? 1,2 3, on va dire sept ou huit ! Au niveau de l’énergie, c’est le serpent qui se mord la queue : les parlementaires n’ont pas conscience de l’urgence du problème, donc ils ne viennent pas s’informer, donc ils n’ont pas conscience du problème ! Quelle est la martingale qui permettrait à 200 parlementaires de se tenir tranquille dans une salle pendant trois heures pour écouter un cours ? Si quelqu’un a une réponse, je prends ! Car c’est une bonne partie de la stabilité politique de la France dans les vingt ans qui viennent qui en dépend. Comme les politiques sont interrogés par des journalistes qui n’y connaissant rien non plus, cela tourne en vase clos, à aucun moment il n’y a d’issue. Quelques pensées en désordre :

          Si on met bout à bout pétrole, gaz et nucléaire, on est aux alentours de 90 % de l’énergie primaire. Or la consommation d’énergie fait le pouvoir d’achat. Si on divise par dix la production d’énergie, il faut diviser par dix le pouvoir d’achat des Français.

          Le pic pétrolier, c’est un théorème de math. Il y a une dotation limitée de pétrole, de gaz et de charbon, un stock de départ donné une fois pour toutes. L’extraction part de zéro, passe par un maximum puis décroît. Cela se passe de la même façon pour tout minerai, pour le phosphate, l’alumine, le Tantale… c’est mathématique.

          Ce qui compte, c’est la quantité de pétrole par  habitant. Avec l’accroissement démographique, la part diminue. La quantité mondiale de pétrole par habitant est déjà à la baisse depuis 1980. Il faut ajouter la baisse de capacité d’exportation des pays producteurs de pétrole qui font face à leurs propres besoins. La France connaît aussi une baisse de sa part dans les exportations mondiales. Ces trois baisses se conjuguent et je rappelle cette évidence : il n’existe pas de consommation croissante quand la production décroît. Il existe pourtant des gens qui font encore des scénarios de consommation croissante du trafic, imaginent le Grand Paris ou l’aéroport Notre Dame des Landes… mais avec quelle énergie ? Se contenter de dire que la demande ne sera pas satisfaite est idiot. Le Grenelle est postérieur de deux ans à la baisse de la consommation de carburant en France. La faillite de Lehmann Brothers nous a rendu un grand service…

          Le prix des fossiles est dérisoire. Les ressources naturelles mises  à notre disposition sont gratuites, nous ne comptabilisons que les revenus humains, le travail et les rentes. On ne paye pas la formation du litre de pétrole. Pourtant pour le fabriquer, il faut de l’énergie solaire et attendre 300 millions d’années. Allez refaire cela avec vos petits bras musclés, cela ne va pas vous coûter le même prix !

L’idée qu’on va pouvoir trouver des substituts à l’énergie fossile ou à l’uranium, c’est une chimère, ça n’existera pas. Aujourd’hui, pour faire un baril jour de pétrole conventionnel, il faut mettre sur la table 20 000 dollars de coût en capital. Pour les hydrocarbures non conventionnels, coal to liquids ou sables bitumineux, il faut 200 000 dollars. Dix fois plus de capital nécessaire, le coût en capital du déplacement des ressources fossiles représente des sommes astronomiques. Il faut donc investir massivement dans les économies d’énergie sinon le problème social sera dramatique. J’ai une cravate, cela montre bien que je me préoccupe plus du sort des hommes que de celui des marmottes.

Dernière chose, et les socialistes ont joué leur rôle, le rejet de la taxe carbone sous le prétexte que cela allait assommer les Français est une grave erreur. Pour une croissance du prix de baril de 50 dollars, c’est une taxe carbone de 100 dollars qui va alimenter les caisses des fonctionnaires vénézuéliens, saoudiens ou russes. Dans un pays comme le nôtre qui importe 99 % de son pétrole, la taxe carbone nous la payons de toute façon.

Parce que nous avons déjà beaucoup trop attendu, les investissement de transition qu’il va falloir faire dans un contexte récessif posent problème. L’inertie des systèmes énergétiques du côté de la consommation (parc de logements, de voitures…) fait que le changement ne se fait pas en une semaine, mais plutôt en 30 ans. Géraud Guibert a dit en rigolant que les socialistes n’étaient pas au pouvoir il y a deux ans. Mais les socialistes l’ont été au cours des trente dernières années. La faute est collective, il n’y a pas droite ou gauche sur la question, il n’y a pas électeurs ou élus, on s’est tous vautrés, on a beaucoup trop attendu pour faire les choses en douceur. Mais si nous en le faisons pas maintenant de manière extrêmement musclée, ce qui nous attend n’est pas du tout ce que conçoivent les politiques dans leurs programmes électoraux pour 2012. »

* Jean-Marc Jancovici, ingénieur conseil, spécialisé dans les domaines de l’énergie et du changement climatique, auteur du site de vulgarisation www.manicore.com et co-auteur, avec Alain Grandjean, du livre « Le plein s’il vous plaît !, la solution au problème de l’énergie » (Seuil, 2006).

** colloque « Pic pétrolier, quelles propositions politiques pour 2012 ? » du mardi 25 janvier 2011 à l’Assemblée nationale (Paris)

16 réflexions sur “le pic pétrolier vu par JM Jancovici”

  1. Toujours aussi actif le propagandiste larouchien à ce que je vois, toujours aussi actif mais toujours aussi ignorant

  2. @ M. MAHEO

    « Et puis, je ne vois pas l’intérêt de parler de démantèlement des centrales. Ce n’est pas demain la veille, et au lieu de démanteler, on fera une mise à niveau technologique (un investissement, donc). »

    Et pourtant « on » en parle :

    http://www.enerzine.com/634/duree-de-vie-des-centrales-nucleaires—vers-une-extension-a-60-ans/participatif.html

    La durée de vie prévue par EDF au départ était 30 ans. Or, nos centrales ont à l’heure actuelle environ cet âge.
    EDF envisage une prolongation à 60 ans de durée de vie, mais « Par contre s’il fallait remplacer des gros équipements et en particulier la cuve, on atteindrait rapidement la limite économique à partir de laquelle il vaudrait mieux procéder à une installation nouvelle.Tout dépendra donc de la résistance des cuves et de l’état de leurs revètements ».
    Le temps moeyn de construction d’une nouvelle centrale est de 10 ans.

    Pour finir, l’exemple de Brennilis, en Bretagne, est à méditer :

    http://prestataires-nucleaire.edf.com/edf-fr-accueil/prestataires-du-nucleaire-edf/centrales-nucleaires/brennilis-1460049.html

    Au vu du sketch judiciaire en cours concernant ce démantellement, on est pas au bout de nos peines…

  3. @ Jean-Gabriel Mahéo

    Votre argumentation est, elle-même, bien fragile, dites donc….
    C’est facile de jouer les « je sais tout » bien critiques et grande…. bouche….
    De démonter en 3 phrases le discours de gens qui consacrent tout leur temps à étudier sérieusement un sujet….
    Et tout ça sans AUCUN argumentaire !!!

    Je ne répondrais, pour ma part, que sur le nucléaire.
    Vous écrivez « L’uranium fissile, ça se fabrique par enrichissement d’uranium naturel, et de ce point de vue nous en avons largement assez pour plus d’un millénaire ».

    Ah bon ?????

    D’avance merci de bien vouloir citer vos sources, mon vieux, au moins en ce qui concerne les réserves d’uranium !!!!!!

    Plus d’un millénaire !!!!!!!!

    Ce chiffre, à lui seul, discrédite l’intégralité de votre discours, mon pauvre malheureux !!!!!
    Et vous ne citez aucune source en plus !!!!!

    MOI SI !!!!!!!!!!!!!!!!

    « Selon l’Agence pour l’énergie nucléaire, il y a encore assez d’uranium pour répondre à la demande mondiale pendant au moins un siècle à condition que cette demande n’augmente pas. »

    LA SOURCE, c’est l’Agence pour l’Energie Nucléaire (NEA en anglais), voici le lien vers le rapport en question (2008) :

    http://www.oecd-nea.org/press/2008/2008-02f.html

    Et notez la fin de l’extrait que je cite ci-avant : « A CONDITION QUE CETTE DEMANDE N’AUGMENTE PAS » et cette demande, elle va exploser vu le nombre de projets de construction de centrales (rien qu’en Chine et en Inde…).

    Les FAITS, mon vieux, CONTENTEZ-VOUS DES FAITS, mais ARGUMENTEZ vos sources avant de sortir des inepties aussi colossales….

    Plus d’un millénaire………

    Pffffffffffffffffffffffffffffffffffffffffffffffffffffff………………………..

    D’autant plus que pour prendre l’exemple de la France (exemple auquel vous pensiez sans aucun doute en écrivant votre post), si cette industrie publique n’était pas outrageusement subventionnée sur le dos des contribuables, vous payeriez si cher le kwh que vous auriez des scrupules à éclairer vos toilettes, mon bon Monsieur… Et je ne parle pas du coût astronomique de démantellement et de dépollution des centrales en fin de vie, sujet à propos duquel l’Etat et EDF se sont empressés de…. ne PAS calculer ni budgéter…. Et le parc français est tout entier en fin de vie !!!!!
    Vous parlez d’une solution d’avenir !!!!! Des centrales qui tombent en lambeaux et qui multplie les incidents !!!!

    Quand aux surgénérateurs, il est évident que SuperPhénix a laissé un souvenir impérissable dans la mémoire collective :-)))
    En fonctionnement 5 à 10 % de sa durée de vie (et je suis généreux) et n’ayant établi AUCUNE preuve ni de sa pérénité, ni de sa rentabilité….

    Quand à la fusion………………

  4. @ KEls

    Je suis allez voir votre lien (BFS).

    A part une belle « comm », il n’y a pas la moindre description technologique, ni le moindre argument scientifique détaillant le « processus » de fabrication…

    Mon avis : si ce procédé « miraculeux » était réel, nul doute que cette société recevrait des quantités colossales de capitaux de toutes parts (mis à part l’OPEP bien entendu !) !!!!!

    Une info factuelle, le Pentagone a débuté très récemment un programme pour faire « migrer » l’ensemble de la Navy vers les agro-carburants. Nul doute, ici aussi, que s’il était possible de ramener le cycle naturel de quelques millions d’années à quelques jours, le Pentagone laisserait illico tomber les agro-carburants, non ???
    Après tout, inondations, sécheresses, …. présentent quand même des risques en terme de stabilité de l’approvisionnement….

  5. @ elhierro :

    Je regrette bien de vous avoir déçu.
    En même temps, si l’on est un peu sérieux, il est plutôt facile de détruire l’argumentaire de JMJ : il suffit en général de s’attaquer aux fausses évidences, aux exagérations et aux omissions qui truffent toutes ses productions et en constituent les fondations.

    Quant aux hydrocarbures, la piste synthétique est la plus intéressante, que ce soit par le procédé décrit par KEls ou par le Fischer-Tropsch.


    Remarque des modérateurs du blog biosphere @ Monsieur Mahéo :

    « fausses évidences, exagérations et omissions » ! Vous décrivez ainsi parfaitement les caractéristiques de vos propres interventions sur ce blog… Mais c’est plus facile de voir la paille dans l’œil du voisin que la poutre dans le sien.

  6. Un peu déçu : le contre argumentaire de Mahéo est légér.
    « Voilà, c’est ça, un camelot, ça veut impressionner. Il a oublié de dire de quel système précisément les hydrocarbures représentent 90% de l’énergie primaire. »
    Quel système ? Fallait-il poser la question ? J’avais à priori écarté les galaxies lointaines, les geysers, les excréments de mouches etc …. J’avais naïvement pensé au système économique et industriel qui est ici accusé d’épuiser ces mêmes ressources.
    « … des processus de transformation du carbone minéral en hydrocarbures, lesquels ensuite percolent vers la croûte supérieure. D’ailleurs, c’est la raison pourquoi l’on réalise des forages extrêmement profonds aujourd’hui, qui produisent »

    Donc, pas de souci, le pétrole que nous consommons sera recréé dans un délai raisonnable ? 20 ans, 100 ans ?
    « On paye très cher son extraction, ce qui revient au même, et lui retire ce caractère “gratuit” avec lequel JMJ tente encore de séduire son auditoire. »
    Ah ça oui, on le paye très cher , aux mêmes qui nous disent de ne pas faire autrement : les multinationales et les dictatures qui vont avec. Bizzarement, il semble qu’on ne paye pas beaucoup les autochtones, ni en créant des fonds de prévoyance ou de reconversion avec les bénéfices actuels.
    Reste le nucléaire, avec les filières d’enrichissement ou sur-générateurs (c’est un autre débat) … Ou bien la réduction des consommations inutiles.

  7. @ auteurs :

    Vraiment, Jancovici est un bon camelot de foire ! Il est assez drôle, et veut convaincre vite à l’aide d’arguments massues, mais aux fondements très fragiles, voire inexistants.

    Par exemple :

    –  » Si on met bout à bout pétrole, gaz et nucléaire, on est aux alentours de 90 % de l’énergie primaire. »
    Cela m’étonnerait beaucoup, à moins que Jancovici chasse de son calcul l’énergie solaire, qui nous est transmise par la nourriture, qui fait se déplacer des milliards de tonnes d’eau, qui garanti la viabilité de la planète en terme de fourchette de température, etc…
    Voilà, c’est ça, un camelot, ça veut impressionner. Il a oublié de dire de quel système précisément les hydrocarbures représentent 90% de l’énergie primaire.

    –  » Le pic pétrolier, c’est un théorème de math. Il y a une dotation limitée de pétrole, de gaz et de charbon, un stock de départ donné une fois pour toutes.  »
    Ah ? Où cela a-t-il été établi ? C’est bien plutôt une opinion contraire qui commence à prendre racine dans la science géochimique, où l’on soupçonne que le croûte terrestre profonde abrite des processus de transformation du carbone minéral en hydrocarbures, lesquels ensuite percolent vers la croûte supérieure. D’ailleurs, c’est la raison pourquoi l’on réalise des forages extrêmement profonds aujourd’hui, qui produisent.

    –  » Ce qui compte, c’est la quantité de pétrole par habitant. »
    Non, ce qui compte, c’est la quantité de puissance par habitant, c’est elle qui détermine la capacité de travail. Nous pouvons produire de la puissance de beaucoup de manière, mais en France, c’est le nucléaire qui est la source de 78% de la puissance, hors transports routiers. nous n’avons donc aucune raison de réduire la quantité de puissance mise à la disposition de la population, puisque la pénurie de matériel fissile n’est pas prévue, et peut être repoussée avec les sur-générateurs (Tels que le défunt SuperPhénix).

    – « On ne paye pas la formation du litre de pétrole. »
    On paye très cher son extraction, ce qui revient au même, et lui retire ce caractère « gratuit » avec lequel JMJ tente encore de séduire son auditoire. Quant à associer des atomes de carbone et d’hydrogène, il n’y a rien de plus facile, cela coûte nettement moins cher que de détruire… quoi… l’Irak, par exemple, ou d’entretenir des plates-formes gigantesques et des super-tankers sur tous les océans.

    – « L’idée qu’on va pouvoir trouver des substituts à l’énergie fossile ou à l’uranium, c’est une chimère, ça n’existera pas. »
    Le carbone, c’est éternel, il y aura donc toujours moyens de produire des hydrocarbures.
    L’uranium fissile, ça se fabrique par enrichissement d’uranium naturel, et de ce point de vue nous en avons largement assez pour plus d’un millénaire.
    La fusion thermonucléaire sera maîtrisée un jour, proche j’espère, et ce jour là ce sera la liberté pour l’humanité.

    Vraiment, tout ça, c’est du grand foutage de g****e, c’est du battage médiatique pour séduire des ignorants. Il n’est pas sérieux non plus, JMJ.

    Salutations,
    Jean-Gabriel

  8. @biosphere
    Merci, je ne retrouvais plus le lien vers cet article. Et quand je parlais d’incompétence journalistique, on est en plein dedans. Tout y est, assimilation des différentes filières, dénigrement, verve mal contrôlée et au passage, la preuve, veuillez noter que je n’ais jamais employé le mot « miracle » …

  9. @Helvète
    L’énergie solaire comme principale source d’énergie et le CO2 gazeux comme matirèe première.
    Seriez-vous de nature à ne pas vouloir au minimum visiter le site sus-mentionné et à me demander (là, c’est chose impossible) une démonstration complète dans un minuscule encart de qqu lignes …
    http://www.biopetroleo.com/
    Qqu chiffres quand même :
    450 000 tonnes de CO2 traité annuellement donne 35 000 tonnes de fuel + 3000 tonnes de produits secondaires utilisables et un bilan + de 200 000 tonnes de CO2 éliminé définitivement de l’athmosphère.

  10. @ KEls
    Démontrez-nous que le miracle existe. Votre cycle inversé se fait avec quelle procédure technique et avec quelle énergie ?

  11. La réalisation d’un cycle inversé (–> transformation du CO2 athmosphérique vers un CO2 organique puis minéral en qqu jours seulement à la place de millions d’années) est déjà possible à l’échelle industrielle. En bref, on utilise le CO2 et on fabrique un pétrole identique à celui que nous extrayons. La panacée en terme d’écologie et d’emplois. Seule une incompétence journalistique ET politique freine encore.

  12. Les parlementaires sont fautifs, mais les citoyens sont en train de le devenir: qui contruit actuellement en installant un chauffage au mazout ou em prévoyant de se chauffer à l’électricité devra assumer son choix pour les 15 prochaines années.
    Il est illusoire de vouloir convaincre les gens du pire si ceux-ci refusent de faire fonctionner leur logique. ne reste que la stratégie de Noé: se préparer personnellement au pire en réduisant de manière personnelle sa dépendance aux produits pétroliers: chauffage au bois (granulé de bois), ajout de panneaux thermiques pour chauffer ou du moins préchauffer l’eau, habiter dans un lieu proche de son travail et peu éloigné des principaux lieux commerciaux (poste, magasins d’alimentation ou fermes vendant aux particuliers).

    Le pétrole va surtout manquer pour le transport, pour les autres produits, une hausse des prix sera à prévoir, mais ils resteront disponibles

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