Nous avions constaté qu’un certain nombre d’écologistes reconnus avaient soutenu Emmanuel Macron pendant sa campagne, qu’ils soient de gauche, de droite ou du centre, Daniel Cohn-Bendit, Jean-Paul Besset, Barbara Pompili, Corinne Lepage, Serge Lepeltier, etc. Ils étaient réalistes par avance, ils ont fait un pari sur l’avenir, ils ont gagné : Macron va avoir le pouvoir pendant tout un quinquennat, et les législatives viennent de lui donner la majorité absolue. Rentrer dans l’opposition, participer de loin à la majorité présidentielle ou faire évoluer les choses à l’intérieur de LRM (La république en marche), quelle devrait être notre position ? Depuis la première candidature écolo à une présidentielle, René Dumont en 1974, l’écologie politique s’est institutionnalisée. Mais en 2017 le candidat de l’écologie politique, Yannick Jadot, a voulu se dissoudre dans le PS de Benoît Hamon. Pour la première fois il n’y avait plus de candidature écologiquement compatible à la présidentielle, l’écologie institutionnelle devenait inaudible. Au final nous obtenons un nouveau président, jeune, décidé, Emmanuel Macron. Il nomme comme ministre de l’écologie Nicolas Hulot, gage d’ouverture vers les réalités biophysiques de la planète. Il obtient une majorité confortable à l’Assemblée nationale. Le soutenir est-il un geste écolo ?
Sa démarche de référence, symbolisée par l’expression « et en même temps », semble signe d’ouverture. Il s’est entouré de politiques de droite, de gauche et du centre. On prend les meilleures idées, quelles que soient leurs origines partisanes, et on fait la synthèse par recherche du consensus. Cette démarche n’est pas complètement adaptée à la dureté nécessaire des choix écologiques. Pour le projet d’aéroport de Notre-Dame-Des-Landes, Macron s’était déclaré favorable aux travaux puisqu’un référendum en avait décidé démocratiquement ainsi ; mais en même temps il ajoutait que vu l’existence des zadistes, opposants acharnés à ce nouvel aéroport nantais, il désignera un médiateur. Une telle démarche peut-elle arriver à un bon compromis ? Cela fait des années que le projet est débattu et combattu sans résultat. Or tout écolo réaliste sait que les voyages en avion sont un luxe que les générations futures ne pourront satisfaire qu’avec parcimonie avec le renchérissement prévu du kérosène ; pas besoin de nouveaux aéroport, ceux qui existent seront bientôt désertés. On pourrait faire les mêmes critiques sur la position ambiguë de Macron sur le nucléaire, les perturbateurs endocriniens et tout le reste. Mais faut-il s’opposer par avance à des décisions qui ne sont pas encore prises ou agir pour réorienter la politique dans le bon sens ?
C’est ce dernier choix qu’a fait Nicolas Hulot en acceptant d’entrer dans le gouvernement. Ni le président ni le premier ministre Edouard Philippe ne lui ont demandé de renier ses positions ou de renoncer à sa critique des stratégies court-termistes et du modèle productiviste dominant. « La pédagogie que j’ai longtemps déployée dans la société civile, je vais la déployer à l’intérieur du gouvernement… M. Macron a conscience que l’environnement est un sujet transversal et décisif pour le XXIe siècle, mais il n’a pas toute la connaissance, c’est pourquoi il a fait appel à moi. » L’écologiste confie ne pas avoir tenté d’imposer un rapport de force : « C’est l’Elysée qui m’a proposé ce rang de ministre d’Etat. » Un militant écologiste se doit d’aller là où il peut faire progresser au mieux la cause qu’il défend. Faut-il comme Nicolas « prendre l’écologie en marche » avec l’espérance d’un président converti à l’écologie ? A chacun son engagement, les voies de l’écologisme sont diverses et souvent complémentaires. Pour donner une idée du programme écolo actuel de Macron, ce lien :
http://biosphere.blog.lemonde.fr/2017/05/08/macron-president-en-marche-vers-quel-avenir-ecolo/
Extraits du « programme écologique» d’ En Marche :
https://en-marche.fr/emmanuel-macron/le-programme/environnement-et-transition-ecologique
– « Objectif 1 … Demain, nous engagerons une rupture profonde avec le modèle productif existant largement fondé sur la consommation d’énergies fossiles … »
En clair, demain nous n’engagerons pas une rupture profonde avec le modèle productif existant , mais seulement une rupture avec un certain modèle.
– « Objectif 2 : Accélérer nos mutations vers une production d’énergie équilibrée et sans carbone. »
– « Objectif 3 … Nous viserons une économie 100% circulaire… Nous renforcerons la lutte contre l’obsolescence programmée en renforçant l’affichage de la durée de vie des appareils électroménagers…. Les industriels devront faire figurer sur les emballages des indications très simples pour faciliter le tri… »
En clair, le mouvement perpétuel ! L’équilibre dans le développement d’une économie 100% circulaire tournant toujours plus vite !
Genre de mesures pour « lutter » contre l’obsolescence programmée, les montagnes de déchets et les océans de plastoc : L’affichage de la durée de vie des appareils, des étiquettes « révolutionnaires » sur les emballages. Formidable !
– « Objectif 4 : Protéger la santé et l’environnement des Français… L’Etat interdira au plus vite les perturbateurs endocriniens repérés … dès lors qu’il existe des solutions scientifiquement reconnues comme moins toxiques. »
En clair, s’il n’y a pas de solutions alternatives moins toxiques, s’il n’y a rien de scientifiquement prouvé… le « au plus vite » sera reporté aux calendes grecques.
Tout le reste est du même acabit. On dit évidemment qu’on gaspille, et on va s’ « atteler » à régler ce problème. Par contre pas un mot pour dire que nous consommons trop, que nous produisons trop d’absurdités, pas un mot qui laisserait entrevoir un début de réelle prise de conscience sur l’absolue nécessité de la décroissance. Bref ce « programme écologique » nous promet bien ( ce qui malheureusement plait à beaucoup de monde) le beurre et en même temps, l’argent du beurre !
PS : peut-être trop long… désolé.
Alors qu’il comptait 17 élus lors de la législature 2012, le parti Europe Ecologie-Les Verts (EELV) n’aura aucun siège sur les bancs du palais Bourbon. Pourtant Éric Alauzet se présentait au nom de l’écologie. Mais ce député sortant, il avait perdu son investiture EELV en pleine campagne pour s’être ouvertement déclaré « Macron-compatible ». Il a été réélu haut la main dans la 2e circonscription du Doubs avec 62,19% des voix contre le candidat Les Républicains. Cette victoire tient à sa réputation de député bosseur… et à l’absence de candidat de La République en marche !
Dans cette situation on ne peut pas ordonner » il faut ! » Tout au plus, on pourrait dire : » L’écologie en marche, du moins on peut l’espérer »
Certains ont donc fait ce pari, ils ont « choisi » ce jeune cheval, cette stratégie… Cette position ne les engage qu’eux-mêmes. Quoi qu’il en soit, on verra le résultat à la fin de la course.
Pour répondre à ces 2 questions : » Le soutenir est-il un geste écolo ? … Faut-il s’opposer par avance à des décisions qui ne sont pas encore prises ou agir pour réorienter la politique dans le bon sens ? » Je répondrais donc par la formule à la mode : ni ni !
Le soutenir alors qu’on n’y croit pas… il ne manquerait plus que ça ! Mais surtout ne pas lui mettre des bâtons dans les roues ! Ce serait lui donner les billes pour qu’il explique ensuite qu’il a échoué à cause des « réactionnaires ». Par contre, de la même façon qu’on ne peut pas dire » il faut ! » , on ne peut pas se lancer dans un tel pari audacieux … « et en même temps » … indiquer d’une manière subtile, là ou se doit d’ aller un militant écolo pour » faire progresser au mieux la cause qu’il défend. »
Pour ceux qui comme moi n’y croient absolument pas, je pense que la meilleure position, la plus « utile », la plus « constructive » … c’est celle de spectateur. Donc là non plus, il n’est pas question de PRAFISME (Plus Rien A Foutre), mais seulement d’abstention ! De toute manière au point où nous en sommes, nous ne sommes plus à 5 ans près.