Il n’a jamais été question d’écologie mercredi soir pendant les 2h30 qu’a duré le débat d’entre-deux-tours entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen. C’est bien sûr d’abord la faute des deux accompagnateurs de ce pugilat, journalistes qui se sont cantonnée des traditionnelles questions générales types « emploi » ou « terrorisme ». C’est aussi la faute d’une candidate de l’extrême droite dont on connaît la répulsion vis-à-vis des questions écologiques. C’est plus surprenant de la part du candidat ni droite ni gauche qui avait su attirer des personnalités issues de l’écologie politique de droite, de gauche et du centre.
Pourtant dans leur programme Marine Le Pen et Emmanuel Macron formulaient des propositions environnementales qui peuvent faire consensus : développer les énergies renouvelables, agir contre la précarité écologique, favoriser les circuits courts, continuer à interdire l’exploitation du gaz de schiste ou appliquer le principe de précaution en interdisant les OGM. Pourtant il était facile de contester les propositions de Marine Le Pen en matière environnementale. Elle refuse la fermeture de la veille centrale nucléaire de Fessenheim et veut prolonger la durée de vie des réacteurs nucléaires de 40 à 60 ans. Elle dit vouloir développer massivement les énergies renouvelables mais annonce un moratoire sur l’un des gisements les plus importants : l’éolien. Emmanuel Macron fait des annonces sur des points sur lesquels la digne fille de son père reste muette, sur l’économie circulaire, sur la pollution liée aux particules fines, sur les perturbateurs endocriniens… Pourtant il existe aussi entre eux une opposition encore plus fondamentale qui s’est exprimé parfaitement au cours de ce débat d’entre-deux-tours.
D’un côté la rengaine « anti-système » qui justifie tout, de l’autre la faculté de raisonner dont nous n’avons plus l’habitude. L’extrême droite n’explique rien, il lui suffit de vouloir imposer ses simplismes. L’extrême droite n’a pas besoin d’un programme, il lui suffit de contester ce que font les autres. L’extrême droite n’a comme électeurs que ceux qui sont prêt à gober tous les mensonges proférées par leur leader bien-aimée. De l’autre coté Macron a bien conscience de la complexité des affaires de ce monde. Dès l’origine de son mouvement il y a un an seulement, Macron a pensé qu’il fallait prendre les bonnes idées sur sa droite comme sur sa gauche, que souvent les décisions prises peuvent être classées de centre-droit et/ou de centre-gauche, et qu’il faut capter les bonnes volontés où qu’elles se trouvent sur l’échiquier politique. Le message avait été bien reçu par une petite minorité agissante de l’écologie politique. Un certain nombre de personnalités de droite ou de gauche ont rejoint Macron : François de Rugy (ex EELV qui s’était présenté comme candidat écolo à la primaire de gauche), Barbara Pompili (ex-EELV et membre actuel du gouvernement Hollande), Nicole Bricq (éphèmère ministre de l’écologie d’Hollande), Corinne Lepage (ancienne ministre de l’écologie sous un gouvernement de droite et présidentiable écolo de centre-droit en 2002), Serge Lepeltier ( ancien ministre de l’écologie sous un gouvernement de droite) et même Daniel Cohn-Bendit, figure majeure de l’histoire de l’écologie politique ou Matthieu Orphelin, ex-porte parole de la Fondation de Nicolas Hulot. On ne peut douter que les conseillers de « Macron président » feront tout ce qu’ils peuvent pour faire ressentir l’urgence écologique pendant le prochain quinquennat. De toute façon les soubresauts de la planète feront pression sur nos présidents, qu’il s’appelle Trump aux USA ou Macron en France : réchauffement climatique, crise alimentaire en Somalie ou ailleurs, pollutions croissantes en Chine et en France, choc pétrolier à venir , etc. Dans les cinq années à venir, la mondialisation du commerce va laisser la place dans nos préoccupations politiques à la mondialisation de l’urgence écologique.
@Biosphère
Ce « raté » ainsi que sa prise de conscience de la part de Macron et son équipe, sont suffisamment révélateurs.
Nous voyons clairement la place qu’occupe l’écologie dans leur vision du Monde.
Macron (pour ne parler que de lui) a fait un « raté » en oubliant seulement de « rassurer » les écolos disposés à voter pour lui.
Mais qu’auraient bien pu entendre ces derniers sortir de la bouche de Macron ? Si ce n’est quelques habituelles banalités sur le « développement durable », la « croissance verte », et tous ces emplois que représentent les « énergies renouvelables ».
Espéraient-ils l’entendre parler de la Catastrophe qui se profile, de l’urgence de décroître… ?
Je serais juste un peu plus nuancé sur 2 points :
1) « L’extrême droite n’a comme électeurs que ceux qui sont prêt à gober tous les mensonges proférées par leur leader bien-aimée »
Je ne pense pas que la réalité soit aussi simple que ça.
2) « De l’autre coté Macron a bien conscience de la complexité des affaires de ce monde »
Que Macronl ait conscience de la complexité du Monde, je veux bien. Seulement lui-aussi voit le Monde avec SES lunettes, et il l’interprète avec SA grille de lecture.
Le problème de Macron est bien là, il est comme beaucoup d’autres (même situés à « gauche ») englué dans une idéologie non seulement libérale, mais productiviste.
Alors il ne faut pas s’étonner que les grandes questions, les sujets les plus graves, les plus urgents… n’aient pas été mis sur la table.
Déjà rien ne prouve que «les bonnes idées sur sa droite comme sur sa gauche » soient réellement BONNES. Et puis, rien ne prouve que chercher à faire la somme ou la moyenne des « bonnes idées » soit une bonne idée. Le beurre c’est bon… l’argent du beurre aussi c’est bon. La jolie crémière, n’en parlons pas… Hélas avoir le beurre « et en même temps » … l’argent du beurre, ce n’est pas POSSIBLE ! Rien ne prouve donc que la SOLUTION soit là, au « centre » ou quelque part par là… ( plutôt vers la droite)
Alors je m’autorise, non seulement à en douter, mais à refuser de le croire.
Le candidat Macron et son équipe ont visiblement pris conscience de ce raté, l’absence de l’écologie lors du débat. D’où la publication de ce tweet : « On n’a pas évoqué beaucoup de sujets : l’écologie en fait partie. Il y a une vraie différence de vision. »