Les abeilles, qui ne peuvent pas se défendre en justice

La bataille des écologistes  contre le système thermo-industriel est en train d’être perdu, la guerre ne fait que commencer.

1/3) la justice vient au secours des pesticides

Depuis 2001, le groupe Bayer faisait l’objet d’une information judiciaire concernant son produit, le Gaucho, soupçonné de provoquer la disparition de cheptels d’abeilles. La justice a tranché : « La communauté scientifique n’a pas démontré l’existence d’un lien de causalité entre l’introduction du Gaucho dans les cultures agricoles et l’augmentation de la mortalité des abeilles ». L’instruction a conclu que d’autres facteurs que ce seul insecticide intervenaient dans la mortalité des abeilles, tels que des parasites comme le Varoa, le frelon asiatique ou la perte de diversité des cultures. Si les apiculteurs reconnaissent la multiplicité des causes, ils soutiennent que les pesticides en sont la principale. Pour le juge « appréhender les troubles du cheptel apicole sous l’angle pénal apparaît d’emblée malaisé ». Pourtant, au pénal, quand vous êtes co-responsable, vous êtes quand même condamnés !

(Le Monde.fr avec AFP | 22.04.2014, Mortalité des abeilles : non-lieu pour Bayer)

2/3) les experts font mourir les abeilles

La suspension pour deux ans par Bruxelles de trois insecticides néonicotinoïdes dont le gaucho, impliqués dans le déclin des pollinisateurs, peut être interprétée comme une cuisante défaite. Tardive et pusillanime, la décision de la Commission apparaît en effet comme le symptôme d’une formidable faillite des systèmes d’évaluation des risques. Les pesticides aujourd’hui sur la sellette auraient dû être retirés du marché voilà de nombreuses années. Selon Stéphane Foucart, certaines « expertises » ont entretenu le pouvoir politique dans une ignorance « socialement construite ». Ainsi le rapport rendu en 2008 par la défunte Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa) reprenant dans des conditions d’intégrité discutables la vulgate des agrochimistes : les troubles des abeilles étant « multifactoriels », les nouveaux produits phytosanitaires n’y joueraient aucun rôle déterminant. Il y a fabrique du doute par les marchands de mort. Résultat ? L’Europe affiche un déficit de 13,4 millions de colonies d’abeilles, soit 7 milliards d’individus, pour correctement polliniser ses cultures.

(écologie du risque et course contre le temps (10 mai 2013)

3/3) …alors les hommes deviennent des abeilles

Dans les vergers du Sichuan, dans le sud-ouest de la Chine, tous les habitants du village sont mobilisés pour la pollinisation à la main. Les plus adroits de ces paysans acrobates arrivent à déposer le pollen sur toutes les fleurs d’un arbre en à peine une demi-heure ! La baisse de la population d’abeilles est évidente depuis les années 1990. Les cultivateurs, peu éduqués, utilisent largement les produits phytosanitaires pour éliminer les insectes qui menacent leurs fruits. Et préfèrent en répandre trop que pas assez, car leurs revenus dépendent largement de leur récolte. Avec 0,08 hectare de terre arable par habitant en Chine (contre 0,28 en France et 0,51 aux Etats-Unis), « les paysans veulent exploiter leur champ de la manière la plus intense ». Comme il convient de pulvériser les produits chimiques avant la floraison, aucun loueur d’abeilles ne se risquerait dans les plantations : « Les abeilles ne survivraient pas. » De toute façon, aucune étude sérieuse n’a jusqu’à présent été réalisée sur le déclin des pollinisateurs en Chine.

(LE MONDE du 24 avril 2014, Dans le Sichuan, des « hommes-abeilles » pollinisent à la main les vergers)

1 réflexion sur “Les abeilles, qui ne peuvent pas se défendre en justice”

  1. Petit partage, plasticienne je débute une nouvelle série sur le sujet de la pollution par les pesticides . Une série de dessins au crayon de couleur évoquant, par une suite d’abeilles mortes, la pollution par les substances chimiques et les pesticides utilisés dans l’agriculture. A découvrir :
    https://1011-art.blogspot.com/p/vous-etes-ici.html
    Cette série sera présentée dans le cadre des Rencontres Philosophiques d’Uriage en octobre 2019 répondant à la question « L’art peut il changer le monde ? »

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