Beaucoup de monde croit que l’homme n’est pas un animal. La croyance en la supériorité de l’être humain est en effet incommensurable. C’est un mythe qu’un écologiste se doit de déconstruire.
En fait l’homme est d’une certaine façon moins complexe qu’un grain de riz. Avec ses 20 000 à 25 000 gènes il en possède moins que le riz, qui en compte 30 000 à 40 000*. Pourquoi ? Alors que l’homme peut se déplacer pour se mettre à l’abri, les plantes sont obligée de rester sur place et de s’adapter à leur environnement. Pour ce faire, elles disposent de jeux de gènes qui s’expriment spécifiquement dans telle ou telle condition : le froid, la sécheresse, etc. On peut même aller loin dans la comparaison animal, homme et végétal. L’analyse de l’ADN de différentes espèces révèle que tous les êtres vivants, animaux et végétaux, on en commun au moins 25 % de leur gène. Si l’espèce humaine partage 98 % de ses gènes avec le chimpanzé, il en partage 36 % avec la jonquille Narcissus jonquilla. Cela veut dire tout simplement que l’homme a des ancêtres communs avec les singes, mais également avec les plantes. L’homme ne descend pas des singes, il est lui-même un singe qui devrait savoir que faire son arbre généalogique sur dix générations n’est pas un véritable exploit. S’il remontait bien avant, il trouverait des hominidés il y a 6 ou 7 millions d’années, des petits mammifères au temps des dinosaures, et quelque acides aminés au début de la grande aventure du vivant. L’être humain a besoin de se faire modeste, et de prendre la grain de riz pour ce qu’il est, un très lointain cousin.
Dès lors qu’il y a unité du vivant, la stratégie cartésienne de rupture entre l’homme et les autres espèces ne peut plus fonctionner. L’existence d’êtres vivants capables d’avoir des états conscients n’est pas plus extraordinaire que celle d’animaux ayant des ailes qui leur permettent de voler ou encore de micro-organismes se reproduisant pas des spores capables de survivre pendant des décennies. Aucune comparaison n’implique une hiérarchie : on peut étudier des différences et des parentés, voire établir des généalogies, mais non pas construire une hiérarchie téléologique. Il faut le répéter encore une fois : toutes les espèces qui vivent aujourd’hui sont évolutivement nos contemporains, ce qui veut dire qu’elles voyagent dans le même « train » que l’espèce humaine. « Toute analyse qui voudrait opposer le genre humain aux autres formes de la vie est condamnée à l’échec, parce que toute notre existence témoigne d’une communauté de destin avec les autres êtres vivants. En fait la notion même d’« environnement » est malheureuse : la relation de l’homme avec ce qui n’est pas humain n’est pas une relation entre une entité autonome et un « environnement » car l’homme lui-même est plongé dans un écosystème. »**
Les humains appartiennent à l’ordre de la vie et cette appartenance nous lie à un destin qui s’est noué en notre absence et dont tout indique qu’il va se dénouer sans nous.
* Sciences&vie n°1115, août 2010, 80 incroyables vérités de la science
** La fin de l’exception humaine de Jean-Marie Schaeffer (Gallimard, 2007)