L’humanité, polluant de la Terre ou nouvelle configuration terrestre ? LeMonde* en discute et s’interroge sur la force géologique majeure que constitue l’activité humaine puisqu’elle en arrive à modifier l’atmosphère terrestre. Mais LeMonde se noie dans le détail des discussions oiseuses : quelle est la date de départ de l’anthropocène ? Nous préférons aller au fond des choses avec Jacques Grinevald** :
« Au lendemain du tollé qui accueillit le premier rapport au Club de Rome sur les limites de la croissance (1972), on n’avait pas encore compris l’accélération de la dynamique d’un système aussi complexe que la Biosphère, altérée par l’activité humaine, et on ne croyait pas sérieusement à l’imminence d’une double menace comme celle du changement climatique et de la déplétion mondiale du pétrole brut ! On a oublié que ce rapport scientifique illustrait déjà le problème des courbes exponentielles de notre croissance. Bien entendu, l’ère néolithique n’était nullement un long fleuve tranquille. Mais relativement à l’explosion démographique et technique des deux derniers siècles, le passé semble stationnaire et froid, tandis que l’époque actuelle manifeste une surchauffe incontestable de la croissance. On nous parle beaucoup des impératifs économiques de la mondialisation, mais il est grand temps de réfléchir aux impératifs de la mondialisation écologique, parce que le monde vivant auquel nous appartenons est un phénomène à l’échelle de la Terre. Dans cette perspective planétaire, tous nos problèmes prennent un autre sens, y compris nos problèmes métaphysiques et religieux. Redonner au vivant une place centrale dans notre théorie de la Terre n’est pas encore une évidence pour tout le monde. L’arrogance de l’humanisme fait partie des racines culturelles et historiques de notre crise écologique. Mais une nouvelle figure du sacré est sans doute en train de se dessiner, non dans l’image de cet Homme prométhéen qui se prend pour l’âme du monde ou la conscience de la Nature, mais dans une nouvelle alliance entre l’espèce humaine et toute la Biosphère, alliance sans précédent parce que réellement planétaire et d’une manière qu’on peut seulement exprimer avec la métaphore de la symbiose : l’homme est la Nature prenant conscience d’elle-même. »
Il paraît que le spectacle « fin du monde » vue par les Sea Girls est un grand bonheur, des Bisous de bienvenue au grandiose final Faire pipi sur le gazon. Pour son suicide collectif, l’humanité aime s’accompagner de quelques paillettes… L’humanité veut-elle encore avoir une place sur cette planète ? Parfois nous en doutons… A moins d’une nouvelle alliance avec la biosphère ?
* LeMonde du 5 février 2011, Depuis quand l’homme façonne-t-il le climat ?
** La Biosphère de l’Anthropocène de Jacques Grinevald (Georg, 2007)
La question n’est pas de se demander si oui ou non, il y a trop de gens sur terre, car il n’ a pas de solution à y apporter, la question est plutôt de se demander comment vont vivre ces gens sur terre et vont-ils adopter dès qu’il en auront les moyens la culture occidentale, qui bien que confortable, il faut le reconnaitre, semble être une impasse pour l’humanité. Faut-il radicalement changer de mode de vie, et j’ai bien peur que cela ne se fasse jamais, ou peut-on procéder par ajustement ? Je sais que cette solution n’est pas prônée par des jusqu’au-boutiste comme vous, mais n’a t-elle pas plus de chance d’être réalisé et donc d’apporter un progrès. ,
Mon cher Yves,
Vous avez écrit : « c’est sûr, ce qu’il nous faudrait c’est une bonne guerre, 4 milliards de morts (en asie et en afrique si vous pouvez) et hop ».
Je suis bien d’accord avec vous, l’idéologie biosphériste c’est vraiment à dégueuler.
Je ne retrouve pas l’article du monde qui est maintenant payant.
Mais le debat est un debat de fond, contrairement a ce que vous avancez, car il n’est pas encore etabli que l’anthropocene ai debute avec l’air industriel. Il y’a un debat sur la these de Walter Ruddiman, avec semble t’il des arguments tres solide en faveur de sa these.
http://en.wikipedia.org/wiki/William_Ruddiman
Selon Ruddiman le debut de l’agriculture qui a coincide, notamment en asie a une deforestation massive, rend compte d’une part importante du niveau du CO2 actuel. Ce niveau d’avant l’ere industrielle aurait ete suffisament eleve pour repousser le debut de la prochaine ere glaciaire. En consequence de quoi l’anthropocene correspondrait exactement a l’holocene, cette periode etrange de stabilite climatique (climat justement propice a l’agriculture).
Pourquoi cela est il important ? Parce que, meme si l’utilisation de l’energie fossile correspond a une acceleration, resultant en quelques decenies a des emissions similaires a ce qui eu lieu pendant des millenaires, la validation de la these de Ruddiman change la vision du monde et de cette place de l’homme dans l’ecosysteme: l’agriculture, qui induit une hausse de la population sera percu comme une activite encore moins eco compatible et destructrice qu’avant.
Cette vision renforce la vision que le passage a un systeme quasiment exclusivement agricole et detache des ecosysteme precedent (anihiles) cree sur le long terme une « population trap »: un systeme fragile et globalement destructeur. Toute les civilisations ont eu des crises de subsistances qui les ont aneanti. Et la chute de l’empire romain ainsi que de tres nombreuses autres « catastrophes historiques » sont clairement marque par des accidents climatiques (voir l’artice recent de science juxtaposant l’histoire et le climat sur 2500 ans) qui ont fait chute ou fini par accelerer des processus d’erosion. Nous sommes au bord de la rupture et les prix agricoles le demontre. Les appels a devenir vegetariens ne resoudrons pas l’affaire. L’inde compte de nombreux vegetariens et deja au bord de l’asphyxie (plus d’eau). Pour ceux qui croit encore au miracle , il peuvent lire The vegetarian myth de lierre keith sur gogole books.
L’agriculture a fait « explose » la population humaine des le debut de l’holocene. C’est une tendance continue qui aujourd’hui prend des proportions delirantes et est accentue par l’utilisation des ressources petrolieres et les possibilites qu’elles fournissent pour accroitre encore plus avant l’explitation des ecosysteme et la popuation humaine.
Pour comprendre ce que pourra etre l’humanite de demain, il ne s’agit pas de se projeter dans des reves new age ou pseudo chretien, ou dans un millenarisme fascinant (meme si il y’aura des catastrophes regulatrice) mais de comprendre exactement les consequences d’un developpement (et les raisons de son apparition). Or il apparait de plus en plus qu’il faudra abandonner et le tout agricole, et le tout industriel. Apprendre a produire differement, a vivre plus malin avec moins, a posseder chacun une culture technique suffisante pour que nous puissions nous passer de beaucoup de machines qui nous ont en fait rendu incultes et dependants, a cultiver en comprenant les sols et les ecosystemes, a abaisser notre population en changeant nos habitudes sociales. A ne plus acheter du poisson au spermarche mais a lutter pour avoir des rivieres et des cotes propres ou les poissons migrateurs puisse se reinstaller et etre peche localement, et oublie la notion religieuse du progres qui fait qu’a chaque fois que l’homme a trouve une nouveaute il l’a adopte quasiment exclusivement (agriculture contre chasse et ceuillette, industrie contre artisanat etc).
Mais cela sera impossible sans progressivement detruire la societe industriel et les liens d’alienation qui nous rendent captifs. Et ce n’est pas avec du pseudo spirituel et de « la prise de conscience » que l’on y arrivera.
Pauvre promethee. Cela fait des millenaires qu’il est persecute. D’abord par les dieux grecs, puis l’eglise chretienne, et maintenant …
Promethee, c’est l’homme par excellence. Les grecs etaient de bons observateurs. Ce qui separe l’homme des primates, c’est la maitrise du feu. Sans le feu, l’homme disparaitrait et sans ce meme feu, il n’aurait pas le meme metabolisme. On peut toujours cracher sur son reflet et essayer d’atteindre a une conscience desincarnee…
Par ailleurs tout n’a pas commence avec l’industrie, mais avec l’agriculture (voire meme avant avec la disparition du grand gibier et le report continuel vers des echelons bas de la chaine alimentaire). L’agriculture est une machine destructrice, drainant les sols, creant des deltas avec les sediments arraches, reduisant a neant la biodiversite et aujourd’hui grace au petrole arrachant les forets a un rythme effreine pour aggrandir l’espace cultivable et remplacer les terres rendue au desert. Aujourd’hui la deforestation est une des sources majeurs d’emission de CO2. Le processus s’accelere mais etait en place bien avant. On voit donc que l’alliance dont parle grinevald ne va pas de soi.
Que propose Grinevald, depuis sa chair universitaire en suisse, un des pays cle du pillage capitaliste mondial, servant de plaque tournante au financement du desastre mais preservant consciencieusment ses petites montagnes ?
Les nouvelles alliances on en a deja soupe. L’avantage de l’esprit de promethee sur les grandes alliances « spirituelles », est que justement le religieux est une negation de la realite et l’affirmation d’une fusion qui n’existe pas. Du coup on peut mettre ce que l’on veut dans « la biosphere ». On peut voir l’origine du desastre dans l’esprit religieux plus que dans l’esprit de promethee. Cet esprit, et notamment le protestantisme qui a place l’homme et son travail au rang de noblesse absolue. A constamment fait l’apologie de la transformation d’un univers impur, a fait du monde materiel un monde intermediare, sale compare a l’ideal d’un paradis perdu. A systematiquement eteint la volonte de comprendre pour privilegier la technique et la volonte de faire, de transformer.
A l’oppose, l’esprit scientifique, eperimental, humble et rationnel a produit l’ecologie et c’est peut etre la la cle de l’avenir et de l’essence de l’espece humaine. Nous n’avons aucune conscience immanente, aucune alliance possible mais nous devons rester humble et continnuer a essayer de comprendre quelle peut etre notre place.
L’histoire naturelle est une aventure et la biosphere n’est pas dieu.
L’ensemble des conniassance humaines n’est rien sans humanité pour en profiter.
Polutions diverses auront raison de nous tous.
Un bon exercice pour comprendre ce phénomène est de tracer cette évolution sur dix mille ans. Prendre une planche d’un mètre de long et y coller des feuilles de papier quadrillé. Echelle : un centimètre = un siècle.
Notez au feutre rouge votre propre vie tout à droite. Si vous avez cinquante ans, cinq millimètres se voient bien.
Sur ces dix mille ans (10 ka), notez les grandes périodes de l’Humanité.
-10ka = néolithique, apparition de l’agriculture
-4ka = Mésopotamie, villes, roue, écriture, âge du bronze
-2ka = Egypte, pyramides
-1ka = âge du fer
JC = Rome
1492 = Amérique
1750 = Révolution industrielle
1900 = Aviation, médecine
1950 = Espace, nucléaire
1980 = Electronique
1990 = Internet, biosciences
Ajoutez la population : 1/4 milliard sous JC, 1/2 en 1500, 1,5 en 1900, 3 en 1960, 7 aujourd’hui.
Observez votre schéma et philosophez là dessus…
Cette formidable accélération va forcément aboutir à quelque chose à brève échéance (10 ou 20 ans).
Soit en bien si la courbe se poursuit : découvertes techno-scientifiques inimaginables.
Soit en mal si elle se prend un mur.
Il y a une course de vitesse entre la surpopulation/pollution/déplétion du pétrole, et 4 milliards de jeunes cerveaux ayant accès d’un clic à toute la connaissance humaine.
Accrochez-vous, ça va roxer !
L’homme noir étant rester trop proche de la nature, on ne peu pas lui attribuer une part dans ce désastre annoncé. Ensuite tout ce que les occidentaux considéraient comme indigènes, n’ont pas de responsabilité dans ces pollutions.
La vérité c’est que le monde occidental est une plie pour l’humanité, bien plus que le terrorisme sous toutes ses formes.
Habituellement les occidentaux s’attribuent tous les mérites dans divers domaines, alors pourquoi un occidental voudrait-il partager un désastre avec tous les hommes? Faut pas déconner…
@ auteurs :
pouvez-vous m’éclairer ? Quelle différence fait Grinevald entre « cet Homme prométhéen qui se prend pour l’âme du monde ou la conscience de la Nature » et « l’homme est la Nature prenant conscience d’elle-même. »
L’hypothèse de l’humanisme arrogant est donc la bonne ? La nature est-elle prométhéenne à travers la conscience humaine ?
La nature, a travers l’homme, devient donc libre, puisqu’il n’est pas de conscience sans liberté.
Et si vous approuvez le concept de Grinevald, pourquoi vous acharnez-vous à vouloir détruire le progrès de cette prise de conscience de la nature que constitue chaque nouvel accroissement de l’humanité ? Pourquoi dénoncez-vous chaque nouvelle conquête de l’homme sur la nature, alors qu’elle est une victoire de la nature sur elle-même, suivant Grinevald ? Pourquoi, finalement, luttez-vous contre la nature en condamnant systématiquement ce que fait l’homme, à travers lequel la nature devient consciente et libre ?
Pourquoi les humains sont-ils de trop, si vous admettez l’hypothèse de Grinevald ?
Vladimir Vernadski (« Biosphère et Noosphère ») et Jean-Michel Dutuit (« l’homme-individu et la biosphère ») abordent cette hypothèse prométhéenne de la nature humaine et de sa relation extraordinaire avec la nature.
Salutations,
Jean-Gabriel Mahéo
Les auteurs du blog à Monsieur Mahéo
Monsieur, vous demandez quelques éclaircissements, les voici :
– La nature n’a pas besoin des humains, elle préexiste à l’espèce homo sapiens et existera après lui. La nature est libre puisqu’elle fait absolument tout ce qui est dans ses possibilités. La liberté des humains par contre est limitée par les contraintes alimentaires et énergétiques procurées par la nature, cette liberté est sous condition. Que la conscience des humains puissent construire des modèles complètement artificiels de type prométhéen (religions du livre ou productivisme ou transhumanisme…) n’enlève rien au fait que l’existence humaine dépend de la bonne marche des écosystèmes. Or presque chaque nouvelle « conquête » des humains sur la nature entraîne actuellement une détérioration des possibilités de vie sur terre, que ce soit pour les générations futures ou une grande partie des non-humains. C’est cette détérioration (perte de biodiversité, entropie du système thermo-industriel, désertification…) qui nous amène à penser que la population humaine a actuellement dépassé les limites du supportable. Il y a du trop à la fois dans le nombre absolu des hommes, mais surtout dans les besoins matériels démesurés de sa frange « riche » en pouvoir d’achat. Vous pensez que c’est à travers l’homme que la nature devient consciente et libre. Nous pensons au contraire que c’est à travers la nature et de ses contraintes que l’homme peut devenir conscient et libre. Nous sommes pour l’humilité de l’homme contre un « humanisme » arrogant et destructeur.
– Jacques Grinevald espère comme nous que la pensée scientifique moderne issue de l’aventure spirituelle et politico-économique de l’Occident contient aussi son propre correctif évolutif et peut redécouvrir, avec la Biosphère de la planète Terre, une nouvelle manière de relier les hommes entre eux, une nouvelle définition de l’humilité, ou si l’on préfère de la sagesse. Il est grand temps de revenir à cette sagesse que la mythologie moderne de la rationalité, mécanique et anthropomorphique, nous a fait oublier. On commence à comprendre que le dogme de l’expansion et de la croissance illimitée fait partie d’une illusion de perspective et d’une échelle d’observations trop courte, inhérente à l’âge d’or des combustibles fossiles.
– Nous ne condamnons systématiquement ni la nature ni l’homme, nous nous contentons d’observer ce qui se passe.
c’est sûr, ce qu’il nous faudrait c’est une bonne guerre, 4 milliards de morts (en asie et en afrique si vous pouvez) et hop