A Paris, la maire sortante Anne Hidalgo a fait de la lutte contre la pollution, automobile notamment, son marqueur politique. Les socialistes prônent un nouveau modèle de gestion locale, incluant participation citoyenne et projets (végétalisation, réduction de la place de la voiture, restauration de terres agricoles) parfois inspirés des Verts, tout en gardant des marqueurs sociaux tels la gratuité des dix premiers mètres cubes d’eau ou la construction de logement social. Pour recevoir l’investiture de la majorité macroniste, tout candidat doit adhérer à une charte de dix engagements qui précise notamment que « l’élu(e) s’engage à faire de la transition écologique une priorité ». Cédric Villani, ex-LRM, se rêve en « premier maire véritablement écologiste de Paris », son concurrent Benjamin Griveaux veut créer des « rues-jardins » et améliorer la « santé environnementale ». A droite, les maires sortants entendent bien jouer la carte écolo. Les Républicains restent héritiers d’un credo pro-nucléaire et productiviste, mais une nouvelle garde croit en la possibilité d’une écologie « pragmatique » compatible avec l’économie de marché. Le maire de Nice Christian Estrosi assure œuvrer depuis 2008 à un projet de « ville verte exemplaire de la Méditerranée » faite de végétalisation et de nouvelle ligne de tramway. Nul ne délaisse le terrain environnemental, pas même le Rassemblement national (RN), qui décline un concept des européennes, le « localisme », à l’échelon municipal. Produits locaux dans les cantines, jardins partagés, « faire en sorte qu’on puisse vivre et travailler dans la commune ». A la préférence nationale succède la préférence municipale.*
Il n’est pas difficile de se rendre compte, vu le passé des anciens protagonistes d’un monde dépassé, qu’il ne s’agit en fait que de greenwashing politicien, une écologie décorative et préélectorale, une écologie de l’incantation loin de mettre en œuvre une écologie concrète. On retrouve maintenant au niveau de l’ensemble de l’échiquier politique ce qui a traversé le mouvement écologiste depuis son origine, l’opposition entre une écologie superficielle et une écologie radicale. Il est significatif que François de Rugy ait quitté les Verts pour tomber dans les bras de Macron, puis succédé à Hulot qui avait pourtant montré en démissionnant qu’on ne pouvait rien faire dans ce système techno-industriel même quand on est ministre de l’écologie. François de Rugy se contente de phrases toutes faites : « Il y a tellement de gens qui adorent quand les écologistes sont très radicaux, marginaux et minoritaires. Le conservatisme et la radicalité sont les deux faces de la même médaille, celle de l’impuissance et de l’inaction. Ce que je veux, c’est une écologie qui agit. » Encore faudrait-il définir de quel type d’actions il s’agit. Pour les municipales, que faire ?
L’urgence écologique, la déplétion des ressources fossiles, l’extinction des espèces… exige des efforts tant au niveau individuel que collective. C’est le premier message qu’il faut faire passer pour cette élection locale, la transition écologique demandera des sacrifices. Le comportement personnel de sobriété alimentaire et énergétique ne sera suivi par tous que dans un contexte collectif. Il faudra changer les pratiques, abandonner les parterres de fleurs pour des jardins potagers et les arbres d’ornement pour des fruitiers. Il s’agit d’instaurer un nouvel état d’esprit dans les municipalités, on ne construira la société du futur qu’avec l’apport de chaque citoyen. Il s’agit d’abandonner tous les grands projets qui gaspillent des ressources, promouvoir des ceintures vivrières et endiguer l’artificialisation du territoire, faire des villes fruitières et pas simplement ombragées, mettre une éolienne à la place du moulin à vent en ruine, utiliser des techniques appropriées au contexte local, revitaliser l’artisanat local et les circuits courts, etc. C’est au niveau des communauté de base, au niveau des communes, qu’on peut mettre en place des espaces de résilience, capables de résister aux chocs, cherchant l’autonomie au niveau alimentaire, énergétique et politique. Ce blog biosphere n’est rien en lui-même, mais heureusement tout s’agite autour de lui. Ainsi l’ADEME, avec « Demain MON TERRITOIRE », propose des actions concrètes. Les 20 fiches de ce recueil valorisent des solutions mises en place dans des communes et intercommunalités de différentes tailles, réparties sur l’ensemble du territoire. Elles montrent qu’il est possible d’envisager une ville plus sobre en carbone, avec des gains en matière de lien social, de qualité de vie et de dynamisme économique.
* LE MONDE du 14 novembre 2019, Tous écolos ? La campagne municipale s’annonce verte à tous les étages
Que penser de ces «actions concrètes » que nous propose l’ADEME ?
– Prenons la fiche N°3 consacrée à l’énergie. Dès le début on lit : «Comment faire ? La meilleure énergie est celle qu’on ne consomme pas. Commencer par un diagnostic des consommations du territoire pour identifier les pistes d’économies. »
Super, parfait, pourrions-nous penser. Et juste en suivant, on lit : «Pour ce qu’on ne peut pas réduire, on envisage de passer aux énergies renouvelables. »
Mais, c’est quoi qu’on ne peut pas réduire, voire supprimer, interdire ? Mystère !
Les ENR doivent donc prendre le relais pour continuer à alimenter la débauche du gaspillage énergétique. Et ce dans tous les domaines : publicité, jeux du cirque, activités aussi inutiles que néfastes etc. etc.
– Prenons la fiche N°8 consacrée aux déchets : «Notre mode de vie actuel fait déborder les poubelles […] Il faut avant tout les éviter ! »
Là encore, parfait ! Alors YACA ! Oui mais «Comment faire ? » En fabriquant et en consommant moins, je suppose. Que nenni ! YACA penser et REPENSER !
– « On repense le territoire en entrant dans l’ère de « l’économie circulaire ». On rompt avec les vieilles habitudes du « fabriquer, consommer, jeter ». […] On rend le tri sélectif plus efficace […] On accompagne l’implantation de recycleries et de ressourceries [et patati et patata] »
Autrement dit, YACA penser et croire au mouvement perpétuel. Ah l’économie circulaire… il eut été dommage de ne pas l’inventer, quelle blague ça encore ! L’économie circulaire, c’est super pour continuer à tourner en rond !
Rien de nouveau sous le soleil. Oui bien sûr, «tous écolo ou presque ». Et comment pourrait-il en être autrement ?
C’est vrai qu’elles approchent, donc là encore rien de nouveau sous le soleil. La campagne ne peut qu’être «verte ».
– «Pour les municipales, que faire ? » … Dans les petites villes, oui on peut certainement FAIRE. Mais dans les grandes et les plus grandes, c’est autre chose. Là nous nous heurtons aux stratégies (alliances, con-sensus etc.) que nous observons depuis des décennies au niveau national, pour les résultats que nous savons.
Faut-il, ou pas, parier sur Untel, qui va se marier avec Ontel si ce n’est avec Ontelle ?
Je nous propose de la jouer à pile ou face 🙂