Nous, Lions de Tanzanie, nous voulons la paix

Nous, Lions de Tanzanie, déclarons : à qui appartiennent les terres ? Toutes les terres nous appartiennent, nous les animaux. Nous les partageons avec toutes les autres créatures, nous aimons nous coucher dans l’herbe et savourer le temps qui passe. Les humains ne sont pas notre mets préféré, notre tête ne devrait pas être un trophée qui orne le mur d’un salon. Vivons en paix. Qu’il nous semble lointain le temps béni où nous partagions la savane avec beaucoup de Gnous et très peu de Massaïs ! Mes frères les Lions et nos cousins les Eléphants sont maintenant pourchassés en Tanzanie*, payant un lourd tribut à la destruction de la nature par l’espèce humaine. Nous sommes maintenant une espèce en voie de disparition. Quelques humains bien intentionnés nous ont enfermés dans des « parcs nationaux » au nom de la « conservation de la nature ». Comme si de grands zoos permettaient d’améliorer nos relations avec les autochtones ! Nous, Lions de Tanzanie, nous n’avons que des problèmes.

Vos parcs naturels ne sont qu’illusion. Sanctuariser toujours plus d’espaces pour enrayer le mouvement d’extinction des espèces n’est qu’un acte administratif trop souvent suivi de peu d’effets**. La solution est ailleurs. Les conflits entre lions et humains découlent d’abord de la pullulation humaine. La population de pasteurs semi-nomades est de plus en plus nombreuse, sans compter tous les foyers de sédentarisation. Le mari part avec son troupeau d’animaux domestiques, beaucoup trop nombreux, et la femme reste au village entourée d’une nuée d’enfants. Un ami de Démographie responsable nous a fait parvenir ces chiffres : en 1950 la Tanzanie comptait 7,7 millions d’âmes. Aujourd’hui elle en accueille 48 millions. Selon l’ONU, les projections sont : pour 2050, 138 millions et pour 2100, 316 millions. Cette multiplication par 41 en un siècle et demi équivaudrait à 1,7 milliards de français !

Autant dire que si cette explosion démographique perdure, la faune sauvage tanzanienne ne sera plus qu’un lointain souvenir. Nous les grands fauves, nous ne sommes plus que 20 000 à 40 000… dans le monde entier. Que diriez-vous si votre population humaine comptait aussi peu de représentants ? Que direz-vous si on vous enfermait dans des parcs pour humains, avec vos parcs de loisirs et vos parkings, resserrés sur quelques kilomètres carrés, et pourchassés ?

* LE MONDE du 9-10 septembre 2012, En Tanzanie, les hommes et la faune sauvage face à face

** LE MONDE du 9-10 septembre 2012, la superficie mondiale des aires protégées a augmenté de 50 % depuis 1990

2 réflexions sur “Nous, Lions de Tanzanie, nous voulons la paix”

  1. Il n’y a pas de politique écologique qui ne passe d’abord par une empathie pour la nature et pour les autres espèces vivantes. Si l’on se moque du « point de vue des lions », si l’on se moque du bien être du reste du monde vivant, notre combat part tout simplement sur de mauvaises bases. Hélas, je ne suis pas sûr que cette démarche et cet état d’esprit soit ceux qui animent au plus profondément tous les partis écologistes.
    Ce texte exprime très bien ces choses. Le « point de vue du lion », s’il était adopté par les hommes, serait un excellent guide.

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