Quels choix pour l’écologie ?
Parti, ou mouvement associatif, ou les deux ?
A l’occasion des Journées d’été du parti « Les Écologistes », l’un de nos adhérents revient sur la question des relations entre parti et associations. La candidature de René Dumont à la présidentielle de 1974 est issue des associations environnementales dont l’AJEPNE (aujourd’hui JNE, Journalistes-écrivains pour la nature et l’écologie) fut l’une des chevilles ouvrières.
(article initialement paru sur le site des JNE)
Aux Journées d’été du parti devenu récemment « Les Écologistes », j’ai été accrédité en tant que journaliste au titre des JNE. Trois jours au milieu des ateliers et différents forums d’un rassemblement pour lequel il y avait 3 600 inscrits pour un budget de 200 000 euros. Atmosphère sympa, des tipis et des yourtes comme salles de réunion (facture de 45 000 euros), des toilettes sèches et, pour les urinoirs, récupération immédiate de l’urine. Ambiance à la fois studieuse et conviviale, beaucoup de jeunes et de vieux militants, monnaie locale (le tournesol), mais uniquement pour la buvette. Cadre enchanteur, l’île Balzac, au milieu du Cher. Un des panneaux relatant l’origine de l’écologie politique faisait bien mention que les JNE et les Amis de la Terre avaient été à l’origine de la candidature de René Dumont lors de la présidentielle de 1974. Faisons donc un retour sur le passé pour mieux envisager l’avenir.
Jean-Philippe Beau-Douëzy, membre des JNE dès avant la présidentielle de 1974 (NDLR : et toujours adhérent aujourd’hui), estimait que l’association était un lieu d’intenses débats entre conservationnistes et « écologistes politiques », un espace unique dans lequel la communication, le journalisme, l’activisme, le militantisme, étaient liés dans un vortex humaniste. Mais la présidentielle 1974 fut la seule occasion pour laquelle l’association se mêla officiellement à la politique. Cinquante ans plus tard, j’essaye d’aborder le problème de fond, les relations entre parti écolo et associations environnementales. Symbiose, séparatisme ou interrelation ?
Si les associations environnementalistes découlent des inquiétudes de l’écologie scientifique, l’écologie politique découle historiquement de l’action associative. Tout a commencé en France au début du mois de décembre 1973 (1), au cours d’une réunion de ce qui s’appelle alors l’Association des Journalistes et Écrivains pour la protection de la nature et de l’environnement (AJEPNE) : « Et si on présentait un candidat aux présidentielles de 1974 ? » Après la mort de Georges Pompidou le 2 avril 1974, l’idée se concrétise au sein des Amis de la Terre, de l’AJEPNE et d’autres associations, débouchant sur la candidature de René Dumont à l’élection présidentielle. Voici quelques associations signataires pour cette candidature : Comité antinucléaire de Paris ; Combat pour l’homme ; Droits du piéton ; Écologie et Survie ; Fédération des usagers des transports ; Association pour la protection contre les rayonnements ionisants ; Comité de sauvegarde de Fessenheim et de la plaine du Rhin ; Nature et Vie ; Maisons paysannes de France ; Défense et protection des animaux ; Front occitan, etc. (2). Tout au long de sa campagne électorale, Dumont sera le représentant des associations écologiques qui le soutiennent. Les présupposés de la campagne de René Dumont étaient clairs, le simple résultat d’un constat : « à chaque élection, des écologistes en colère vont trouver les candidats des divers partis politiques. Ils sont reçus avec… une certaine condescendance. Voilà pourquoi le mouvement écologique devient politique. » Il fallait écologiser les politiques, mais aussi politiser les écologistes.
Pour le système marxiste, les syndicats étaient la courroie de transmission du Parti communiste, association et parti étaient indissociables. Mais il s’agissait d’un lien de subordination, le politique dicte sa loi. Pour la cause écologique, c’est le contraire : le mouvement associatif veut peser sur les décisions politiques, que ce soit en 1974 ou aujourd’hui. Il en a souvent les compétences, mais aussi le poids du nombre. Les Écologistes en tant que parti politique avaient 11 106 adhérents en octobre 2023, WWF France compte 220 000 donateurs et des milliers de bénévoles, Greenpeace a pu compter jusqu’à plus de 240 000 adhérents, etc. La synergie paraît nécessaire, elle est actuellement absente.
Un parti politique qui veut porter la cause écologique ne peut que s’appuyer sur le mouvement environnementaliste global. Il semble logique qu’un parti écolo soit en symbiose avec les associations qui œuvrent sur le terrain. Ce genre d’obligation est d’ailleurs inscrit dans les statuts du PS : « Les membres du Parti doivent appartenir à une organisation syndicale de leur profession et au moins à une association, notamment de défense des droits de l’homme »… (article 2.4). Le socialisme est issu d’un mouvement dont la classe ouvrière est à l’origine. Par analogie, une participation à une association environnementaliste devrait être obligatoire quand on se veut militant de l’écologie politique. Attention, cela ne veut pas dire que si on est membre d’une association, on est obligé d’appartenir à un parti ! Personnellement, je suis depuis longtemps membre d’un parti politique, mais aussi adhérent de différentes associations écolos. Dire et faire devraient à mon avis être en concordance. Pour la petite histoire, quand j’étais membre d’un groupe de réflexion sur l’avenir d’EELV. j’ai proposé d’instaurer à l’image du PS cet engagement double dans les statuts ; on m’a asséné : « Cette double appartenance, on n’en veut pas, notre liberté avant tout » !!!
Quant au contenu même de ces Journées d’été 2024, je ferai un autre article… « Les Écologistes » en tant que parti, plutôt libertaire ou plutôt écolo, pas facile de trancher !
Michel Sourrouille
(1) dès les législatives de mars 1973, un candidat écologiste, Henri Jenn, s’était présenté à Mulhouse sous les couleurs du mouvement Ecologie et Survie, avec Solange Fernex comme suppléante. On a déploré récemment le décès de cette figure de la défense de la nature en Alsace.
(2) A vous de choisir : l’écologie ou la mort. La campagne de René Dumont et ses prolongements, Editions Pauvert, 1974.
On ne peut que déplorer que le parti socialiste ait mis cette clause (rendre obligatoire l’adhésion à une association) dans ses statuts. C’est à la fois une atteinte à la liberté fondamentale de conscience et à celle de choisir sa vie et c’est totalement sans intérêt, quelle est la valeur d’une adhésion obligée ?
De toute façon, la seule première objection suffit à rejeter cette obligation.
Je pense que cette clause est ancienne, et qu’elle est aujourd’hui caduque.
Tout évolue, les statuts et les règlements aussi :
– “ Les membres du parti sont encouragés à appartenir à une organisation syndicale de leur
profession et au moins à une association, notamment de défense des droits de l’Homme,
de solidarité, de consommateurs, d’éducation populaire, de parents d’élèves ou d’animation de la vie locale.“
( RÉGLEMENT INTÉRIEUR DU PARTI SOCIALISTE 4 OCTOBRE 2022
ARTICLE 2 .1 .1 .2 .3 : Activités syndicales et associatives – Page 8
assets.nationbuilder.com )
Vous n’êtes donc plus obligé, mais seulement encouragé. Vous pouvez donc signer au PS l’esprit tranquille. D’ailleurs je vous y encourage 🙂
Monsieur Barthès, un parti est seul maître de ses propres statuts, et seuls ses adhérents sont concernés pas cette obligation associative. Si ces statuts vont l’encontre d’une « liberté de conscience » on n’adhère pas à ce parti.
Un membre d’un parti socialiste doit montrer que le mouvement social est complémentaire de son engagement, son adhésion à une association à but social va donc normalement de soi.
A plus forte raison pour un parti écologiste, les associations environnementales ont été à l’origine de l’écologie politique, les membres d’un tel parti doivent exprimer explicitement que cette complémentarité subsiste. « Les Écologistes » et ses militants ont besoin d’être renforcés par l’action de Greenpeace, WWF, Démographie Responsable, etc. A eux de renforcer aussi le mouvement…
Je vous donne raison, mais… je me demande en quoi ça changerait les choses.
Du moins tant que les signatures aux bas des parchemins n’auront pas plus de valeur que ce qu’ON leur en donne aujourd’hui. Misère misère !
J’entends par là les contrats (de mariage et autres), les engagements et les déclarations sur l’honneur, les chartes, notamment éthiques, etc. qui avouez-le… font rigoler tout le monde.
Quand l’on adhère à un parti, et c’est mon cas puisque j’y ai même quelques responsabilités, on adhère à la vue générale et non à tous les aspects particuliers (sinon, on adhère jamais, il y a toujours quelques divergences).
Dans ce cadre,il est essentiel de laisser la liberté de conscience et soumettre l’adhésion à un mouvement à l’adhésion à d’autres me semble irrespectueux. Ca ne veut pas dire que ce n’est pas utile ou complémentaire, là aussi je le fais moi-même, passant la moitié de mon temps en militantisme associatif et l’autre moitié en militantisme politique, mais que l’on soumette conditionnellement l’un à l’autre me semble entrer dans une logique dictatoriale et liberticide que je n’admets pas.
– « Par analogie, une participation à une association environnementaliste devrait être obligatoire quand on se veut militant de l’écologie politique. Attention, cela ne veut pas dire que si on est membre d’une association, on est obligé d’appartenir à un parti ! »
Et encore heureux, qu’ON ne soit pas obligé d’appartenir à un parti !
Ni même à une assoce. Ni même à devoir choisir entre les deux. Merde alors !
Je n’aime pas trop ce genre d’obligations. Mon côté vieil anar, probablement.
Et d’abord ça veut dire quoi militer ? Par analogie, suis-je obligé d’être encarté au Parti d’en Rire, et à jour de mes cotisations bien sûr, pour avoir le droit de rigoler ?
Non, plus sérieusement quoique… le problème c’est que là encore il y a association ET association. Des grandes, très grandes, où inévitablement ON retrouve les mêmes problèmes que dans toutes les grandes structures (partis politiques, clubs, chapelles, familles, entreprises etc.) avec leurs histoires de hiérarchie, de discipline, d’egos surdimensionnés etc. Tout ça merci très peu pour moi !
Et puis les petites, souvent toutes petites. Deux personnes suffisent pour former une association. Ma femme et moi nous pourrions monter une assoce …
Ce n’est pas que je ne l’aime pas, mais je préfère encore m’associer avec mon chien.
Mais nom de dieu, et nom d’un chien… mais POURQUOI nous faudrait-il alors graver nos noms au bas d’un parchemin ? ( La non demande en mariage – Brassens ) 🙂
– « Cette double appartenance, on n’en veut pas, notre liberté avant tout » !!!
Telle est la réponse du groupe de réflexion… à la proposition du camarade Sourrouille.
Qui aujourd’hui se demande si «Les Écologistes», en tant que parti, est plutôt libertaire ou plutôt écolo (sic).
Le camarade Sourrouille sait bien qu’il y a écolo ET écolo : Le beau, le laid, le dur, le mou, qui a un grand cou, celui de chez «Les Écologistes», celui encarté chez Waechter, l’autre chez «Chasse pêche et champignons», l’écolofacho, l’écotartuffe et j’en passe.
Et que du coup TOUS les partis sont écolos ! Comme il sait également que ce sont les membres, les adhérents, autrement dit des gens… qui font un parti. ( à suivre)
(suite) Vu qu’ON peut-être écolo ET facho, écolo ET capitalo, etc. etc. pourquoi alors ne pourrait-ON pas être écolo ET libertaire, et en même temps ?
Ou anar si vous préférez. Vieux ou jeune peu importe, là encore le temps ne fait rien à l’affaire. Pour moi c’est tout vu, et donc facile à trancher, vu qu’«écolo» ne veut rien dire, eh ben ça sera plutôt anar !!!
– « Parti écolo [et/ou] associations environnementales ? » (Titre)
Justement, pourquoi «écolo» d’un côté et «environnementale(s)» de l’autre ?
N’est-ce pas tout simplement parce qu’ «écolo» ça pue ?