Penser la décroissance en l’an 2025

Voici notre production sur le blog biosphere il y a 20 ans, en 2005, sur le mouvement de la décroissance. Nous sommes bientôt en 2025 et pourtant nous pourrions écrire aujourd’hui les mêmes choses, la perception des limites outrepassées n’a fait aucun progrès dans les mentalités. Ce sera donc la catastrophe qui nous servira de pédagogie, si on peut encore parler pédagogie en temps de crises.

12.03.2005 Le développement durable (en kiosque)

C’est le titre d’un Hors-série (1er trimestre 2005) du mensuel « Alternatives économiques » qui montre que l’homme a modelé la Nature selon ses besoins jusqu’à la limite du désastre. On y voit aussi une photo de Maurice Strong, secrétaire de la première conférence onusienne sur l’environnement à Stockholm (9 juin 1972) arrivant en bonne compagnie à la réunion en vélo. On y aborde le réchauffement climatique, la montagne des déchets, le casse-tête énergétique, la question de l’eau et de la ville, on s’interroge : la seule solution, la dépopulation ? Mais G.Duval pense encore que la décroissance n’est pas un projet économique et politique de nature à répondre à la grave menace écologique qui nous menace. Pourtant il constate qu’il y a peu de réalisations à mettre au compte du développement durable, que chacun cherche à protéger les situations acquises et que la décroissance de la consommation d’énergies fossiles doit être mis en place rapidement. Pourtant il souligne aussi l’effet rebond (quand on accroît l’écoefficience, l’usage se développe et la consommation globale ne diminue pas). Mais pour lui la décroissance relève d’une vison du monde passéiste qui voudrait revenir à l’âge de pierre et aux inégalités entre homme et femmes. Il pense sans le démontrer que le salariat est une forme bien supérieure des rapports sociaux. Pour résumer, « Faudrait-il rétablir le féodalisme pour espérer sauver l’environnement ? ».

La Biosphère trouve profondément déplaisant ce genre de penseur qui, assis dans son fauteuil, minimise la nécessaire critique de la croissance économique en faisant dire aux décroissants des choses qu’ils n’ont jamais dites !

08.06.2005 Marche pour la décroissance

Partis de Lyon le 7 juin pour aller vers le circuit de Magny-cours, les militants de la décroissance veulent lutter contre les grands prix de formule 1, ce loisir anachronique réservé à une vingtaine de gosses de riches alors que le déclin de l’extraction pétrolière commence aujourd’hui et que le climat sera complètement déréglé demain. Plus généralement les décroissants désirent plus de liens et moins de biens car il n’y a pas le choix entre un changement des mentalités pour une adaptation maîtrisée ou une crise brutale et incontrôlable : la pétro-apocalypse.

La Biosphère pense que la décroissance n’est pas l’idéalisation du passé, mais un simple constat de réalité : la croissance dans un monde fini constituait l’impossible rêve de la classe globale, celle qui possède personnellement une automobile.

06.07.2005 Faites l’amour, pas la course

Les marcheurs de la décroissance sont arrivés à un jet de pierre du circuit de formule 1 de Magny-Cours. Ils disent : « Contre un divertissement d’entreprises automobiles qui veulent tourner en rond, contre cette stupidité monstrueuse qui nous assène que nous sommes forcément sur Terre pour l’emporter sur les autres, et avant d’en arriver à la pétro-apocalypse et sa régulation par le chaos, il faut devenir des missionnaires de la décroissance. »

Biosphère aime ce genre de discours…

14.07.2005 La décroissance, le journal de la joie de vivre

Ce bimestriel est aussi le journal de Casseurs de pub, il résume tout ce que la Biosphère voudrait que les humains pensent. Dans son numéro de juin-juillet 2005, le grand titre nous engage à « Vivre après le pétrole », avec dessin de la bagnole transformée en poulailler. Il nous tout ce qu’il faut savoir sur la marche des décroissants pour supprimer le Grand prix de France de F1, il fait une biographie du père de la décroissance, le mahatma Gandhi et indique qu’il faut aussi décroître l’armée. Une page entière sur le pic du pétrole (nous y sommes presque), c’est-à-dire le commencement de la fin, et un encadré sur la saloperie que nous n’achèterons pas, ce mois-ci la tondeuse à gazon. A chaque fois un petit reportage sur les éco-citoyens qui pratiquent la simplicité volontaire : on y voit Elke et Pascal vivre sans voiture et sans télé, ce qui donne le temps de s’occuper d’un jardin, mais qui vivent aussi dans le péché parce qu’ils ont un ordinateur et pratiquent la sexualité libre. Ils pensent que faire l’amour avec sa voisine ou son voisin ou les deux à la fois n’a pas de sens moral (ndlr, sauf si on fait trop d’enfants !), mais que prendre la voiture pour aller au boulot, ça, oui !

Les humains sont fait pour penser et pour vivre ce qu’ils pensent, mais la porte de l’avenir est très étroite quand on touche à la Biosphère, elle se referme aujourd’hui de plus en plus rapidement avec l’expansion de la société thermo-industrielle. Seule la généralisation de la décroissance ouvre à nouveau la porte de l’avenir.

06.08.2005 Décroissance démographique

Si l’Afrique va presque doubler de population entre 2005 et 2050 malgré les ravages du Sida, l’Afrique du sud, très touchée par l’épidémie, risque de voir sa population décroître de 44 à 31 millions de personnes. De son côté la Russie est classée 122e dans le monde pour l’espérance de vie ; il faut dire que l’homme y est adepte du zapoï, technique spécifiquement russe qui consiste, au lieu de boire de façon étalée, à s’assommer violemment jusqu’à en tomber par terre, d’où des maladies cardio-vasculaires fréquentes. La Russie est donc passé de 148 millions d’habitants en 1989 à 143,5 millions aujourd’hui et ce malgré l’afflux d’immigrés venus des autres républiques ex-soviétiques.

La Biosphère pense qu’il vaudrait mieux éviter les abus et réguler la population par la contraception, mais si les humains restent vraiment aussi stupides, il paraît alors acceptable que les drogues et les virus deviennent les facteurs fondamentaux de la décroissance démographique humaine.

16.08.2005 Une seule solution, la décroissance

Les deux principaux pays pollueurs au monde, les Etats-Unis et la Chine, ainsi que l’Australie, l’Inde, le Japon et la Corée du sud ont signé un partenariat sur le développement propre et le climat. L’objectif est de mettre des moyens en commun pour développer des énergies plus propres (gazéification du charbon, géothermie)) et promouvoir le transfert de technologies : nouvelles centrales nucléaires, éoliennes plus performantes. Alors que ces six pays représentent la moitié des émissions mondiales de CO2 , il ne s’agit nullement de réduire les émissions comme le faisait le protocole de Kyoto, mais de promouvoir une croissance économique moins intense en gaz à effet de serre.

Encore une fois, la Biosphère constate que les humains veulent toujours remettre à plus tard la nécessaire décroissance productive en utilisant des alibis dérisoires.

30.08.2005 Qui peut être contre la décroissance ?

Un ouvrage très sérieux « Le développement durable, les termes du débat » (coll. Compact civis), indique dès le début de son premier chapitre ce qui sous-tend l’évolution actuelle des idées :  « Le slogan de la décroissance générale interdirait la réduction de la pauvreté et n’est guère compatible avec nos systèmes démocratiques. Il convient, en revanche, de disjoindre le dynamisme de nos sociétés de la croissance des flux de matières et d’énergie qui l’a toujours sous-tendu. C’est la croissance de ces flux qui met en péril la viabilité pour l’espèce humaine, notamment la biosphère (…) Il convient encore d’ajouter à la nécessaire décroissance des flux de matières et d’énergie et la décroissance, non moins impérative à long terme, des effectifs démographiques planétaires ».

La Biosphère ne peut que se réjouir d’un tel discours de Dominique Bourg, mais cela implique de condamner (à mort, mentale bien entendu) tous les économistes et politiques qui ne jurent que par la croissance !

10.09.2005 Des océans qui se vident

Une étude statistique réalisée par l’Institut de recherche pour le développement montre qu’un quart des pêcheries mondiales a connu un effondrement. Jusqu’à présent l’optimisme régnait car on estimait que lorsque les quantités de poisson capturés restaient stables d’une année sur l’autre, le renouvellement des espèces était conservé. En réalité un effondrement est intervenu ces cinq dernières années chez tous les types de poissons, et davantage encore pour les espèces en eau profonde comme la morue, le haddock et le saumon. En effet les capacités de pêche ont augmenté d’une manière si importante que le rythme des captures a pu rester stable pendant longtemps alors que les océans se vidaient de leurs ressources halieutiques. Ainsi, malgré l’interdiction de la pêche à la morue au Canada depuis 1992, la population ne se renouvelle toujours pas.

Dans la Biosphère sous-marine, des poissons en nombre de plus en plus petit cherchent désespérément à se reproduire, le nombre de célibataires s’accroît, c’est la décroissance démographique marine qui précède celle des humains.

16.09.2005 L’euthanasie en direct

La télé-réalité n’a plus de limites, elle recherche « femme enceinte acceptant d’accoucher en direct », mais elle se refuse encore à présenter la mort en direct, en particulier après un choix d’euthanasie. Pour Hummie Van der Tonnerkreek, le réalisateur de « Big brother », il faut en effet différencier ces deux cas : « Avoir des enfants, c’est une fête ; l’euthanasie, c’est sans doute la dernière chose que vous voudriez partager avec d’autres ». Mais ce prescripteur d’amollissement cérébral ne connaît pas grand chose à la relativité en matière sociologique. La mort pour un catholique profond est le moment d’une véritable espérance en la vie éternelle alors que faire un marmot dans un ménage allemand est souvent considéré comme une véritable calamité.

Claire Quillot expliquait son suicide programmé comme une manière de « ramener une sorte d’optimisme ». Du point de vue de la Biosphère, elle a tout à fait raison : la décroissance humaine consentie est préférable à l’explosion démographique du troisième âge. Vive l’euthanasie en direct, à mort les naissances excédentaires !

02.10.2005 La décroissance (disponible en kiosque) 

Dans ce bimestriel sous-titré « Le journal de la joie de vivre », cette intéressante conclusion sur l’impuissance humaine à contourner l’effet de serre d’origine anthropique : « Une étude publiée dans Nature estime qu’il n’y a aucun bénéfice énergétique à utiliser la biomasse des plantes pour fabriquer du carburant. Selon les chercheurs de l’université de Cornell et de Berkeley, la fabrication du carburant éthanol à parti de maïs nécessite un tiers de plus d’énergie que celle qui sera restituée comme carburant. Utiliser de la biomasse n’est donc pas une stratégie soutenable. Une autre étude parue dans Bioscience montre quant à elle que l’éthanol à usage de biocarburant réduit la biodiversité, augmente l’érosion des sols et consomme de grandes quantités d’eau ».

La Biosphère savait déjà que les humains n’auraient jamais du se déplacer autrement qu’à pied, ils étaient déjà suffisamment doués naturellement pour être des coureurs rapides et endurants ou des marcheurs infatigables …

08.10.2005 La faute au Nord ?

Alors que certains dénoncent le phénomène de surpopulation sans égard au poids écologique respectif des populations du Nord et du Sud, pour les écologistes le problème global de l’environnement s’articule autour du gaspillage des ressources et des inégalités Nord-Sud. Si l’épuisement des ressources est attribuée aux pays surpeuplés du Sud, il n’est fait souvent aucune référence aux taux de consommation per capita ni aux transferts de denrées et de matières premières vers le Nord. Pour les écologistes, le gaspillage des ressources, la pollution et la production de déchets sont directement liés au phénomène de la surconsommation de la classe globale, celle qui possède personnellement un véhicule. La situation est aggravée par la diffusion de ce modèle de production et de consommation lié au déplacements individuel dans les pays émergents.

Pour la Biosphère, les habitants des pays riches qu’ils soient patrons ou ouvriers sont tous responsables. La seule orientation possible pour les peuples du Nord, c’est la simplicité volontaire en général, la décroissance de la consommation d’automobiles individuelles en particulier. Pour les peuples du Sud, c’est de continuer à pratiquer la simplicité involontaire et de refuser de tomber dans le piège de la société de consommation. Au Nord comme au sud, il faut dorénavant privilégier la vie conviviale, la relation contre la frénésie matérialiste.

15.10.2005 un Parti pour la décroissance ?

Suite aux Etats-généraux de la décroissance équitable qui se sont déroulés le 15 octobre 2005 à Lyon en rassemblant plus de 300 personnes, le « Parti pour la décroissance » annonce sa naissance. Le mouvement pour la décroissance prend de l’ampleur dans la société et il se concentre maintenant sur son indispensable articulation politique. Au moment où nous atteignons le pic d’extraction du pétrole, le choix ne se pose pas entre croissance et décroissance mais entre récession ou décroissance, c’est-à-dire entre le chaos ou une décroissance soutenable et équitable préservant et renforçant la démocratie et l’humanisme. Le Parti pour la décroissance s’attelle aujourd’hui à présenter des candidats dans toutes les circonscriptions françaises en 2007 pour présenter la décroissance à l’ensemble de nos concitoyens.

Le Parti pour la décroissance  appelle toutes celles et tous ceux qui souhaitent que la décroissance soit portée dans le champ politique à le rejoindre, la Biosphère incite tous les décroissants à investir aussi tous les partis politiques quels qu’ils soient pour porter leur message : il n’y a plus de droite ou de gauche ni même d’extrêmes quand la sauvegarde de la planète est en jeu.

18.10.2005 Utopie, ce qui a existé autrefois

Imaginons une France où il n’y aurait plus que 200 000 chômeurs, où la criminalité serait réduite des quatre cinquièmes, les hospitalisations pour troubles psychiatriques des deux tiers, les suicides de jeunes divisés par deux et où il y aurait une absence quasi totale de cannabis, de cocaïne et d’héroïne : ce serait un merveilleux progrès s’il ne s’était déjà accompli dans le passé. Les chiffres ci-dessus sont en effet propres à la France des années 1960. Aujourd’hui tous les indices convergent pour montrer que, plus les français courent après la croissance économique, plus le bien-être de la population diminue ! Il y a un os quelques part… On croirait que les humains se sont réunis en société non pour assurer leur bonheur, mais pour produire à meilleur marché des voitures de métal, des tissus artificiels et du chômage.

Vous multipliez votre nombre et votre emprise sur les écosystèmes en déstabilisant l’équilibre social et naturel, il n’y a donc qu’une issue : la décroissance humaine.

4 réflexions sur “Penser la décroissance en l’an 2025”

  1.  » mais si les humains restent vraiment aussi stupides, il paraît alors acceptable que les drogues et les virus deviennent les facteurs fondamentaux de la décroissance démographique humaine. »

    Voilà une phrase qui me plaît bien , du réalisme à l’ état pur .
    On y va droit dedans et la Fentanylisation (+ ketamine + xylazine) va faire son oeuvre dans les pays dits développés voire ailleurs vu le faible coût de cette terrible drogue décroissantiste .😎
    Pour la réacquisition du lebensraum , l’ accélération de la décroissance démographique et le sauvetage de la biosphère , la cessation de toute aide médicale, financière ou alimentaire aux pays du 1/3 monde s’ impose .
    Une certaine misanthropie peut se nommer lucidité .

  2. – « D’abord ils vous ignorent, ensuite ils se moquent de vous, après ils vous combattent et enfin, vous gagnez. » (Gandhi ?)
    Il y a 40 ans j’ignorais tout de la décroissance. Ses idées, ses «apôtres», ses précurseurs, et même probablement le mot, que je découvre plus tard en même temps que Georgescu-Rogen.
    Bien que ce personnage soient encore aussi connu du Grand Public (Populo, Populasse…) que le sont Illich, Charbonneau et j’en passe… aujourd’hui tout le monde a entendu parler de la décroissance. Seulement il faut voir comment.
    Je me souviens, il y a 20 ans, de la façon dont ON nous présentait ces drôles de gens… triés soigneusement sur le volet par les meRdias (le Système). ON nous les montrait vivre dans des yourtes, retaper des ruines quelque part au trou du cul du monde, s’éclairer à la bougie, aller chercher l’eau à la source etc. etc. Des illuminés, des hippies, ON ne les assimilait pas encore aux austères Amish. (à suivre)

    1. (suite) Bref, ON se moquait alors gentiment de cette petite poignée de farfelus pas bien méchants. Aujourd’hui ce n’est plus du tout pareil. Aujourd’hui ON ne les trouve plus rigolos, et même pas du tout. Et donc ON ne rigole plus. Faut dire qu’en 20 ans il en a coulé de l’eau sous les ponts. « L‘écologie ça commence à bien faire ! »… qu’ON a dit.
      « Ras-le-bol ! » répond ce con d’écho. Et pas que de l‘écologie. Misère misère !
      « La France ON l’aime ou ON la quitte ! » qu’ON a dit aussi. Et puis « Casse-toi pov’con ! », autre façon de dire « Ferme ta gueule ! ». ON a même dit « Ceux-là j’ai très envie de les emmerder, jusqu’au bout »… Et j’en passe !
      Résultat… la vulgarité et la saloperie se sont banalisées. Et pas que dans le monde politique.
      Aujourd’hui ON casse du décroissant comme ON casse de l’écolo. (à suivre)

      1. (et fin) Du «gauchiasse» et en même temps. TOUS des «pastèques», des «khmers verts», des «islamo-gauchistes-wokistes-terroristes» et j’en passe.
        Pareil des fonctionnaires, des sociologues, des chercheurs, « Et les dealers et les chômeurs, les communistes, psychanalystes, TOUS des pédés dégénérés ! Au temps pour moi » (Benureau)

        Aujourd’hui nous sommes assurément à la 3ème phase (ils vous combattent)…
        Mais alors… mon dieu quelle phase !
        ON mélange tout et n’importe quoi, ON pense, ON dit et ON fait, n’importe quoi !
        Ce ne sont donc pas les idées de la décroissance qui deviennent populaires… mais les idées pourries ! Ce qui fait que j’ai de plus en plus de mal à croire à la 4ème (Grand Soir).

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