« Le monde en ce début du XXIe siècle reste largement dans l’âge des énergies fossiles. Nous rêvons tous d’une fin de siècle avec une planète qui se sera débarrassée des énergies non renouvelables et polluantes. La transition énergétique est une impérieuse nécessité ! C’est une nécessité à la fois économique, géopolitique et environnementale. Voilà une affirmation que tout le monde peut et doit partager. » Ce point de départ est excellent, la suite l’est beaucoup moins.
Il y a bien sûr une attaque contre « la vision malthusienne flirtant avec les thèses de la décroissance ». Cela prouve que Philippe Chalmin ne connaît ni Malthus, ni Georgescu-Roegen. Il y a ensuite le credo scientiste : « La deuxième ambiguïté est de raisonner en tenant insuffisamment compte des progrès scientifiques et technologiques : penser demain avec le regard scientifique – et donc énergétique – d’aujourd’hui est une erreur courante chez nombre de prévisionnistes. » Demain on ne rasera pas gratis, la techniqu eest déjà devenue le problème pas la solution ! Le couplet sur le nucléaire vient juste après : « Grâce au nucléaire, la France dispose de l’une des électricités les moins carbonées de la planète à un coût inférieur à ses voisins. » Peu importe qu’il s’agisse là d’une contre-vérité tant elle est répétée. On aligne aussitôt un nouveau poncif : « Les énergies renouvelables actuelles ne peuvent assurer à elles seules une transition post-pétrolière et post-nucléaire. » Donc cela nécessite le gaz de schiste : « Il y a une énergie qui sera le chaînon manquant de la transition énergétique de la planète : le gaz naturel. Le développement des gaz de schiste aux Etats-Unis y a complètement modifié la scène énergétique. » Chalmin ne nous dit pas pour combien d’années les USA seront sauvés par ce gaz dont l’extraction est controversée. De tout façon, c’est chez gens-là, il n’y a aucun doute, aucune controverse, on a raison puisqu’on répète toujours la même chose : progrès techno-scientifique, nucléaire, gaz de schiste… et non à l’écologie : « Le principe de précaution vire à l’absurde »*.
Philippe Chalmin est professeur à l’université Paris-Dauphine, il pontifie surtout dans les médias. Lors de la présidentielle 2012, Philippe Chalmin avait signé avec 18 autres économistes « sans parti pris idéologique » un appel pour voter Nicolas Sarkozy. Il publie chaque année un rapport sur l’état et les perspectives des marchés mondiaux de matières premières. Il est donc idéologiquement de droite et libéral ! Il ne faut pas attendre de lui une vision malthusienne et décroissanciste. Pourtant il devrait être bien placé pour savoir qu’il va nous falloir organiser la décroissance quand nous n’aurons plus de matières premières fournies généreusement à bas prix par la nature !
* LE MONDE du 19 septembre 2013, « Les énergies renouvelables ne peuvent assurer la transition post-pétrolière«