pic pétrolier, pic de la mondialisation, pic de notre civilisation

Le pic pétrolier ne signifie pas que le monde soit à court de pétrole. Cette expression décrit le moment où la production pétrolière ne peut plus augmenter. A ce moment, il reste encore beaucoup de pétrole. Mais il est tout simplement beaucoup plus difficile à découvrir et à extraire, ce qui signifie qu’il devient très ardu, voire impossible, d’accroître la production mondiale. L’offre reste stable pendant un temps (en plateau), puis finit par entrer en phase de déclin terminal. La perspective du pic pétrolier n’est plus une théorie marginale soutenue par quelques alarmistes. C’est une réalité géologique. Compte tenu du rôle fondamental du pétrole dans nos économies, cela signifie le début d’une nouvelle ère dans l’histoire humaine.

Face à une production pétrolière stagnante, la demande continue de croître considérablement : La Chine, l’Inde, la Russie… , ce qui implique une concurrence croissante pour accéder à une offre limitée. Les principes économiques de base indiquent qu’avec une offre qui stagne et une demande qui augmente, le pétrole va devenir beaucoup plus cher – une configuration qui est déjà à l’œuvre. Le problème du pic pétrolier, par conséquent, n’est pas que nous soyons à court de pétrole, mais que nous soyons déjà à court de pétrole bon marché. Actuellement, le monde consomme environ 89 millions de barils par jour, soit 32 milliards de barils par an. Ces chiffres stupéfiants expliquent pourquoi le pétrole est comparé à un élément vital de la civilisation industrielle. Comme pratiquement tous les produits d’aujourd’hui sont dépendants du pétrole, l’âge du pétrole cher renchérira les prix des marchés du commerce mondial. Le pic pétrolier se traduira donc probablement par un « pic de la mondialisation ». Certains spécialistes de l’énergie estiment même que le pic pétrolier pourrait signifier la « fin de la croissance économique », car les économies ont besoin d’énergie bon marché pour se développer. Ce qui pourrait bien provoquer une relocalisation des économies – non pas en raison de décisions de responsables politiques, ni d’une revendication citoyenne – mais simplement comme la conséquence de marchés réagissant à la hausse des cours du pétrole.

L’avenir ne ressemblera en rien au passé, et nous devrions nous préparer à cela – psychologiquement, socialement, économiquement et politiquement. La montée des sociétés de consommation depuis la révolution industrielle n’a été possible qu’en raison de l’abondance des combustibles fossiles bon marché. A titre d’exemple, en l’absence de pétrole, l’australien moyen devrait mobiliser environ 130 « esclaves énergétiques », travaillant huit heures par jour, pour maintenir son style de vie. Les consommateurs du monde entier devraient commencer à se préparer à une forte révision à la baisse de ces styles de vie si intensifs en énergie et ressources qui sont largement prisés aujourd’hui. Bien que l’exigence de consommer moins de choses provoquera un grand – et désagréable – choc culturel pour tous ceux qui ne l’ont pas anticipé, on pourrait bénéficier de cette transition en adoptant volontairement un mode de vie plus simple. Consommer moins, vivre plus. Cela vaut la peine d’y réfléchir.

Nous devons réinventer une « bonne vie », au-delà de la culture du consumérisme. Si nous attendons que le consumérisme soit abandonné sous la contrainte des circonstances, la transition vers l’après ne sera pas une bénédiction mais une malédiction.

Samuel Alexander, Sydney Morning Herald, 11 janvier 2012

Le Dr Samuel Alexander est co-directeur du Simplicity Institute (www.simplicityinstitute.org), un institut de recherche qui traite des questions liées à la consommation durable, au pic pétrolier et à l’économie post-croissance.

http://contreinfo.info/article.php3?id_article=3163

 

2 réflexions sur “pic pétrolier, pic de la mondialisation, pic de notre civilisation”

  1. Penser ensemble le pic pétrolier et les changements climatiques pour construire collectivement une descente énergétique à l’échelle d’un territoire : tel est le but des villes et villages en Transition Ce vaste mouvement citoyen mondial (qui existe depuis bientôt 6 ans) est animé par une vision positive des contraintes qui sont les nôtres aujourd’hui et considère que la crise multiforme que nous connaissons est une chance qui nous est offerte de faire beaucoup mieux avec moins, de faire grandir notre humanité plutôt que notre niveau de consommation ou de confort.
    Nous pouvons augmenter la résilience du territoire dans lequel nous vivons en nous réappropriant notre vie dans tous ses aspects : alimentation, logement, santé, etc. Nous pouvons redevenir solidaires et refaire les liens que nous avons perdus avec autrui et avec la nature pour construire un monde soutenable. Encore faut-il le vouloir mais il semblerait que le problème soit la solution…

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