Pour ou contre… la viande de substitution

Florence Burgat : Pourquoi mangeons-nous des animaux alors que rien ne nous y force ? Nous pensons que les substituts de viande de boucherie pourraient venir prendre la place de cette dernière. L’humanité pourrait cesser d’être carnivore sans l’avoir voulu et sans s’en apercevoir. Il est d’ores et déjà possible d’offrir des simili-carnés (burger, saucisses, jambon) ou simili-fromages sans qu’il soit possible de les distinguer des préparations ordinaires. Et le marketing, qui s’y entend à nous faire croire ce à quoi nous avons envie de croire pourrait jouer un rôle majeur dans la promotion de ces imitations végétales, mais aussi viande cultivée, véritable viande fraîche obtenue à partir de cellules musculaires (porc, bœuf, poulet)… Bref la viande générique que nous connaissons.

Jocelyne Porcher : Dans ce monde nouveau, harmonieux, pacifié et joyeux, tel que le décrivent les start-up de la clean meat (viande propre) et les associations prosélytes du véganisme à leur service, les humains seront enfin délivrés de leur propension à dévorer leur « prochain ». Car, c’est une constance de ces entreprises, en prenant en charge notre alimentation, elles ont toutes à cœur de « rendre le monde meilleur ». Qu’est-ce que la viande « propre » ? Il s’agit de viande in vitro aussi dénommée « viande de culture », c’est-à-dire de muscles cultivés en laboratoire à partir de cellules animale. Ce produit est dit « propre » car il n’est pas entaché de la mort d’un animal. Il est présenté comme plus sain et moins impactant sur l’environnement. La société Impossible Food (USA) propose déjà un « impossible burger » qui donne l’impression d’être saignant.

Mais la viande in vitro est-elle réellement éthique ? Ce système repose sur l’exclusion des animaux de ferme de notre alimentation et de notre vie. Lorsque les « défenseurs » des animaux militent pour une agriculture sans élevage, ce dont il est question, c’est de vivre sans animaux. Ils ne mourront plus certes, mais ils ne vivront pas non plus. Après 10 000 ans d’histoire commune et de coévolution, cette exclusion unilatérale est violente, cruelle et immorale. Ce qui nous est proposé comme substitut est de facto du mort-vivant. Du mort parce qu’il est produit en dehors de la vie vécue par les animaux, par leurs éleveurs et par tous ceux qui aiment les animaux. Du vivant, parce que la cellule est un élément constitutif du vivant biologique. Le lien entre les multinationales de la clean meat et les associations de défense animale qui promeuvent le véganisme résulte d’une collusion d’intérêts bien compris par les uns mais sans doute beaucoup moins par les autres.

L’Ecologiste numéro 50, octobre-décembre 2017

9 réflexions sur “Pour ou contre… la viande de substitution”

  1. Pourquoi, @Michel C, prétendez-vous que mon raisonnement constitue un divertissement? Les idées que je véhiculent ne sont pas rigolotes, ne sont pas des blagues, et sont à prendre très au sérieux.

    Que nous devenions tous végans n’engendrera pas forcément le fait que de nos campagnes disparaissent vaches, moutons et compagnie. On pourra très bien élever quelques animaux sans les tuer, dans le simple but que nos praires ne soient pas tristes.

    Donc arrêtons avec les clichés : le véganisme ne consiste pas à faire en sorte que quelque espèce animale soit éradiquée.

    Je rappelle par ailleurs que j’ai appelé, non pas à éradiquer totalement la nourriture animale, mais à la réduire considérablement. Il n’y a donc dans mes écrits aucun appel au végétalisme intégral, et donc aucun appel à ce que nous devenions tous végans.

    Vous écrivez : « je pense qu’il vaut mieux laisser tomber les histoires de goûts et de couleurs et se pencher sur le bilan écologique de ces pseudo viandes ».

    L’un n’empêche pas l’autre : on peut très bien s’intéresser à la fois à la qualité gustative et à l’écologie.

    Quant au bilan écologique des similis, il dépend du similis. Il y a des similis bios, des similis non-bios, et au sein des similis bios, ils peut y avoir bon nombre de différences.

    Quoi qu’il en soit, je répète pour la énième fois que le bilan écologique de la vraie viande n’est pas moins mauvais que celui des similis végétaux.

  2. @Invite2018
    Merci j’avais compris, c’est comme pour tout il y a simili et simili… bien sûr. En tous cas votre raisonnement est pour moi un véritable divertissement, comme ici votre logique gustative.
    Comme je disais précédemment, il ne devrait pas être très compliqué de fabriquer des similis qui satisfassent les palais des amateurs de junk-food. Et même pour pas cher, le sacro-saint Pouvoir d’Achat sera lui aussi satisfassé, il serait en effet dommage de donner de la confiture aux cochons. Et quand le goût sera devenu un sens ramolli, on pourra passer à l’étape supérieure, à savoir nourrir les cons-ommateurs de pastilles insipides.
    En attendant, pour en revenir aux décors de nos chères campagnes devenues bien tristes quand nous serons tous vegan… nous pourrions peut-être empailler quelques veaux, vaches, cochons. Finalement, vus de loin ça pourrait le faire.

    Plus sérieusement, je pense qu’il vaut mieux laisser tomber les histoires de goûts et de couleurs et se pencher sur le bilan écologique de ces pseudo viandes.

  3. Je vous signale, @Michel C, que les similis ne sont pas un groupe homogènes. Le similis peut imiter le goût de la viande premier prix, mais il peut aussi imiter le goût de la viande fermière de la meilleure qualité qui soit.

    Je répète que quand je parle de développer les similis, je parle de similis qui imitent assez bien de sorte que votre palais des saveurs ne puisse pas faire la différence.

    C’est dans ce sens que je vous demandais pourquoi vous préfériez la vraie viande au simili. En toute logique, du point de vue gustatif, soit vous aimez la vraie viande et donc vous aimez aussi le simili, soit vous n’appréciez gère le simili et donc vous n’appréciez pas non plus la vraie viande.

    Donc votre préférence pour la véritable viande peut difficilement être gustative. Et qu’elle soit éthique n’aurait absolument aucun sens.

    Le bilan écologique de la vraie viande n’est aucunement moins mauvais que celui du simili. Donc je comprendrais que vous fissiez le choix personnel de ne consommer ni vraie viande ni le simili, mais il est illogique de préférer la chaire animale au simili végétal.

    Je précise par ailleurs que quand je parle de développer l’offre de similis-carnés, je veux dire par là que je veux que les citoyens ait le droit, et non pas l’obligation, de manger des similis. Si personnellement vous préférez que votre très forte réduction d’aliments animaux ne soit compensé que par des aliments végétaux qui ne soient pas des similis, c’est sans ironie ni sarcasme que j’affirme que c’est votre droit le plus strict.

    Vous dîtes que vous ne souhaitez pas que de nos campagnes les vaches, les moutons et les poules disparaissent, et je vous répond que moi non plus. Je prône que la fabrication de produits animaux devienne inférieur à cinq pour cent de ce qu’en l’état actuelle des choses elle est, cela ne veut pas dire que je veux éradiquer les animaux d’élevages.

    Il serait fallacieux de prétendre que le développement des similis duquel je fais la promotion engendrât la disparition de quelque espèce animale.

    Concernant le fait de manger local du fait-maison, je vous répondrai que l’un n’empêche pas l’autre : le développement de similis-carnés qui soient végans et bios n’empêche peut très bien venir en plus de ce que vous suggérez.

    Et je prône qu’afin que tout citoyen, s’il a envie, puisse consacrer du temps à cuisiner lui-même, le temps de travail soit, sans perte de salaires, autant réduit que nécessaire.

  4. @Invite2018
    Pourquoi ? me demandez-vous. Parce que vous savez bien ce que dit le dicton :  » Des goûts et des couleurs on ne discute pas !  »
     » Mais nous ne faisons que cela  » … rajoutait Nietzsche.
    Comme je n’ai jamais goûté au simili, comment alors pourrais-je dire que je préfère la vraie viande ? Bonne question ! Remarque, il y a des tas de choses que je n’ai pas envie de goûter, et ce dans des tas de domaines, je laisse ça volontiers aux autres.

    Ceci dit je ne suis pas un grand amateur de viande, ni de grands vins. Toutefois mon palais sait faire la différence entre un poulet de ferme et un poulet à 3€, pareil entre un Bordeaux d’une dizaine d’années et une vulgaire piquette. Et il se trouve que je préfère le poulet de ferme et le Bordeaux. Rien d’exceptionnel à ça certes, mais j’en connais des tas qui se régalent de junk-food ; ils trouvent le poulet de ferme trop dur, le poisson chiant à manger à cause des arêtes, ils préfèrent la mayo en tube à la mayonnaise maison, le Coca au Bordeaux. Bref comme on dit, tous les goûts sont dans la nature.
    Je ne doute donc pas qu’on puisse préférer le simili-carné, fusse t-il de la marque Sojasun… à une bonne côte de mouton, fusse t-elle issue d’un mouton qui descend des estives comme en ce moment. De la même façon que certains préfèrent le simili-cuir au vrai cuir.

    Maintenant il nous faudra regarder le bilan écologique de la fabrication de cette pseudo viande. Et là aussi on risque de vite déchanter.

    Personnellement je prône la juste mesure, la sobriété. J’ai déjà dit que nous mangions trop et trop mal, et que la nourriture n’était pas assez chère (la preuve, le gaspillage). J’invite à manger des produits locaux et de saison, produits dans de bonnes conditions, aussi bien pour notre santé que pour le bien-être animal. Et des produits cuisinés à la maison ! Il suffit pour ça de se faire violence, laisser tomber la télé et prendre le temps d’aller au marché et de cuisiner.
    Enfin, même si je souhaite la disparition de tous les élevages industriels, je ne souhaite pas que les vaches, les moutons, les poules etc. disparaissent de nos campagnes.

  5. @Michel C, pourquoi préférez-vous la vraie viande au simili-carné? Je vous signale que la viande authentique présente tout défaut que présente le simili.

    Concernant l’alcool, ce n’est pas pareil. D’une part le goût de l’alcool est bien moins imitable que ne le sont les goûts des aliments animaux, d’autre part les produits animaux impliquent, quand ils ne sont pas en dose qu’homéopathiques, d’immondes torturent que ne requiert pas la production d’un bon vin qui soit bio et végan (moralement, le terme « vin végan » devrait être un pléonasme, mais il se trouve qu’il a tendance à ne pas l’être).

    Et que je parle de développer les similis, je parle de similis qui imitent convenablement le goût et la texture de la viande, du poisson, du lait, des œufs, du fromage et du miel. Je ne parle pas des pseudos similis qu’actuellement dans les rayons des supermarchés vous trouver (si votre expérience du simili, c’est les steak de la marque Sojasun, alors vous aurez une mauvaise image du simili, mais ça ne remet pas en cause l’idée même de faire du simili.

  6. Bonsoir monsieur Barthès.

    Attention à ne pas recourir au sophisme de l’appel à la nature. La nature nous a programmé, non pas pour que nous mangions des animaux, mais pour que nous puissions manger des animaux.

    Et si nous humains n’en mangions plus du tout, ce ne serait peut-être pas forcément un bien, mais ce ne serait pas du tout un mal. Donc ne soyez pas effrayé par le développement des similis duquel je fais l’apologie, ce même développement ne va tuer personne, contrairement au maintient du niveau actuel de produits animaux, qui quant à lui fait des ravages.

    Concernant la démographie, je suis favorable à ce que massivement soit développé la contraception, afin que nous puissions mettre en oeuvre la très nécessaire réduction des naissances.

    Une moindre consommation de viande permettrait comme vous dîtes de réduire la souffrance, et c’est justement ce vers quoi les similis ont vocation à amener : si vous remplacer la viande par le simili, alors mécaniquement, vous avez une alimentation moins carné et vous produisez moins de viande.

    Je précise par ailleurs qu’il faut non seulement réduire la consommation de viande, mais également réduire la production d’aliments animaux en général (si la viande bovine en moins est intégralement compensé par les œufs ou par du poisson, alors ça n’aura éthiquement servi à rien).

  7. Tout le monde le sait, ON n’arrête pas le Progrès ! Et n’oublions pas de dire amen ! Et les cons-ommateurs en redemandent. Y’aca et Faucon ! Toujours plus ! Misère, misère !!
    Nous avions le simili-cuir, demain nous aurons le simili-carné. Finis les poissons carrés faits avec du vrai poisson et autres mystères… demain nous boufferons des trucs en forme de poisson, de côte de boeuf, de cuisse de poulet etc. mais dans lesquels il n’y aura pas un pet de viande animale !
    Et pour nous faire croire que tout ça est super bon, il suffira d’adapter la vieille pub de Canada-Dry (Ça a la couleur de l’alcool, le goût de l’alcool, mais ce n’est pas de l’alcool.) Comme ça Florence Burgat et tous les Bisounours seront contents. Misère, misère !!
    En tous cas moi je préfère l’authentique. Bien sûr comme avec l’alcool, le vrai, avec modération !

  8. Bonjour Invité 2018,
    Comme vous, je suis horrifié par la souffrance que fait subir au monde animal notre consommation de viande. Mais je suis en même temps effrayé par un développement de ces divers « similis » que vous évoquez, je crains que cela ne nous rendent dépendants d’une technologie toute puissante et nous éloigne de notre condition d’êtres intégrés dans le cycle de la nature, lequel suppose bien que certains animaux se nourrissent d’autres animaux.
    Un nombre moindre d’hommes sur la Terre permettrait de revenir à un élevage plus extensif donnant de meilleures conditions de vie aux animaux tout en préservant les espaces naturels.
    Une moindre consommation de viande (conséquence d’une demande plus faible, pour part, du fait de la diminution de notre nombre, pour part d’une alimentation moins carnée) permettrait mécaniquement aussi de réduire le nombre d’animaux concernés et l’ampleur de cette souffrance.

  9. Afin de lutter contre les horreurs que l’élevage industriel fait subir aux animaux, il est impératif que la production d’aliments d’origine animale baisse fortement.
    Il faut que massivement soit développés les similis-carnés, aussi bien les similis-viande que les similis-poisson, que les laits végétaux, que les similis-œufs, que les similis-miel, que les fromages végétaux…
    Et bien sûr, il ne faut pas que sur ce même développement, aux multinationales nous laissions carte blanche. Il faut que les similis soient également bios et éthiques en tout point.

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