quarante années de perdues, 1972-2012

1972, il y a quarante ans. Quarante années de perdues alors qu’on connaissait déjà à l’époque les dangers de type écologique qui menaçaient notre société dite moderne. Jugez-en par vous-même :

15 Juin 1972, je découpe un entrefilet dans un journal local (Sud-Ouest) à propos d’une conférence des Nations unies sur l’environnement qui se tient à Stockholm : certains pays veulent condamner la France. La veille en effet une campagne d’essais de la bombe H française était lancée sur un atoll polynésien. L’annonce de cette conférence avait laissé le président Pompidou de marbre ; la France se fout complètement des problèmes écologiques. Le prix des carburants flambera en octobre 1973 suite à la guerre du Kippour : le premier choc pétrolier.

15 juin 1972, un article sur le cri d’alarme de Sicco Mansholt, président de la commission du Marché commun : « La race humaine, menacée par la pollution, l’accroissement démographique et la consommation désordonnée de l’énergie, doit modifier son comportement, si elle veut tout simplement ne pas disparaître… La grande crise devrait culminer autour de l’an 2020. » Cette déclaration se base sur l’enquête effectuée par le Massachusetts Institut of Technologie (le rapport du club de Rome sur les limites de la croissance), publié en juillet 1971. La planète est déjà peuplée de 3,7 milliards de personnes. Que faut-il faire ? Mansholt répond : « Il faut réduire notre croissance purement matérielle, pour y substituer la notion d’une autre croissance, celle de la culture, du bonheur, du bien-être. C’est pourquoi j’ai proposé de substituer au PNB « l’Utilité nationale brute » ou, comme on le dit plus poétiquement en français, le Bonheur national brut. »

15 juin 1972, un autre article où s’exprime Philippe Saint Marc : « Nous sommes dans un train qui roule à 150 km/h vers un pont coupé. Le monde court à la catastrophe écologique s’il ne procède pas rapidement à une réorientation fondamentale de la croissance économique. »

La solution ? 15 juin 1972, article sur le mode de vie des Amish. Totalement autonomes, ils vivent en micro-autarcie : « Qui sont donc ces Amish auxquels la Cour suprême américaine vient de donner officiellement le droit, en plein âge nucléaire, de continuer à vivre en un temps révolu et de le perpétuer à travers leurs enfants ? Pas un moteur dans ces fermes. Pas un tracteur, pas une automobile. Ni radio, ni télévision, ni téléphone, ni réfrigérateur, ni aspirateur, ni d’ailleurs d’électricité, de gaz ou d’eau courante. Seule source d’énergie en vue, un occasionnel moulin à vent. » Samuel Beiler, un Amish : « Nous ne sommes pas contre l’instruction. Nous sommes contre celle qu’on donne dans vos écoles… Jamais de mémoire d’homme un Amish ne comparut devant un tribunal pour un délit autre que le refus d’envoyer ses enfants à l’école. » Pour la Cour suprême, l’Etat du Wisconsin n’a pas prouvé que l’éducation d’une high school était indispensable pour faire un bon citoyen. Les attendus : « Une façon de vivre qui nous paraît étrange mais qui n’interfère pas avec les droits ou intérêts d’autrui ne saurait être condamnée parce qu’elle est différente, et rien ne nous permet de présumer que la majorité actuelle a raisons de vivre comme elle vit et que les Amish ont tort de mener leur vie comme ils la mènent… » L’Amish était en 1972 un objecteur de croissance, il le reste aujourd’hui.

2012, nouvelle année, bonne année ? Tous nos spécialistes (économistes, politiciens, journalistes…) ne jurent encore que par la croissance. Rob Hopkins* est un des rares à proposer un autre modèle. Il avait visité en 1990 la vallée des Hunzas, dans le nord du Pakistan : « J’avais affaire à une société qui vivait à l’intérieur de ses limites et qui avait développé des moyens d’un raffinement effarant pour y parvenir. Tous les déchets étaient soigneusement compostés et retournaient à la terre. Les terrasses construites sur les flancs des montagnes étaient irriguées avec une précision stupéfiante. Il y avait des abricotiers partout, de même que des cerisiers, des pommiers et d’autres arbres fruitiers. Des pommes de terre, de l’orge, du blé et d’autres légumes poussaient sous ces arbres et autour. Les gens avaient l’air de toujours avoir le temps de s’arrêter et passer du temps avec les enfants qui couraient pieds nus à travers champs. Hunza est tout simplement l’endroit le plus beau, le plus tranquille, le plus heureux et béni d’abondance que j’aie jamais visité, auparavant et depuis lors. »

Il s’agissait d’un territoire de résilience, une aptitude à fonctionner indéfiniment à l’intérieur de ses limites, et de prospérer pour avoir su y parvenir. Pour faire face aux chocs écologiques qui nous attendent, Amish et Hunzas nous montrent déjà les caractéristiques principales d’une communauté de transition.

* Manuel de Transition (de la dépendance au pétrole à la résilience locale) de Rob Hopkins (édition écosociété, 2010)

7 réflexions sur “quarante années de perdues, 1972-2012”

  1. Joseph Aloys Schumpeter

    Je ne me veux pas du tout humoristique. Il n’y a que biosphère pour croire ça. Je suis très sérieux.

    Biosphère, lui, n’a aucun sens de l’humour, se prend très au sérieux et prétend contribuer au débat démocratique alors qu’il ne propose que des idées totalitaires.

  2. Joseph Aloys Schumpeter

    Peak.Oil.2008

    Tant mieux ! Si les cons cessent de se reproduire, on peut espérer leur disparition de la surface de la terre. Ce serait un grand soulagement pour l’humanité souffrante.

    remarque des modérateurs du blog biosphere:
    Votre IP vous dénonce. Ne postez plus de posts sous des pseudos différents. D’autant que vos remarques qui se veulent « humoristiques » n’apportent rien au débat démocratique.

  3. Les actions écologiques possibles?
    D’abord la décroissance de la population humaine serait la vraie solution, mais élever le niveau de vie, et la sécurité sanitaire du tiers monde c’est faire croître géométriquement la population de ces zones. Et ainsi alimenter l’invasion de nos Pays par les migrants venus du tiers monde. Ce qui n’est pas écologique, et conduit inévitablement à la guerre « civile ». Ou plutôt guerre de libération ,d’indépendance anticolonialiste. Car nous sommes colonisés c’est un fait par ces colons venus du tiers monde.
    Ensuite il faudrait stocker l’eau douce disponible et la répartir sur les terres cultivables. Les déserts peuvent être mis en culture (Sahara, Australie, Mongolie, etc…). Ces travaux coûtent moins cher que d’aller sur la lune. Pourquoi continuer à augmenter la population des zones froides ou soit disant tempérées de la planète? on devrait regrouper les humains dans les déserts chauds, car dans nos contrées chaque humain brûle l’équivalent de 4 tonnes de combustibles fossiles juste pour se chauffer. 75% de la superficie du globe est sur les océans, cette superficie est de fait peu productive, les océans sont même des déserts, pourquoi ne pas les fertiliser, y cultiver, construire des habitations et des usines. Le réchauffement produira sans doute une remontée des océans. Lutter d’avance contre cette remontée des eaux devrait être entrepris dés maintenant. Stocker de l’eau dans les déserts est possible, il suffit de faire des réservoirs, de créer des galeries tunnels pour relier les mers à ces zones et de pomper. On peut doubler les précipitations sur les zones émergées ainsi et utiliser les lagunes pour produire. Tout ceci ne peut être fait que par des opérateurs qui pensent au futur.

  4. Et voici le lien pour voir les 3 minutes
    http://www.megaupload.com/?d=TSGFOX1U

    Et pour revenir au fond de l’article, j’ai été frappé par des textes encore plus anciens qui évoquaient déjà les problèmes écologiques. Après plusieurs générations de politiciens le constat est effectivement plutôt désespérant.

    Mais il faut aussi considérer quelques améliorations et victoires, on parle maintenant d’écologie industrielle, de permaculture, de décroissance et même de développement durable. Dans ce dernier cas, l’idée est creuse mais la prise de conscience du problème fait quand-même son chemin dans la tête des gens.

    La grande question est de savoir si nous saurons changer de cap avant qu’il ne soit trop tard et que les dégâts ne soient irréversibles.

  5. J’ai 38 ans et comme la plupart des hommes je rêve d’avoir des enfants mais je me battrai jusqu’au bout pour ne pas en avoir tant que Matlhus restera un tabou (et ceci quitte à briser mon couple). Et j’aimerais demander à tous ceux qui ont mis des enfants au monde (de façon délibérée) de nous expliquer en quoi il considéraient ce monde assez accueillant pour leur progéniture et en quoi le fait de mettre un enfant au monde pouvait améliorer les choses. Je ne vois pas.

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