Quelles limites à la procréation médicalement assistée ?

Notre système démocratique montre que tout et son contraire est possible quand se dégage un consensus. Mais où sont les limites, la référence ultime ? Selon un groupe de travail, sous l’égide de  la sociologue Irène Théry, le droit doit prendre en compte « la grande métamorphose de la filiation, et plus généralement de la famille et de la parenté, dans les sociétés occidentales contemporaines »*. A savoir l’explosion de l’union libre et des naissances hors-mariage, la banalisation des séparations, l’émergence des familles recomposées, le développement de l’homoparentalité, le recours croissant à la PMA (Procréation médicalement assistée)… Les diverses façons de « faire famille » (procréation, adoption, engendrement avec tiers donneur) « devraient coexister à égale dignité » au sein d’un « droit commun de la filiation », estiment-ils. Le rapport préconise deux changements : l’ouverture de la procréation médicalement assistée aux couples de femmes. Le groupe ne se prononce par sur la gestation pour autrui, ou sur l’ouverture de la PMA aux femmes seules, qui l ‘ont divisé. D’autres points de vue s’expriment :

Le père du premier bébé éprouvette, Jacques Testard, se confie dans un mensuel** : « Les dérives actuelles de l’AMP (aide médicale à la procréation) pour raisons sociétales ont davantage à voir avec des  comportements individuels qu’avec des inventions scientifiques ; depuis toujours un complice pouvait se substituer au mari pour féconder… je suis consterné par les positions d’EELV sur l’AMP, comme si les écologistes d’appareil reniaient les fondements mêmes de l’écologie, avec les principes de frugalité, d’autonomie et de convivialité. Qu’en est-il de l’autonomie des personnes quand l’enfant est fabriqué par des spécialistes alors qu’une démarche responsable permettrait d’en assumer la technicité rudimentaire ? Car c’est bien de l’insémination artificielle (d’une lesbienne ou d’une mère porteuse) que dépend la satisfaction recherchée. Est-ce pour avoir l’air révolutionnaire de revendiquer l’esclavage des mères porteuses ou l’instrumentation de l’enfant privé de racines par un don de sperme ? Quels principes soutiennent l’indifférenciation des sexes, l’exigence d’engendrement sans limite d’âge ou le droit à l’enfant ? Une société basée sur des principes n’est pas la négation de la nature. Il nous faut plutôt construire une civilisation inscrite dans la nature, car nous sommes de la nature, et ses atteintes deviennent vite les nôtres. Contre l’autonomie de la technique, il faut opposer l’autolimitation de la puissance. Et cela passe logiquement par l’objection de croissance.« 

Pour compléter cette analyse, sur notre blog : Non à la fécondation in vitro et  Non à la procréation médicalement assistée !

* LE MONDE du 9 avril 2014, Famille, filiation, parentalité : ce rapport que l’exécutif a préféré cacher

** La Décroissance, avril 2014, Vers l’eugénisme ?