Deux livres récemment parus nous interpellent. La stratégie négaWatt* s’oppose au nucléariste Henri Safa**.
1/2) l’impossibilité de réduire notre consommation*
« L’homme est assoiffé d’énergie. Plus il en a, plus il invente de nouvelles applications et plus il en réclame davantage. On pourrait essayer d’infléchir cette tendance historique par la contrainte, mais la régulation énergétique s’est historiquement réalisée non par le rationnement imposé, mais par la capacité physique de l’accès à la quantité. Non seulement la contrainte serait mal vécue mais le besoin de l’homme étant insatiable, la pression ne tiendrait pas longtemps, à moins de sombrer dans un régime vraiment totalitaire. Au vu de la courbe de consommation énergétique dans le monde, il est fort probable que dans le futur, on ne consommera pas moins, mais plus d’énergie.
De toute manière, si dans le futur l’on souhaite accéder à d’autres espaces, aller voir ce qui se passe au-delà de notre planète et de notre système solaire, il nous faudra beaucoup d’énergie. Enormément d’énergie. L’Homme ne pourra pas être éternellement confiné à la Terre, il rêve d’aller plus haut, plus loin et plus vite. Les scénarios énergétique tablant sur des réduction drastiques de la consommation relèvent soit de l’utopie, soit de l’aveuglement pur et simple. »
2/2) les vertus d’une réduction de notre consommation**
« Réduire très fortement la consommation d’énergie ne veut pas dire retourner à la bougie ! Ceux qui usent d’une telle caricature sont souvent les mêmes qui agitent le spectre des atteintes à la liberté individuelle que représenteraient les mesures nécessaires à la transition énergétique. Les mots d’obligation et d’interdiction ne doivent pas effrayer. La quasi-totalité des conducteurs d’automobiles acceptent des règles contraignantes qui restreignent leur liberté, parce que leurs effets positifs sont jugés bien supérieurs à ceux que procurerait l’absence de règles. Qui serait d’accord pour que les chauffards irresponsables ne soient jamais sanctionnés ? Il en va de même avec l’énergie.
Nous sommes encore aveuglés par l’incroyable facilité avec laquelle nous y avons accès : appuyer sur l’interrupteur pour que la lumière jaillisse, ouvrir le robinet et l’eau chaude apparaît, remplir le réservoir de la voiture puis rouler. Mais nous savons que si nous continuons à faire tous ces gestes sans tenir aucun compte des conséquences que cela peut avoir, nous contribuons à accélérer et amplifier les menaces qui pèsent sur notre environnement et nos modes de vie. Nous devons accepter une limitation de notre consommation d’énergie, l’obligation de la mise aux normes, l’interdiction de certaines extravagances et inventer ensemble, démocratiquement, un « Code de bonne conduite énergétique ».
* Quelle transition énergétique ? d’Henri Safa (edp sciences 2013, 108 pages, 12 euros)
** Changeons d’énergie (transition mode d’emploi) de l’association négawatt (Actes Sud 2013, 94 pages, 10 euros)