La dénomination de ceux qui nous envoient se faire tuer à leur place est significative d’un état d’esprit gouvernemental. En France, c’était le « ministère de la Défense » de 1946 à 1958, le « ministère des Armées » de 1958 à 1969 (De Gaulle), le « ministère de la Défense » de 1969 à 1973, le « ministère des Armées » de 1973 à 1974 et le « ministère de la Défense » de 1974 à 2017. Donc 43 années sans changement. Le mot « défense nationale est beaucoup plus souple que le terme militarisé, cela laisse un peu de place à plusieurs modalités de défense.
Mais en 2017 le tout jeune président Macron fait preuve d’un traditionalisme guerrier en transformant à nouveau le ministère de la défense en « ministère des armées ». Exit toute référence possible à la défense civile dont d’ailleurs il n’a certainement jamais entendu parler. C’est là un non sens en démocratie car on ne suit de façon unilatérale que le seul précepte « si tu veux la paix, prépare la guerre » . Un « ministère de la défense » laissait au moins une (petite) place à la défense civile non-violente et au principe « si tu veux la paix, prépare la paix ». Autant dire que le ministre des armées aujourd’hui, Sébastien Lecornu, ne sait même pas qu’on peut faire autrement que s’entre-tuer.
Sébastien Lecornu a publié « Vers la guerre ? », normal, sa généalogie l’y préparait. Son père était technicien à la Snecma, qui fournit des équipements aux forces armées aériennes, navales, terrestres et spatiales. Sébastien accompagnait son grand-père maternel aux réunions d’anciens combattants. Et il a eu très tôt la passion politique. Plus jeune assistant parlementaire (en 2005, à 19 ans), plus jeune conseiller ministériel (cabinet de Bruno Le Maire en 2008), élu en 2015 plus jeune président du conseil départemental de l’Eure. Il est secrétaire d’État à l’écologie en 2017… pour surveiller Nicolas Hulot. Ministre des Armées depuis le 20 mai 2022, il est aujourd’hui à 38 ans le seul ministre rescapé du précédent gouvernement, toujours aux armées. Lecornu est donc un spécialiste de la politique politicienne, certainement pas de la défense nationale. Trop jeune pour avoir fait son service militaire, il a cependant un grade à la gendarmerie « de réserve ». Cet homme de couloirs, en dehors de la politique et des moulinets militarisés, il ne sait rien faire ! Et il ne sert à rien : nous en sommes encore en 2024 à une guerre des tranchées en Ukraine et à une éradication militarisée d’un peuple en Palestine. Il faut donc penser autrement, changer d’imaginaire, ici et ailleurs.
Le point de vue des écologistes pacifistes
Le pacifisme avait encore de nombreux partisans dans les années 1970 avec la contestation des guerres au Vietnam et en Algérie. Aujourd’hui on ne parle que de réarmement militaire, on oublie complètement les avantages d’une défense civile non-violente. Dans son discours le 8 mars 2024 à l’École Polytechnique, Sébastien Lecornu rejetait toute référence au cosmopolitisme, il en est resté à des références patriotiques alors que nous devrions avoir conscience d’appartenir à l’ensemble de l’humanité et non pas à notre seule terre d’origine. Il manque à Lecornu la référence à Sol Gareth Davis, dit Garry Davis. C’était un pilote américain durant la Seconde Guerre mondiale ; son avion abattu, il se retrouve en Allemagne sous les ruines. Bouleversé par les destructions qu’il rencontre, il rompt symboliquement en 1948 avec sa patrie en rendant formellement son passeport. Il interrompt une séance de l’Assemblée générale des Nations unies afin de demander la création d’un gouvernement mondial. Telle était la voie à suivre.
Il serait cependant dangereux de se laisser aller à un antimilitarisme sommaire : un peuple a le droit et le devoir de se défendre contre une agression extérieure. Autrement dit, la remise en question de la défense armée ne peut aller sans la recherche d’une autre forme de défense.
A la différence de la défense nationale armée, qui a pour seul but la défense du territoire national, la défense civile non violente est la prolongation particulière d’une attitude permanente à l’égard de l’injustice sociale et du pouvoir. Désobéir pour la paix trouve dans cette argumentation une solide base théorique. L’attitude non-violente dépasse en effet le problème de la guerre et de la paix. Il y a continuité entre la lutte intérieure pour une plus grande justice, et l’action contre un envahisseur ; ce sont les mêmes techniques qui sont utilisées dans les deux cas, dans le même esprit. La défense non-violente porte non pas simplement sur des frontières territoriales, mais sur des frontières morales et politiques ; il s’agit non seulement de défendre la vie de la population, mais aussi ses droits fondamentaux : droit à la liberté de parole et de réunion, droit de presse, de vote, de grève, mode de vie, respect des croyances. Une population habituée à ne pas tolérer les atteintes aux droits des personnes et à réagir immédiatement devient, pour un envahisseur ou un pouvoir dictatorial, un mur sur lequel sa violence se brise.
En savoir plus grâce à notre blog biosphere
Manifeste du pacifisme (Michel Sourrouille, 2010)
extraits : Désobéir pour la paix est à la fois un acte individuel et un acte collectif. La démarche de l’objecteur de conscience, refusant l’armée pour des motifs personnels, ne peut en réalité se concevoir que dans une vision de la société désirable et dans la volonté de faire partager un idéal. Car la recherche de la paix a le mérite de poser publiquement des questions fondamentales :
– Quel type de société mérite d’être défendu ?
– Contre qui ?
– Par quels moyens qui soient à la fois efficace et justes ?….
Pacifisme et / ou défense nationale, le dilemme
Nous n’avons aucune illusion sur la capacité d’une société en surnombre d’arriver à un niveau intelligence collective qui permette politiquement la bonne entente de citoyens éclairés. Mais avec ce blog biosphere nous essayons depuis bientôt 20 ans de donner médiatiquement les moyens de tendre vers cet objectif. Le pacifisme est l’une des 14 entrées de ce blog.
ON peut toujours critiquer l’Armée, surtout si ON est un tant soi peu antimilitariste…
ON peut bien sûr tirer à boulets rouges sur son chef suprême, notre grand va-t’en-guerre, dans tous les domaines… ON peut même dézinguer les J.O, le Tour de France, tous ces grands moments où, comme des cons, ON alimente et vénère la Compétition.
Mais ON peut aussi, peut-être, se demander ce que ces saloperies de jeux de guerre (wargames, FPS etc.), qui ont un succès fou… produisent comme dégâts sur les cerveaux de nos pauvres gamins, de 7 à 77 ans.
– La démo Delta Force Steam Next Fest atteint plus de 35 000 joueurs
( gamereactor.fr – aujourd’hui )
– Comparaison Gamescom 2024 : Delta Force est une oasis rafraîchissante dans ce vaste désert de jeux FPS (gamereactor.fr)
Une oasis rafraîchissante !!! Décidemment rien ne les étouffe. Misère misère !
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– Le jeu vidéo et la guerre en Ukraine (cf2r.org décembre 2023)
– En Russie, même les jeux vidéo deviennent “patriotiques”
(courrierinternational.com 14 octobre 2024)
– Burkina Faso: qu’est-ce qu’African Dawn, ce jeu vidéo russe antioccidental ?
(lefigaro.fr il y a 5 heures)
Pour que nos jeunes deviennent de bons patriotes, avec l’esprit de défense qui va bien, super calés en Histoire, parfaitement informés de ce qui se passe dans le monde… et cerise sur le cake contents d’aller à l’école… nos deux ministères accouplés (à 11:56) devraient leur offrir 4 heures de wargames par jour.
Pour moi le mariage du ministère de l’Éducation (et de la Jeunesse) avec celui des Armées est bien plus problématique que le nom qu’ON donne à ce dernier.
– « La jeunesse est une priorité du ministère des Armées. Elle est au coeur des objectifs qu’il s’est fixé en matière d’attractivité des métiers de la défense, de transmission d’une culture de défense, de développement de la citoyenneté et de contribution à la cohésion de la nation. […] L’esprit de défense est au cœur du parcours de citoyenneté auquel le ministère des Armées contribue à l’attention des jeunes Français. Tout au long de sa scolarité, un jeune aura ainsi l’opportunité de développer son esprit de défense, d’engagement et de citoyenneté à travers des dispositifs pédagogiques en partenariat avec l’Éducation nationale, le comité des Jeux olympiques et paralympiques Paris 2024 et la commission armées-jeunesse (CAJ). » (defense.gouv.fr)
Désormais l’École a pour mission de donner une bien meilleure éducation à nos jeunes. Qui en ont bien besoin, il faut quand même savoir le reconnaître.
En plus de leur apprendre à lire et à compter, bien parler et écrire aussi un peu, l’École se doit de leur apprendre « l’esprit de défense ».
Rien à voir avec le Petit cours d’autodéfense intellectuelle de Normand Baillargeon (2006).
Et en même temps elle se doit de mieux enfoncer le clou en matière de Compétition. Toujours plus haut, plus vite, plus fort. Et tous ensemble, ouai ouai ! Misère misère !
– La jeunesse au ministère des Armées : pourquoi ? (miroirsocial.com 25/08/2022)