Les politiques d’aménagement du territoire doivent se réorienter à cause des enjeux écologiques et énergétiques. Destinés au départ à faciliter l’accès des citoyens aux services publics, à l’emploi au logement et aux déplacements, ils doivent s’orienter vers l’aménagement durable des espaces urbains, agricoles et naturels sans occupation croissante de l’espace. C’est d’ailleurs ce que prévoit la loi d’orientation et d’aménagement du territoire de 1999, qui a intégré la qualité de la vie et la protection de l’environnement. Pourtant l’aménagement du territoire tel qu’il se poursuit aujourd’hui continue à favoriser l’artificialisation de l’espace au détriment des paysages et des écosystèmes. Ce n’est pas faute d’outils institutionnels (DIACT, ex-DATAR, plans d’urbanisme, lois sur la protection de la nature, loi littoral, loi montagne, loi paysage et même CIADT (Comité interministériel d’aménagement du territoire). A la profusion et à la complexité des lois, à leur affaiblissement par le parlement, à leur manque de suivi, voire à leur non-application par manque de contraintes, s’ajoutent un trop grand nombre de niveaux de décision et une dispersion excessives des responsabilités : commune, département, région, Etat, Union européenne. A l’évidence, il faut simplifier les procédures.
Une triple rupture doit s’accomplir, avec la course aux infrastructures de toutes sortes, avec la tendance à un étalement urbain continu, avec une agriculture de plus en plus industrialisée. Il faut décréter un moratoire sur les projets d’infrastructures et d’équipements, y compris dans les DOM-TOM. Décider par exemple que la desserte autoroutière et routière est désormais suffisante en France qui détient déjà l’un des réseaux parmi les plus denses du monde. les élus doivent comprendre que leur rôle n’est plus de lancer des projets de « développement » à base d’équipements lourds, mais de mettre en place une gestion du territoire compatible avec la nécessaire sobriété énergétique et la conservation des services rendus par les écosystèmes. Un inventaire du patrimoine naturel doit être fait pour servir de référence incontestée lors des plans locaux d’urbanisme (PLU) et des schémas de cohérence territoriale (SCOT).
Il faut aussi rompre avec la logique de périurbanisation. Combien pèsent les enjeux écologiques face aux projets d’intérêt général (PIG), qui répondent aux demandes de rocades, de voies ferrées à grande vitesse, le surfaces dédiées au commerce… La limitation drastique de l’expansion périphérique des villes devrait, désormais, figurer comme la priorité des priorités. Il s’agit en somme d’abandonner la traditionnelle politique de séparation des fonctions : zones résidentielles, zones économiques, zones commerciales, zones de loisirs. Il faut s’employer à la densification de petits pôles urbains. Une charte pour l’élaboration des documents d’urbanisme pourrait donner des consignes strictes en l’accompagnant d’un contrôle par l’Etat quant à la consommation d’espace périurbain.
Source : Le pacte écologique de Nicolas Hulot (avec le Comité de veille écologique)
Editions calmann-lévy 2006