Moi, Valérie Masson-Delmotte, 39 ans, chercheuse au laboratoire des sciences du climat de l’environnement (CNRS, CEA, Université de Versailles). Mon cursus ? Classe préparatoire scientifique, réussite au concours d’entrée de l’Ecole centrale de Paris en physique des fluides et transferts, ingénieur diplômée en 1993. Ma thèse de doctorat portait sur la « Simulation du climat de l’Holocène moyen à l’aide de modèles de circulation générale de l’atmosphère ; impacts des paramétrisations ». Ma spécialité est donc la paléoclimatologie. Le fait que l’on puisse quantifier, comprendre et modéliser la longue évolution passée du climat grâce à l’étude des glaces de l’Antarctique (qui permettent de remonter le temps de 800 000 ans) est essentiel pour la confiance que l’on peut accorder aux modèles de climat. A ce jour, j’observe que ces modèles représentent correctement les grands traits des changements passés, avec une tendance à sous-estimer à la fois l’amplitude et la vitesse de ces changements.
Je pensais avec d’autres qu’il fallait faire quelque chose contre les dénigrements systématiques et les manquements à l’éthique de Claude Allègre et Vincent Courtillot. J’ai donc été initiatrice d’un « appel des 600 », signé par des climatologues, pour l’organisation d’un véritable débat scientifique sur la question du climat. Moi non plus, je n’aime pas la vision fataliste de l’avenir qui est parfois associée au réchauffement. C’est ma formation d’ingénieur : la science et la technologie seront cruciales pour relever le défi. Mais faut-il mettre plutôt l’accent sur la réduction des gaz à effet de serre ou plutôt sur des mesures d’adaptation ? Cette question n’a quasiment pas été publiquement débattue. C’est peut-être ce qui a peut-être conduit à la campagne climato-sceptique que nous avons connue. Les débats scientifiques n’ont rien à voir avec ce que les médias choisissent de mettre en avant.
Je suis sélectionnée pour participer au prochain rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) . Mais je me reconnais aussi dans l’idée de la sobriété heureuse.
Source : LE MONDE du 10 août 2011, La pasionaria du climat