La simplicité du mode de vie a commencé il y a fort longtemps, Diogène avant Jésus Christ en est la figure titulaire. Ayant vu un jour une souris qui courait sans se soucier de trouver un gîte, sans crainte de l’obscurité, et sans aucun désir de tout ce qui rend la vie agréable, il la prit pour modèle. Ce « Socrate en délire », comme le surnommait Platon, marchait pieds nus en toute saison, dormait sous les portiques des temples et avait pour habituelle demeure un tonneau.
Aujourd’hui la simplification du mode de vie commence à se répandre, ce n’est plus une attitude réservée à une élite. Le mensuel La décroissance présente à chaque fois un témoignage d’expérience vécue dans la simplicité volontaire. Dans le dernier numéro, il s’agit de Laetitia et Alessandro qui cultivent leur potager. Alors qu’avant ils mangeaient de la viande à tous les repas, ils n’en achètent plus. Ils n’ont pas de voiture et mangent bio le plus souvent possible. Mais comme personne n’est parfait, ils vont souvent au cinéma. Ils se définissent comme des déserteurs du travail qui se contentent du RMI. Même Le Monde consacre parfois une rubrique à ces sentinelles de l’avenir. Toute une page le 17 décembre pour Joan Pick, dont l’objectif depuis 1973 est « zéro carbone » : pas de voiture bien sûr, mais aussi pas de réfrigérateur, pas de chauffage, pas de télévision, ni même de douche. Noix et germes de blé forment l’essentiel de son alimentation.
Joan avait rédigé en 1972 un rapport sur la planète, il n’a jamais été publié. Pourtant elle a raison. Bien que je n’aime pas les termes des industriels, la Terre est comme une entreprise dont nous sommes tous actionnaires et dont l’énergie est la principale devise. Laetitia et Alessandro ne se contentent pas de cultiver leur jardin, ils organisent conférences et rencontres et barbouillent aussi avec le collectif des déboulonneurs des affiches publicitaires. Récemment ils se sont même dénoncés à la police qui ne voulait pas les arrêter. Ils ont raison. Si tout le monde faisait comme eux, plus aucune publicité nulle part, et la Terre serait plus vivable. Il n’y aurait plus de RMI faute d’exclus : chacun cultiverait son jardin, dans la joie et la bonne humeur bien entendu.
J’aimerais tant une société conviviale nourrie de simplicité volontaire… Elle se prépare ici et là. Quand le volume des objecteurs de croissance sera assez grand, le mimétisme « je ne consomme pas parce que tu ne consommes pas parce que nous ne consommons plus » fera aboutir la dernière et plus pacifique des révolutions. Il est permis de rêver.