Bientôt la 21ème conférence sur la climat à Paris en décembre 2015. Il y a une conférence dite des parties (COP) chaque année, donc 21 années de négociations internationales pour rien. Déjà lors de 14ème conférence sur le climat, tout était déjà dit. Lire ci-dessous. On n’a rien fait depuis.
Hervé Kempf : C’est la première fois qu’une négociation internationale (en 2008) se fixe l’objectif de réduction d’un paramètre économique. Le protocole de Kyoto prévoit en effet pour les pays industrialisés une réduction de 5 % des émissions de gaz à effet de serre. Pour les Etats qui ont ratifié ce protocole, cela représente un engagement juridique fort car réduire les gaz à effet de serre implique de changer radicalement les activités de production et de consommation dans le sens d’une diminution. L’évolution des esprits a été très rapide depuis la conférence de Rio en 1992, qui a adopté la Convention sur le changement climatique d’où est issu le protocole de Kyoto. Une autre idée avance aussi vigoureusement : celle d’une logique de partage, selon laquelle les pays riches doivent diminuer davantage leurs émissions que les pays pauvres.
Paul Lannoye : L’indigence du protocole de Kyoto est inscrite dans la logique de marché et de libre-échange : en permettant aux pays riches industrialisés d’acheter des quotas de réduction d’émissions polluantes à d’autres nations, le mécanisme de développement « propre » a largement contribué à décrédibiliser la volonté réelle d’agir. Continuer à promouvoir la croissance et le libre-échange généralisé tout en prétendant œuvrer contre le réchauffement du climat relève de la mystification. Ces conférences internationales, en tentant de faire croire qu’on pourra être plus efficace dans une logique inchangée, se révèlent en fin de compte dangereuses et démobilisatrices. Pour présenter une quelconque utilité, la 14e conférence des Nations unies, à venir, se doit de déboucher sur une remise en cause des règles de l’OMC, préconiser une politique énergétique visant à l’autonomie et instaurer une politique agricole basée sur le principe de la souveraineté alimentaire.
Yves Cochet : Le protocole de Kyoto est important, mais dorénavant il n’est plus suffisant : comment s’adresser efficacement au milliard de personnes qui émettent des gaz à effet de serre ! Par ailleurs, concernant les décisions qui ont été prises à Bali, on ne peut qu’être déçu : il n’y a pas eu réellement d’autres décisions que de se revoir à Copenhague dans deux ans et de se dire qu’à partir de 2012, il faudra être vraiment sérieux. C’est une dentelle diplomatique qui n’est pas à la hauteur des enjeux. Nous avons tellement déréglé tous les cycles naturels du carbone, de l’eau, de l’azote, que la biosphère s’emballe et dépasse les humains. Je propose donc que l’on s’adresse aussi aux producteurs de carbone. Cela réduit considérablement la cible à convaincre : il y a assez peu de producteurs de pétrole. Limitons l’offre de pétrole puisqu’on ne peut maîtriser rapidement la demande.
(mensuel La Décroissance, mars 2008)