Cette autobiographie de Michel SOURROUILLE, « Fragments de vie, fragment de Terre (Mémoires d’un écolo) », est éditée chaque jour par épisode sur ce blog biosphere tout au cours des mois de juillet et août.
Il n’y aura pas de parti social-écologiste
Au moment des Européennes de 2009, une partie des membres du pôle écologique du PS, la plus consciente, est déjà partie rejoindre Europe-Ecologie. Il n’est que temps pour moi de faire ma transition partielle en 2011. Je reviens aux fondamentaux : l’écologie avant tout, avec la coopérative d’EELV , une invention de l’année ! Je m’aperçois que pour 10 ou 20 euros, je peux participer aux primaires de l’écologie tout en restant au PS. Le statut de coopérateur permet en effet de voter en juin 2011 pour le candidat écolo de son choix même si on appartient à un autre parti. C’est un des apports d’Europe-Ecologie aux Verts, le sens de l’ouverture initiée par Cohn-Bendit. Je me lance à fond dans un soutien à Nicolas Hulot par Internet interposé. Car Eva Joly n’est pas écolo, Stéphane Lhomme est seulement anti-nucléaire et surtout anti-Hulot, Henri Stoll est trop fondamentaliste pour percer médiatiquement. J’ai étudié la vie et l’œuvre de Nicolas Hulot, rien à redire : ses émissions en faveur de la nature, ses conseils avisés auprès du président Chirac, sa fondation, ses livres, son avertissement solennel et répété : nous voguons sur le Titanic, l’iceberg c’est pour bientôt. Mon ami José Bové est sur la même longueur d’onde : « C’est Nicolas Hulot qui porte le mieux le projet global de la transformation écologique. Aux yeux de la société, il possède cette légitimité qu’il a su bâtir à sa façon. »
Mais la vie politique étant ce qu’elle est, et les votants méritant les candidats qu’ils désignent, ce sera Eva Joly la présidentiable écolo. Comme je suis un habitué des combats perdus d’avance, je me trouve aussitôt un autre combat. Je pose ma candidature pour animer un atelier aux journées d’été d’EELV à Clermont Ferrand. A ma grande surprise, nouveau venu, simple coopérateur, je suis choisi comme co-animateur (avec Frédéric Benhaim) pour l’atelier « accueil et formation à EELV » le 19 août 2011. Il s’agissait de s’occuper de la formation à la base, et non de la formation des élus Verts déjà réalisée par le Cédis, le seul organisme qui fait des bénéfices !
J’ai été agréablement surpris par le sérieux des différents groupes de travail à Clermont. Cela me changeait du folklore des Verts dans les années 1990. Mais je me suis aperçu qu’en matière d’accueil et de formation institutionnalisée, rien n’avait changé depuis mon départ des Verts en 2002 : aucune organisation, sauf initiatives ponctuelles. Le secrétaire national à la formation, présent lors de cette séance, a conclu qu’il fallait faire quelque chose… dans six mois. Mais ma proposition d’instaurer une liste d’échange entre formateurs au niveau national a été reprise très vite par un habitué des listes (innombrables) de diffusion EELV. Depuis, peu à peu, le secteur s’organise. Lentement, trop lentement.
C’est vraiment dommageable que la formation soit restée au point mort, et significatif d’une dérive électoraliste. En effet, plus EELV se développe, plus la logique de l’organisation prime la logique des idées. Confondue avec le parti, l’organisation permanente de moyen devient une fin, à laquelle on peut finir par tout subordonner : principes, convictions personnelles, etc. Toutes les grandes organisations devant mener à bien des tâches complexes connaissent nécessairement ce processus de bureaucratisation : le parti devient un parti de cadres et non un mouvement de militants. Les dirigeants du parti risquent alors d’adopter un comportement de plus en plus autocratique. Pour briser cet enchaînement néfaste, la formation permanente dans un parti démocratique est donc une nécessité absolue : le contre-pouvoir par la formation à la base !
D’ailleurs la formation chez les écologistes est plus facile que dans les autres partis. La gauche comme la droite sont marquées au fer rouge du productivisme ; le mouvement écolo porte quant à lui le seul projet politique valable pour le XXIe siècle, le sens des limites de la planète ! C’est l’écologie scientifique qui nous démontre que nous avons dépassé les capacités de régénération de la Terre. C’est l’écologie politique qui doit déterminer les décisions qui en découlent. Mais l’imaginaire social ne change pas d’un coup de baguette magique. Pourtant il y a urgence écologique, ça chauffe !
Mon projet ? Construire un parti social-écologiste. Nous avions accepté que le pôle écologique du PS garde les transfuges vers EELV (dont je fais désormais partie) sur sa liste de correspondants. C’est une passerelle entre socialisme et écologisme. Il y en a d’autres. Par exemple le partage des circonscriptions entre EELV et PS. Qu’un parti social-écologiste devienne majoritaire en France et ailleurs n’est pas simplement souhaitable, c’est inéluctable. Car au fond, qu’est-ce que l’écologie ? C’est un discours commun (« logos ») qui transcende toutes les étiquettes partisanes. Il s’agit de considérer, avec les données de l’écologie scientifique et le débat démocratique, la meilleure façon de nous occuper de notre maison commune (« oikos ») la Terre.
Le voyage essentiel est le voyage de la pluralité à l’unité, mon voyage d’écologiste en politique est loin d’être terminé… Mais l’appartenance à un parti n’a jamais été pour moi l’alpha et l’oméga de mon engagement au service de notre biosphère. J’ai bien d’autres moyens de me faire entendre, par exemple au niveau d’Internet. (la suite, demain)
Une vision d’ensemble de cette autobiographie
Mémoires d’un écolo, Michel SOURROUILLE
01. Un préalable à l’action, se libérer de la religion
02. Une pensée en formation, avec des hauts et des bas
03. En faculté de sciences économiques et sociales, bof !
04. Premiers contacts avec l’écologie
05. Je deviens objecteur de conscience
06. Educateur, un rite de passage obligé
07. Insoumis… puis militaire !
08. Je deviens professeur de sciences économiques et sociales
09. Du féminisme à l’antispécisme
10. Avoir ou ne pas avoir des enfants
11. Le trou ludique dans mon emploi du temps, les échecs
12. Ma tentative d’écologiser la politique
13. L’écologie passe aussi par l’électronique
14. Mon engagement associatif au service de la nature
15. Mon engagement au service d’une communauté de résilience
16. Ma pratique de la simplicité volontaire
17. Objecteur de croissance, le militantisme des temps modernes
18. Techniques douces contre techniques dures
19. Je deviens journaliste pour la nature et l’écologie
21. Ma philosophie : l’écologie profonde