Au Québec la loi de 2015, élaborée après une large concertation citoyenne et transpartisane, a d’emblée placé l’aide à mourir dans un continuum de soins, c’est le « soin ultime ». La loi canadienne sur l’euthanasie a ensuite été votée en juin 2016, la Cour suprême du Canada enjoignant au gouvernement de se mettre en conformité avec la Charte canadienne des droits et libertés, reconnaissant à chaque individu la liberté de disposer de son propre corps.
Hélène Jouan : Le Canada marque une pause dans l’élargissement de sa loi sur « l’aide médicale à mourir ». Le 1er février 2024, le gouvernement a annoncé reporter à 2027 la disposition permettant aux personnes atteintes de maladie mentale de faire une demande d’euthanasie. Cette extension de la loi était initialement prévue, mais « le pays n’est pas prêt », a argué le ministre de la santé. Il serait difficile, disent certains, d’évaluer de telles demandes, de décider qu’une maladie mentale « ne pouvait pas être traitée » pour accéder à la requête du patient, ou de juger que celle-ci était « rationnelle ». D’abord réservée aux personnes atteintes de « maladie grave et irrémédiable, occasionnant des souffrances physiques ou psychologiques intolérables » et dont « la mort naturelle est raisonnablement prévisible », la législation avait déjà évolué en 2021 en assouplissant les critères d’admissibilité. Le pronostic vital du demandeur n’a plus besoin d’être engagé à court terme, par exemple dans le cas de maladies chroniques invalidantes, pour que la requête, systématiquement examinée par deux médecins, soit jugée recevable.
En 2022, 13 241 Canadiens ont bénéficié de l’aide à mourir, soit 4,1 % des décès du pays, juste derrière les Pays-Bas (5,1 %) mais devant la Belgique (2,5 %), deux pays ayant légiféré en la matière avant le Canada. Depuis le 7 juin 2023, les personnes atteintes d’une maladie neurodégénérative cognitive, du type Alzheimer, se sont vu accorder au Québec le droit de déposer une « demande anticipée ». Après avoir défini les conditions très strictes – perte d’autonomie totale, incapacité à reconnaître ses proches – auprès d’un médecin référent, elles pourront bénéficier du dispositif lorsqu’elles auront oublié jusqu’au souvenir même d’en avoir exprimé le souhait.
« Prendre soin du patient jusqu’au bout, jusqu’à écouter sa demande d’abréger ses souffrances, c’est comme cela que je conçois mon rôle de médecin », insiste Georges L’Espérance, président de l’Association québécoise pour le droit de mourir dans la dignité. Il met sur le compte du « paternalisme médical », selon lui encore très présent en France, les réticences exprimées par une partie des personnels de santé français envers le futur projet de loi sur « l’aide active à mourir »
Le point de vue des écologistes ADMD
Fin de vie, le lobbying religieux
extraits : Le 23 janvier 2024, les responsables des principales religions en France se sont donné rendez-vous pour prendre la parole tous ensemble sur la fin de vie. Ils avaient tous participé à un livre, « Religions et fin de vie »…
Fin de vie, la procrastination de Macron
extraits : Monsieur le Président de la République, il y a un an, à votre initiative, commençaient les travaux de la convention citoyenne sur la fin de vie (CCFV). En avril 2023, lors de la remise de notre rapport, vous avez pris l’engagement qu’un projet de loi, serait présenté en conseil des ministres avant la fin de l’été. À ce jour, 11 décembre 2023, ces engagements n’ont toujours pas été tenus…
Blocage palliatif sur la fin de vie
extraits : Dans un récent sondage les Français expriment leur rapport à l’aide active à mourir. 78% des Français attendent de la convention citoyenne sur la fin de vie qu’elle légalise l’aide active à mourir ; 82% des Français considèrent l’euthanasie et le suicide assisté comme des soins de fin de vie à part entière. Les spécialistes des soins palliatifs ne sont pas de cet avis…
Le fait de ne pas pouvoir se faire suicider légalement est un problème. On sent bien le tabou d’origine chrétienne qui subsiste.
Cependant , il faut que le cadre légal soit bien ficelé pour éviter tout abus..
Sinon la liberté de faire ce que l’on veut est quand même la base . Nous sommes trop embrigader par cette société qui nous a formaté depuis notre naissance. Et on voit bien que la tendance est à la contrainte de plus en plus forte et les écolos politiques sont les premiers à vouloir le bien de leurs congénères de force si possible.
Misère , laissez moi mourrir tranquille 😅
Se faire suicider… et en plus légalement ! Celle là fallait l’inventer, j’adooore !
Pas sûr que ça passe la censure… je verrais bien.
Si au Canada, le droit à mourir dans la dignité est entré dans les mœurs (titre Le MONDE)… à ce jour « le pays n’est pas prêt » pour aller plus loin. Juste une question de temps.
– « Au Canada, selon une étude menée par l’Université de Sherbrooke, 91% des aidants proches seraient d’accord pour étendre l’euthanasie aux personnes inaptes en phase terminale (moyennant des signes de détresse et une directive anticipée), et 72% des aidants proches y seraient favorables même sans directive anticipée. Une autre étude […] montre la détresse des proches aidants […] 57% disent ressentir « une forme de pression pour accélérer le départ de la personne aidée ». On saisit le poids et la fatigue des proches tentés de proposer et de suggérer l’euthanasie à leurs parents…
Comment ne pas craindre des euthanasies non voulues par le patient […] ? »
( Eugénisme euthanasique des personnes atteintes de démence – ieb-eib.org 18/10/2018 )
– « Mal nommer les choses, c’est ajouter au malheur du monde » écrivait Albert Camus.
Après les soins palliatifs… le « soin ultime ». Voilà donc l’ultime trouvaille pour nommer autrement la chose. C’est vrai que le mot « euthanasie » (qu’ON écrit parfois « euthanazie ») provoque un certain malaise. Parce qu’il touche à la mort, ce mot nous rappelle notre destin ultime. Mais il nous rappelle aussi le repère de l’interdit de tuer, et ce que certains en ont fait.
Il est donc tout à fait logique que ceux qui dépensent toute leur énergie pour obtenir sa légalisation fassent tout leur possible pour détourner notre attention.
Ce « soin ultime » me fait penser au « coup de grâce », qui fait suite à la « demande de grâce ». Et aussi à ce que disait le sinistre Goebbels au sujet du cercle et du carré. ( à suivre )
Donner la mort peut-il être considéré comme un soin ? Ce n’est pas parce que 82% des sondés répondent OUI… qu’un cercle doit désormais être vu comme comme un carré.
En se basant sur la définition officielle du « soin » dans le domaine médical, plusieurs organisations de ce milieu, ayant longuement réfléchi et débattu sur le sujet, répondent clairement NON.
– Donner la mort peut-il être considéré comme un soin ? ( sfap.org 16 février 2023 )
– « Donner la mort n’est pas un soin » : deux médecins expriment leurs réserves sur le projet de loi sur la fin de vie (francais.medscape.com – 23 août 2023)
– « D’abord réservée aux personnes atteintes de « maladie grave et irrémédiable, occasionnant des souffrances physiques ou psychologiques intolérables » et dont « la mort naturelle est raisonnablement prévisible », la législation avait déjà évolué en 2021 en assouplissant les critères d’admissibilité. [etc.] »
Ben oui, et tout le problème est là. Là encore toujours plus ! Même plus besoin de souffrir terriblement, d’être condamné à brève échéance, ni même d’être sérieusement diminué Il suffit par exemple de redouter de vieillir, de se trouver moche, et/ou inutile, d’avoir perdu le goût de vivre… et voilà qui suffit à justifier qu’ON mette fin à sa souffrance. Misère misère !
– « La mort n’est, en définitive, que le résultat d’un défaut d’éducation puisqu’elle est la conséquence d’un manque de savoir vivre » (Pierre Dac)