L’obsolescence programmée bientôt punie par la loi ?

« Les produits que nous utilisons dans la vie quotidienne sont trop souvent programmés par le producteur pour ne plus fonctionner après un certain nombre d’utilisations. Ces pratiques sont néfastes pour l’environnement et pèsent sur le pouvoir d’achat des ménages », soulignent les auteurs EELV d’un amendement dans le cadre du projet de loi sur la transition énergétique*. L’obsolescence programmée par les fabricants pourra être punie comme une tromperie « sur la durée de vie du produit intentionnellement raccourcie lors de sa conception » soit une peine de prison de deux ans au plus, ainsi qu’une amende de 300 000 euros. Ce ne sont là que broutilles pour les multinationales qui gèrent notre existence par produits interposés.

                Pour Serge Latouche*, il faudrait aussi combattre l’obsolescence technique et l’obsolescence symbolique : pourquoi remplacer son téléphone portable qui marche encore par la dernière génération, pourquoi la mode vestimentaire alors qu’un vêtement bien adapté est indémodable ? Pour maintenir la demande, il faut de toute nécessité que ces objets périssent. Tel est le fondement de l’obsolescence. La publicité crée le désir de consommer, le crédit en donne les moyens, l’obsolescence en renouvelle la nécessité. Il nous faut sortir de ce cercle vicieux qui entretient sans fin une croissance économique destructrice de ressources naturelles. Mais on peut résister à la publicité ou refuser de prendre un crédit, on est par contre désarmé face à la défaillance technique des produits. Impossible de réparer, c’est fait pour. En 1881, Edison lance les premières ampoules, dont la durée de vie est de 1500 heures. Dans les années 1920, la durée est passé à 2500 heures et plus. En décembre 1924, General Electric et d’autres firmes se réunissent : limitation de la durée de vie des ampoules à 1000 heures. Le fait que les lobbies n’obéissent qu’à la logique du profit rend immoral le comportement du producteur.

                Finalement, avec l’obsolescence, c’est l’éthique elle-même qui devient obsolète. Un consumérisme synonyme de braderie, de soldes, de rabais, de promotions… a fini par nous transmettre un esprit de dévaluation des valeurs ainsi que du sens de la vertu. Tout est à vendre, tout devient facultatif dans le supermarché des valeurs. Aujourd’hui la question de la moralité de l’obsolescence doit être posée. Cet amendement (dont il faudra suivre le devenir) n’est qu’une première étape de la lutte contre un système thermo-industriel devenu fou. Car bientôt nous n’aurons plus le choix. C’est la crise (financière) qui amène déjà les gens à utiliser les objets plus longuement qu’auparavant. Une longue tradition philosophique encourage une forme de limitation des besoins pour trouver le bonheur…

* Le Monde.fr avec AFP | 27.09.2014, L’obsolescence programmée bientôt punie par la loi ?

** Bon pour la casse (les déraisons de l’obsolescence programmée) de Serge Latouche