Il y a la tragédie de Sivens (mort de Rémi Fraisse) lors de la contestation d’un barrage (protection des zones humides et des forêts), la lutte parfois violente contre l’aéroport de Notre Dame des Landes (un grand projet inutile), le procès pour dégradation sur la ferme des Mille Vaches (industrialisation de l’agriculture). Il y a les réactions. Le président du Conseil général du Tarn, Thierry Carcenac (PS) a lancé après la mort de Rémi : « « Mourir pour des idées est relativement stupide et bête » ! L’ex-Premier ministre Ayrault soutenait à fond le projet NDDL. Le chef du gouvernement (Valls) s’était félicité du projet Sivens : « Je sais l’importance de mieux mobiliser la ressource en eau. C’est un élément décisif pour l’installation des jeunes agriculteurs. C’est pour cela que nous avons tenu bon à Sivens. Les travaux de ce barrage vont enfin commencer… » Le parti socialiste au pouvoir est dans la tourmente de nouveaux mouvements sociaux. Il n’est pas du tout préparé aux temps qui viennent, qui seront écologiques. La contestation a commencé dans les années 1970, principalement contre le nucléaire. Le champ des luttes s’est agrandi en même temps que la cécité de nos élus et la détérioration de notre planète.
Prenons un autre exemple, récent. La Cour des Comptes alerte citoyens et élus du gouffre financier que va représenter la LGV Poitiers-Limoges alors que son opportunité pour l’aménagement du territoire n’est pas démontrée. Après lecture de ce rapport sur la grande vitesse ferroviaire, la CRI (coordination des riverains impactés) déclare : Projet de LGV Poitiers – Limoges : abandonnera-t-on enfin, une fois pour toute ? Les tenants du projet, tous ces gens qui décident de dépenses somptuaires bien allongés dans leur fauteuil, réagissent :
– Jean-Paul Denanot, député européen (PS) : « la Cour des comptes n’a pas à juger du projet. »
– Marie-Françoise Pérol-Dumont, sénatrice (PS) : « les magistrats de la Cour des Comptes vivent dans le passé. »
– Alain Rodet, député PS, affiche son mépris pour ces magistrats qu’il traite de « vulgaires intellectuels ».
Le parti socialiste est à l’image de son chef de file, François Hollande, qui n’a jamais été écolo et qui ne fait rien pour le devenir. Rappelons les propos de son ancienne ministre Cécile Duflot dans son livre De l’intérieur (Voyage au pays de la désillusion) : « François Hollande n’a jamais été écologiste. L’écologie ne fait pas vraiment partie de son périmètre intellectuel. Les préoccupations des écosystèmes, de la biodiversité, du dérèglement climatique, lui sont étrangères. En productiviste classique, il est nourri par l’idée que seule la croissance vaut… Il est incapable de penser un modèle redistributif sans croissance… Quant à la loi de transition énergétique, elle stagne depuis des mois. François Hollande dit que c’est compliqué. Il dit toujours que « c’est compliqué »… François Hollande veut ménager tout le monde. Or, sur l’écologie, cela n’est pas possible. Sauf à ménager de fait toujours les mêmes lobbies, puissants, dont les intérêts sont précisément contraires à ceux de la défense de l’environnement… »
Rappelons aussi les propos de son ancienne ministre Delphine Batho dans son livre Insoumise : « C’est un échec politique partagé que l’écologie ne soit pas devenue une priorité déterminante de la gauche. C’est autour d’un nouveau projet de civilisation écologique qu’il est possible d’ouvrir un nouveau cycle économie et de justice sociale. C’est en faisant de l’écologie un pivot central de notre rapport au futur qu’il est possible d’embrasser toutes les dimensions du travail programmatique à engager. Je suis sûre que les Français ont soif d’avenirs, d’une vision à contre-courant de la dictature du court terme et de la gestion qui ne mène nulle part. Le moment est venu de construire un nouvel idéal autour des politiques de long terme. »
Sivens, le point de vue des ministres de l’écologie
Tout juste la ministre de l’écologie a-t-elle consenti en septembre au moment où l’affrontement avec les forces de l’ordre prenait un tour périlleux, à commander une expertise à deux ingénieurs des ponts. Ségolène Royal dispose depuis plusieurs jours de leur rapport. Il est accablant. Mais la ministre n’en a tiré aucune conclusion renvoyant la responsabilité des décisions au conseil général du Tarn. le barrage de Sivens, de l’avis des experts, est surdimensionné, sous-financé, mal adapté, ruineux pour la collectivité et l’environnement. « Un projet absurde pour une minorité », résume Delphine Batho. En 2012, la ministre de l’écologie du gouvernement Ayrault s’était montrée beaucoup moins timorée que Mme Royal en imposant un moratoire de tous les projets de retenue de substitution. Une mesure levée par ses successeurs (Philippe Martin, puis la reine Ségolène).