Désolé de vous le dire en ce jour du premier tour de la présidentielle 2017, aucun(e) candidat(e) ne vous a dit l’essentiel, la décroissance économique est devant nous. Encore aurait-il fallu pour que ce ne soit pas un effondrement que les présidentiables nous expliquent la situation réelle et les moyens d’y faire face.
Dominique Bourg : Un effondrement de civilisation résultant de notre immobilisme n’est pas impensable. Je le répète depuis l’an 2000, la consommation de ressources croit plus vite que le PIB ; les effets du changement climatique commencent à se faire sentir ; entre 1970 et 2010, environ la moité de la faune sauvage a disparu ; même le sable abrasif commence à manquer et il faut aller chercher les métaux parfois jusqu’à 800 mètres à un coût énergétique croissant. Ces dégradation ne donnent lieu qu’à des effets différés, ce qui nous conduit à détériorer davantage sans recevoir de signal fort à temps. Par « effondrement », on entend une chute des effectifs démographiques et de la complexité des sociétés sur une surface étendu et sur un temps long. Nous connaîtrons de plus en plus des États en faillites, des classes moyennes qui s’appauvrissent, un système de démocratie représentative qui ne fonctionne pas, un désordre géopolitique mondial, l’expression la plus stupide et violente d’une religion qui trouve des adeptes un peu partout, des dégradations systémiques de la Terre. Nous vivons désormais dans un monde qui suit une pente dangereuse.*
Corinne Lepage : Je n’ai rien à ajouter à ce constat si ce n’est la dimension morale de perte de vision de l’avenir, qui est un réalité du monde occidental. L’effondrement est déjà dans cette perte d’horizon. Aux limites des ressources de la planète, nos contemporains n’ont trouvé à y opposer qu’un sentiment de fatalité.*
Maurizio Pallante : Pour réduire la crise écologique, il ne suffit pas d’abandonner la foi dans la croissance, il faut promouvoir concrètement la décroissance. Les ressources que la biosphère régénère au cours d’une année sont consommées par l’humanité avant la moité du mois d’août, on dilapide le capital naturel. Si l’économie s’arrête de croître, ces ressources seraient toujours autant consommées, à un niveau déjà insupportable. Le dioxyde de carbone s’accumule dans l’atmosphère, faisant monter la température de la Terre. Pour réduire les concentrations, il faut que les émissions de gaz à effet de serre diminuent. En revanche il y a des biens qui ne font pas croître le PIB parce qu’ils ne sont pas achetés : les biens autoproduits ou échangés sous formes de dons réciproques dans le cadre des rapports communautaires. Et il y a des biens qu’on en peut pas acheter mais qui donnent du sens à la vie, les biens relationnels. Si la production et la consommation des marchandises qui n’ont aucune utilité réelle se réduit parce que l’auto-production augmente, si le temps de travail se réduit parce qu’on consacre plus de temps aux liens humains, le PIB diminue mais on ne se prive pas de ce qui est utile et plaisant. La décroissance du PIB est donc la route à emprunter au plus vite, mais non le but à atteindre.
* Le choix du pire de Corinne Lepage et Dominique Bourg (puf 2017)
** mensuel La Décroissance n° 138, avril 2017, p.14 et 15
Bonjour Didier, malheureusement, le volet de la régulation démographique implique un certains niveau d’éducation (et défaire le foutoire de ces injonctions à procréer dans le concient collectif à travers la religion et la publicité par exemple) et sanitaire pour toutes les populations qui exigeront à leur tour nombre de nuisances que nous déplorons tous ( =~ les moyens contraceptifs ne poussant pas dans les arbres, bon courage aussi pour éviter à coup sûr la bonne période). Et si la baisse de fertilité ne nous menaçait pas, ce serai sans issue. D’une manière générale, nous ne pouvons avoir le nucléaire sans sa bombe. Faîtes l’amour pas la guerre qu’on se disait… se serait au final ni l’un ni l’autre.
Dommage néanmoins que très peu de ceux qui sont conscients de la nécessité de la décroissance n’évoquent jamais son volet démographique.
A ma connaissance, Corinne Lepage n’en parle jamais (pardon d’avance si cela m’a échappé) et Dominique Bourg, s’il en est effectivement bien conscient et l’admet tout à fait, ne le met pas au premier plan de ses propos. Je ne parle même pas de Nicolas Hulot ou de Pierre Rabhi et bien sûr pas des dirigeants d’EELV pour lesquels il s’agit là d’une idée inconcevable.
Or, sans ce volet, le reste ne sert à rien car la majorité des habitants du monde est plutôt pauvre et nous ne pourrons lui imposer la décroissance (c’est impossible et ce serait immoral). Nous devons en Occident consommer moins certes, mais nous devons partout être moins nombreux.
Il faut le dire, même si cela nous retire toute chance d’obtenir notre diplôme de « bienpensance » et d’avoir une médaille d’écologiste distingué. C’est là le prix de la lucidité et de l’honnêteté.