Synthèse du cinquième rapport du GIEC : « Le temps est compté… Echec des politiques publiques mises en œuvre jusqu’à présent… De 2000 à 2010, les émissions de gaz à effet de serre ont augmenté de 2,2 % par an… Il faudra se préparer à un réchauffement compris entre 3,7°C et 4,8°C… » Le problème de cet article du MONDE*, c’est qu’on fait comme s’il s’agissait d’un problème des pouvoirs publics nationaux et internationaux. Il ne parle jamais de l’activité des citoyens qui sont bien les émetteurs de gaz par leur mode de consommation. Boire du café, c’est émettre pas mal de CO2 à cause de la chaîne de production et de distribution. Ensuite cet article parle des solutions techniques, pas des solutions comportementales. On envisage l’efficacité énergétique, c’est-à-dire la technique qui sauve (mais qui utilise de toute façon de l’énergie). On évoque les énergies renouvelables (qui jamais ne nous donneront la profusion énergétique des ressources fossiles). Ne parlons pas de la séquestration et du stockage du carbone dont « les risques sont mal maîtrisés ». Nulle part la journaliste Laurence Caramel n’indique que la première des solutions, c’est l’énergie que l’on ne consomme pas, la sobriété énergétique, la reconsidération de nos besoins.
LE MONDE et ses journalistes devraient lire le scénario suivant : « L’association négaWatt a été crée en septembre 2001. Le premier scénario négaWatt fut lancé en 2003 comme un défi adressé au Premier ministre Raffarin qui s’était engagé à diviser par 4, d’ici à 2050, les émissions de gaz à effet de serre de la France. La démarche négaWatt se décline en trois temps : sobriété, efficacité, renouvelables. La notion de sobriété nous invite à nous interroger personnellement sur nos besoins, sur leur importance réelle ou supposée, ainsi que sur les priorités que nous pouvons établir entre eux. Nous pouvons définir une hiérarchie qui passe des besoins vitaux aux essentiels, puis indispensables, utiles, convenables, accessoires, futiles, extravagants et inacceptables. Chacun peut se livrer à l’exercice pour lui-même, en famille ou au travail, de façon à prendre conscience de l’impact de tel ou tel achat ou comportement. Rien ne sera possible sans une adhésion pleine et entière de tous nos concitoyens. Il s’agit de faire jouer à plein ce qui est la contre-partie indissociable de notre liberté : notre responsabilité ! Prenons l’exemple de nos besoins de mobilité individuelle. Le principe de sobriété nous incite à les réduire en essayant de nous rapprocher de notre lieu de travail. Nous pouvons aussi recourir à un mode doux de déplacement, marche, vélo, rollers, trottinette… La sobriété dimensionnelle nous incite à éviter toute surpuissance inutile dans le choix d’un véhicule. La sobriété coopérative repose sur la mise en commun pour réduire les besoins : mutualisation des équipements, autopartage, co-voiturage, auto-stop. La sobriété d’usage consiste à limiter le niveau et la durée d’utilisation d’un appareil, conduite douce par exemple… La sobriété ne s’applique pas qu’à nos comportements individuels, elle doit guider nos choix collectifs, notamment l’aménagement de l’espace. »**
Ce scénario a été récemment édité en abrégé, plus facile à lire pour des journalistes : « Nous sommes encore aveuglés par l’incroyable facilité avec laquelle nous avons accès à la modernité : appuyer sur l’interrupteur pour que la lumière jaillisse, ouvrir le robinet et l’eau chaude apparaît, remplir le réservoir de la voiture puis rouler. Mais nous savons que si nous continuons à faire tous ces gestes sans tenir aucun compte des conséquences que cela peut avoir, nous contribuons à accélérer et amplifier les menaces qui pèsent sur notre environnement et nos modes de vie. Les mots d’obligation et d’interdiction ne doivent pas effrayer. La quasi-totalité des conducteurs d’automobiles acceptent des règles contraignantes qui restreignent leur liberté, parce que leurs effets positifs sont jugés bien supérieurs à ceux que procurerait l’absence de règles. Qui serait d’accord pour que les chauffards irresponsables ne soient jamais sanctionnés ? Il en va de même avec l’énergie. Nous devons accepter une limitation de notre consommation d’énergie, l’obligation de la mise aux normes, l’interdiction de certaines extravagances et inventer ensemble, démocratiquement, un Code de bonne conduite énergétique. »***
*LE MONDE du 15 avril 2014, Réchauffement climatique : les Etats doivent agir vite et radicalement
** Manifeste négaWatt (réussir la transition énergétique) par association négaWatt (édition Actes Sud, 2012)
*** Changeons d’énergie (transition mode d’emploi) de l’association négawatt (Actes Sud 2013, 94 pages, 10 euros)