Al Gore croit que l’arche de Noé est une bonne preuve de la défense de la biodiversité puisque deux représentants de toutes les espèces vivantes montent dans un bateau ! Mais dans son livre Urgence planète Terre, Al Gore se présente aussi comme un chrétien tendance baptiste qui considère avec désolation l’action de son Eglise. Il cite un pasteur presbytérien dans les Appalaches: « J’ai vite appris, depuis que j’ai commencé à me battre contre la pratique qui consiste à raser les montagnes pour en extraire le charbon, que la seule défense vis-à-vis des bulldozers des grands conglomérats charbonniers se trouvait dans les communautés pauvres et isolées qui résident dans ces zones perdues et qui leur sont tellement attachées qu’elles combattraient pour cette terre-là. »
Al Gore reconnaît même que les critiques des écologistes contre les religions ont gagné du crédit, principalement à cause du silence que la plupart des Eglises observent devant l’évidence croissante d’un holocauste écologique. Autre chose l’inquiète, une préoccupation de l’Evangile social qui deviendrait prépondérante, avec priorité aux besoins des pauvres, des oubliés, des malades, des démunis… L’environnement semble alors un problème bien éloigné des réalités de l’injustice sociale. Leurs impératifs moraux conduisent alors bien des avocats de l’Evangile social à s’opposer vigoureusement à l’apparition de préoccupations concurrentes susceptibles de les détourner de leur mission. Pourtant on sait que ce sont les pauvres qui sont les premiers touchés par un problème écologique.
Finalement Al Gore en est réduit à faire les louanges du mouvement Baha’i, fondé en 1863 par Mirza Husayn Ali : « Nous ne pouvons séparer le cœur humain de l’environnement qui nous est extérieur, et dire que tout ira bien dès que l’un deux sera réformé. L’homme est consubstantiel au monde. Sa vie intérieure modèle l’environnement, qui le modèle à son tour. L’un et l’autre interagissent, et tout du changement durable dans la vie de l’homme résulte de ces réactions mutuelles. » Les bahaïstes croient en un Dieu unique, créateur du monde, et suivent sur ces points les religions abrahamiques. Au risque de décevoir Al Gore, ils partagent également la même conception d’une humanité placée par Dieu au sommet de la création. Encore et toujours de l’anthropocentrisme !
Le présupposé philosophique qui veut que le genre humain soit séparé de la nature, une vision du monde tôt intégrée à la tradition chrétienne et développée par la civilisation thermo-industrielle, est néfaste à l’équilibre de la planète, et donc néfaste aux sociétés humaines. Vive l’écologie profonde !
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