Les bibliothèques l’étouffaient, alors il est parti sur la piste des ours et des loups. Et c’est sur les sentes animale que Baptiste Morizot a repensé notre rapport au vivant. Quelques extraits de sa pensée :
« Alors que l’animal sauvage n’appartient à personne, en devenant domestique il devient un bien, propriété des humains. Cette transformation sonne la fin des liens de réciprocité entre les humains et le vivant autour d’eux.
Les colons, qui revendiquaient un rapport de production à l’égard de la nature, ont justifié la destruction des Indiens par cet argument simple : ces derniers, en tant que sauvages, partageaient avec les loups un rapport « prédateur » à la nature. Ils étaient incapables de faire fructifier le territoire et d’accomplir le prétendu destin de la nature, qui est d’être exploitée. Toute terre qui n’est pas productive est considérée comme une terre sauvage, peuplée par des sauvages.
Le sauvage, animal ou homme, c’est celui qui ne veut pas travailler, celui qui refuse d’être productif. Mais est-ce si déraisonnable ? Le sauvage est la part la plus pure, la plus originelle, la plus libre du vivant. Le mot sauvage est hérité d’une mythologie inventée par les Occidentaux pour légitimer leur emprise sur le vivant.
Finalement, si on sanctuarise assez d’espaces, on gagne le droit d’exploiter sans frein tout le reste.
Selon l’agroécologie ou la permaculture, il n’y a spa de durabilité plus grande que lorsqu’on s’inspire des écosystèmes, et donc du sauvage, lorsqu’on écoute leurs rythmes et qu’on fait une place à la biodiversité. Dès lors nous dialoguons avec ce vivant « par lui-même ». Bref, c’est de la diplomatie, non ?
Le chemin de randonnée relaie des points de vue, le long d’un chemin balisé, sans que vous ayez à vous orienter par vous-même. Il est construit sur le modèle du déplacement dans un musée, de tableau en tableau, selon des parcours fléchés. »
Un numéro sauvage, Télérama du 5 au 18 août 2017