A la différence de la santé, de l’alimentation ou de l’éducation, l’eau n’a pas d’agence ni de fonds attitrés au sein des Nations unies. Or le risque d’une crise mondiale de l’eau douce est « imminent », prévient l’Organisation des nations unies (ONU), en introduction à la conférence exceptionnelle qu’elle lui consacre, à New York, du 22 au 24 mars.
Il n’y sera pas seulement question d’aide humanitaire et de développement durable, mais aussi de droits humains et de santé, de sciences, de coopération, d’agriculture, d’énergie, de biodiversité, de climat, de paix… mais pas de démographie !
Martine Valo : « L’agenda onusien ne prévoit pas de négociation sur un quelconque accord politique, puisque tel était le prix à consentir pour que l’ensemble des États acceptent l’organisation de cette conférence. Pourtant l’assemblée générale de l’ONU reconnaît l’accès à l’eau et à l’assainissement comme un droit humain fondamental depuis 2010. En principe, chacun devrait pouvoir s’approvisionner à une source située à moins de 1 kilomètre et de trente minutes de chez lui. Environ un quart de la population mondiale (2 milliards de personnes) n’a pas accès à l’eau potable selon ces critères. Déjà 10 % de la population vit dans un pays où le « stress hydrique », la demande excède les ressources disponibles.3,6 milliards de personnes (près de la moitié des habitants de la planète) ne disposent pas de toilettes, de latrines ou d’un autre système d’assainissement géré de manière sûre, ni chez elles ni alentour. La disponibilité de l’eau dépend aussi de sa qualité. Or elle se dégrade partout. Au moins 2 milliards d’êtres humains utilisent de l’eau contaminée, ce qui les expose au choléra, à la dysenterie, à la typhoïde, à la poliomyélite… Les pénuries en eau vont s’aggraver au cours des décennies à venir – en particulier dans les villes. Partout sur le globe, l’extraction intensive pour l’irrigation ou l’approvisionnement des grandes villes se chiffre en centaines de kilomètres cubes et conduit à épuiser rapidement une bonne part des nappes souterraines.
Avec la croissance démographique et les changements des modes de consommation, la demande globale en eau a grimpé de 1 % par an dans les quatre dernières décennies. Rapportés au nombre d’habitants, les volumes disponibles ont diminué dans le monde entier de 20 % en moyenne entre 2000 et 2018. »
Le point de vue des écologistes malthusiens
Grandlai : En résumé, trop d’humains pour la planète.
Michel SOURROUILLE : La demande globale en eau a grimpé de 1 % par an dans les quatre dernières décennies, la population a augmenté encore plus vite, en conséquence les volumes disponibles rapportés au nombre d’habitants ont diminué. C’est une logique imparable et pourtant la question démographique est complètement ignorée des instances internationales ces dernières décennies contrairement aux années 1970. Tant qu’un gouvernement mondial, on peut toujours rêver, ne décrétera pas qu’il faut suivre le modèle d’un seul enfant par femme, on ne s’en sortira pas durablement, que ce soit pour les problèmes de l’eau, de la biodiversité, des ressources halieutiques, etc. Mais quand on voit le tabou qui pose sur la réponse malthusienne aux crises, il y a loin de la coupe aux lèvres. Mesdames Messieurs les journalistes du MONDE, il n’y a pas que la surpopulation carcérale qui pose problème…
on lâche rien : c’est beau la langue des technocrates pour ne pas provoquer de panique planétaire. Parce que derrière le mot « tension », il faut comprendre « conflit potentiel entre groupes humains et nations pour l’accès à l’eau, migrations forcées depuis les régions devenues invivables, achat des réserves d’eau par de grands groupes marchands et spéculatifs, hausse du coût de l’eau qui est considérée par les ultra-libéraux comme un produit marchand comme un autre, révoltes, guerres, famines, paupérisation d’une grande partie de la population mondiale ect… ». Jusqu’ici tout va bien…
Lire aussi, Guerres de l’eau en perspective
– « La demande globale en eau a grimpé de 1 % par an dans les quatre dernières décennies, la population a augmenté encore plus vite, en conséquence les volumes disponibles rapportés au nombre d’habitants ont diminué. C’est une logique imparable et pourtant [etc.] » (Michel SOURROUILLE )
Comme le syllogisme, le paralogisme est d’une logique imparable. Et le sophisme encore plus. Jusqu’au jour où l’impossible se réalise, que l’insubmersible coule et que l’indestructible et l’imparable se fassent démolir. Pour ça il faut commencer par deviner l’intention de celui qui cherche à vous vendre quelque chose. En ne perdant pas de vue que les marchands de salades peuvent être très malins. Ceux là peuvent vous vendre un pissenlit pour une frisée. En jonglant avec les chiffres ils peuvent leur faire dire ce qu’il leur plait de dire. (à suivre)
Un exemple. Rassemblez 99 personnes dans une salle, calculez leur revenu moyen. Faites ensuite entrer Bill Gates. Vous admettrez alors que le pékin moyen dans cette salle est multimillionnaire.
Un autre. La demande globale en eau a grimpé de 1 % par an dans les quatre dernières décennies, le nombre de piscines a augmenté encore plus vite. (en France il a doublé en 10 ans). En conséquence vous pouvez déduire que le TBE (Taux Global d’Embourgeoisement) est de tant. C’est imparable ! Et pourtant le TBE est complètement ignoré.
Que nous disent ces fameux «volumes disponibles rapportés au nombre d’habitants» ? Qu’ils ont diminué de tant. OK. C’est très bien s’ils diminuent, c’est bien la décroissance non ? En tous cas chez certains, je précise !
Parce que passer de 2000 (ou 20.000) à 1000 (ou 10.000) litres d’eau par jour et par personne… ce n’est du tout comme passer de 20 à 10 litres.
La question de l’eau apparaît comme l’enjeu majeur pour le parc nucléaire, qui en dépend pour refroidir la partie électrique des centrales. A l’avenir, le débit moyen des fleuves devrait diminuer – de 10 % à 40 % pour une majorité de bassins versants.En conséquence, selon RTE, le risque d’indisponibilité pourrait augmenter « d’un facteur deux à trois » pour les unités en bord de fleuves. EDF, qui devrait publier d’ici à début 2024 ses propres études sur le sujet, évoque un facteur allant de deux à quatre. La Cour des comptes pointe que ces pertes peuvent « s’avérer critiques en accroissant les risques de tension sur le réseau ».
Outre les prélèvements, la question de l’eau porte aussi sur les rejets liquides ou thermiques : plus le débit du cours d’eau est faible, moins ces rejets peuvent être dilués.
L’eau, c’est une affaire sérieuse. Elle est nécessaire partout, tout le temps, pour tout le monde et, lorsqu’elle vient à manquer, il n’existe aucun miracle technologique capable de remplacer une bonne vieille pluie. L’eau est au cœur de deux crises, l’une climatique, l’autre chimique. Avec, comme principal opérateur synergique entre les deux, notre modèle d’agriculture productiviste, qui aggrave le réchauffement tout en puisant de manière excessive dans les ressources hydriques. Selon les chiffres du ministère de la transition écologique, l’agriculture tricolore engloutit près de la moitié de l’eau consommée chaque année en France – et près de 80 % au cours des trois mois d’été. La plus grande part de cette eau est utilisée par une petite fraction d’exploitants, pour produire des céréales qui seront exportées sur les marchés internationaux, principalement pour nourrir des animaux élevés dans des bâtiments.