débat Commoner/Ehrlich, le débat démographique

Les premiers écologistes essayèrent d’attirer l’attention sur un éventail de problèmes allant des pesticides au contrôle démographique sans toujours les définir par ordre d’importance. Un des signes avant-coureurs d’une hiérarchie apparut lorsque Paul Ehrlich et Barry Commoner débattirent de l’importance relative de la maîtrise de la fécondité. Ehrlich avait publié en 1968 The Population Bomb, qui plaçait l’expansion de la population comme la menace écologique prioritaire : « Trop de voitures, trop d’usines, trop de pesticides. Pas assez d’eau, trop de dioxyde de carbone, tout peut être attribué à une cause unique : trop de personnes sur Terre. » Commoner lui répondit  en 1971 dans L’encerclement que « la dégradation écologique n’est pas la simple conséquence d’un processus unique qui va en s’amplifiant – croissance démographique, augmentation de la demande – mais également des changements importants dans les techniques de production, changements qui eux-mêmes dépendent de facteurs économiques et politiques importants. »

Le débat entre Commoner et Ehrlich a rapidement dépassé le désaccord scientifique pour fonder deux stratégies radicalement différentes. Le mouvement écologiste fondamentaliste préconise le contrôle de la croissance globale parce qu’il ne peut se concevoir de changement dans l’ordre industriel qui la rendrait écologiquement compatible. Ehrlich définit ainsi « la surpopulation » comme le nombre d’habitants dépassant « la capacité d’accueil » de la Terre. Commoner s’appuie au contraire sur une philosophie non déterministe de la technologie qui admet la possibilité d’une transformation technique radicale. Commoner propose de transformer la technologie moderne « pour satisfaire aux exigences indéniables de l’écosystème » Il constate aussi que le taux européen de croissance démographique diminuait à mesure que la prospérité augmentait. Puisque les facteurs socio-économiques influencent le comportement reproducteur, nous devrions créer les conditions où ces facteurs favorisent une croissance démographique plus lente dans les pays pauvres.

Une synthèse est-elle impossible ? Ehrlich a essayé de la formuler dans son livre de 1971, How To Be a Survivor. Il y élargit ses perspectives pour inclure non seulement le contrôle démographique, mais une réforme générale égalitariste, une technologie douce, et la réduction par le « dé-développement » du niveau de vie excessivement élevé des pays « sur-développés ». Cela nous semble évident. Pourtant certains objecteurs de croissance s’obstinent encore à affirmer que nous n’avons pas trop de personnes, mais trop d’automobiles !

Source : http://www.sfu.ca/~andrewf/books/FINAL_EcologieSocialisme.pdf