Nous avons connu nos premiers WC séparant l’urine et les selles dans un village de yourte près de Totnes. La construction était entièrement artisanale, la cabane était en pleine nature, les conteneurs pour tout transformer en engrais à côté. Pas besoin d’une « Journée mondiale des toilettes » pour faire accéder l’ensemble de la planète à ces toilettes d’avant-garde. Pas besoin d’un plan « L’Inde Propre » pour financer la construction de 130 millions de lieux d’aisance. C’était un gros progrès par rapport à l’installation chez mes grands-parents, dans une cabane au fond du jardin, les fesses assises sur un trou au milieu des planches, directement soulagés sur une fosse où grouillaient les vers blancs. Pour la vider, on portait nos seaux directement sur le compost. Un autre temps, pas si lointain.
Aujourd’hui les normes occidentales d’hygiène et de confort veulent s’imposer en Inde et ailleurs. La défécation doit être modernisée. Pour le blog de Socioprolix*, la satisfaction des besoins naturels devrait dans l’avenir s’opérer dans un cabinet d’aisance à la pointe du progrès : WC lavant et séchant, jet d’eau tiède qui nettoie et sèche les fesses, modèle dit « japonais » qui se développe aux Etats-Unis alors que l’Europe « est à la traîne ». Pour les politistes de ce blog qui n’ont aucune connaissances des limites de la planète et de la gestion des déchets, « nos toilettes classiques nous feront le même effet d’incongruité et d’inconfort que les toilettes « à la turque » sur lesquelles on tombe encore parfois, au fond de certains bistrots. Hygiène et confort atteindront un degré maximal… »
Dans le monde de demain, le principal souci ne sera pas le confort du lieu où on défèque, nous serons plutôt préoccupés par le nécessaire recyclage de notre urine et de nos merdes.
* Socioprolix,
A vous lire, on croirait qu’il faudrait nécessairement choisir entre des chiottes confortables et de la merde correctement recyclée.
En vérité, on peut très bien cumuler les 2 avantages. Pour cela, il suffit de renverser la dictature exercée par les patrons des grands groupes sur l’économie, afin que la production soit gérée démocratiquement par l’ensemble de la population.
Elevés dans les « normes occidentales d’hygiène et de confort », le concept des toilettes sèches nous écoeure a priori. Mais quand on les a pratiquées ( en tout cas c’est comme ça que j’ai évolué), on finit par être écoeuré par l’utilisation des toilettes standard, où le maniement de la balayette nous oblige littéralement à remuer la merde!
notre article du 6 novembre 2008, toilette sèches !
Un groupe de réflexion canadien recommande l’accès à des sanitaires fonctionnels. Il est vrai que sur notre planète, 200 millions de tonnes d’excréments humains finissent dans des rivières chaque année (LeMonde du 29 octobre 2008). Mon quotidien préféré rappelle que le développement des toilettes était l’un des objectifs du millénaire, défini en l’an 2000 par les Nations unies : diminuer par deux le nombre de personnes n’ayant pas accès à des sanitaires d’ici à 2015.
Alors que dans les pays riches une frange d’expérimentateurs éclairés se lance dans la construction de toilettes sèches, il est vraiment bizarre que les pays pauvres n’utilisent pas les excréments humains qui peuvent faire un bon engrais. Il est bizarre qu’un article sur nos latrines insiste plutôt sur les maladies diarrhéiques, la contamination des eaux de surface, les bactéries, virus et autres parasites, sans aborder l’intérêt du nécessaire recyclage de toute matière par les décomposeurs. Nous n’avons pas à frémir ni fantasmer sur nos matières fécales : rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme…
http://biosphere.blog.lemonde.fr/2008/11/06/toilettes-seches/