Europe Ecologie – Les Verts à l’épreuve du pouvoir

EELV se situait dans un tournant historique. Après un arrimage de plus de vingt ans au parti socialiste pouvait débuter le temps de l’autonomie. Il semble en ce moment que nous quittons cette voie. Yannick Jadot, élu par la primaire des écolos, va se coucher devant Benoît Hamon, sortant de la primaire des gauches, à la demande de Cécile Duflot ! Voici d’abord un peu d’histoire pour mieux percevoir notre présent.

En 1994, lors de l’assemblée générale de Lille, les Verts menés par Dominique Voynet décident de négocier des alliances électorales de premier tour, à gauche exclusivement. C’est la fin de la théorie du « ni, ni » d’Antoine Waechter, qui estimait que les Verts pouvaient s’allier avec l’un ou l’autre camp selon les offres faites. Lors de la désignation de la candidature écolo à la présidentielle 1995, Dominique l’emporte. L’alliance écologistes/PS lors de la présidentielle 1997 n’est pas la conséquence d’un choix délibéré, mais de circonstances exceptionnelles. A la surprise de tous Jacques Chirac venait de dissoudre l’Assemblée nationale. L’idée d’une alliance rouge-rose-vert est évoquée. Dans l’urgence, elle est conclue en quelques jours. Avec la gauche plurielle, la cote de popularité des Verts dans l’opinion progresse, ils deviennent le parti quasi-unique de l’écologie. Après une embellie passagère pour les européennes de 2009 avec Europe Ecologie, 16.3 %, devant le PS à 16 %, l’image des Verts, devenus EELV fin 2010, se ternit. L’étiquette écolo « de gauche » va devenir un boulet. Avec l’élection de François Hollande à la présidence en 2012, les écologistes n’obtiennent que des strapontins. Le ministère de l’écologie va être confié à des militants du PS, il n’y a plus sous-traitance de la question environnementale en la confiant aux verts. Le PS va ensuite s’ingénier à faire éclater les groupes parlementaires qu’avaient obtenus EELV, aidés en cela par la tactique aventureuse de Cécile Duflot qui se rallie au « plus à gauche » après son départ du gouvernement Valls. Les électeurs considèrent dorénavant qu’EELV, disqualifié, porte de moins en moins le message de l’écologie politique.

La candidature de Yannick Jadot au nom d’EELV pour la présidentielle 2017 pouvait marquer la nécessaire rupture avec le PS : « Il y a un ras-le-bol des arrangements entre partis politiques. Je ne rentrerai pas dans des bidouillages d’appareils. Je ne suis pas là pour sauver des circonscriptions de parlementaires dans un jeu d’appareils. Si on fait ça, nous sommes définitivement morts. (LE MONDE du 2 janvier 2017) » Mais la victoire de Benoît Hamon à la primaire de la gauche et l’appétit de pouvoir de Cécile Duflot qui voudrait conserver son siège de député (grâce à Hamon) a changé la donne. David Cormand, le fervent soutien de Cécile et accessoirement secrétaire national d’EELV, fait voter en BE (Bureau Exécutif) le texte suivant que cosigne Jadot : « Pour la première fois, les combats et les propositions portés depuis toujours par les écologistes sont au cœur des projets des candidats de la gauche à l’élection présidentielle… Une nouvelle espérance peut naître qui débouche sur une victoire… Nous devons ouvrir le dialogue avec Benoit Hamon et Jean-Luc Mélenchon pour construire un projet commun… Personne ne serait à la hauteur de l’enjeu si chacun continuait à faire campagne dans son sillon… Il y a urgence à privilégier la dynamique collective sans préalable sur qui serait notre candidat commun… » Un tel discours ne peut être ressenti par les électeurs que comme une compromission d’EELV avec le parti socialiste, sachant que Mélenchon refuse tout deal avec le PS et que le candidat unique de la gauche pour le PS, c’est Hamon.

Benoît Hamon minimise l’appel du pied de Cormand et Jadot : « Ma campagne déborde déjà les appareils… Elle a rencontré l’adhésion de plus de 1,2 million de citoyens de gauche…J’ai des contacts avec des personnalités, avec leur entourage…Plus on parviendra à rassembler et à diminuer le nombre de candidats, mieux ce sera… (LE MONDE du 5 février 2017, Benoît Hamon : « Je ne serai pas un candidat ligoté ») ». Il est quasiment certain que Hamon n’ira pas chercher ses renforts principaux du côté de Jadot, mais du côté de tous ceux qui sont voté Valls lors de la primaire de la gauche pour rassembler tout ce qui reste du PS autour de lui ; cela lui permettra d’empiéter sur les soutiens de Macron. Il continuera quand même à tenir un discours « plus à gauche » pour attirer quelques partisans de Mélenchon. Où peut être l’écologie dans cette stratégie de rassemblement socialiste? Sachant qu’en plus deux écologistes (Bennhamias et de Rugy) avaient participé à la primaire de la gauche, EELV n’a même plus de légitimé écolo aux yeux du PS, ils ont déjà ce qu’il faut en leur sein.

Cécile Duflot a tout fait pour sauvegarder son pouvoir au niveau interne. Depuis son départ du gouvernement, elle a instrumentalisé EELV pour le tirer « plus à gauche ». Rares sont ses interventions publiques où elle parlait d’écologie, elle préfère le sociétal. Maintenant elle veut conserver son poste de député. Ce n’est pas avec Valls qu’elle aurait pu le faire, ce sera peut-être avec Hamon qu’elle a toujours fréquenté. Début février 2017, Cécile Duflot a eu un échange tendu avec une autre députée, Eva Sas, qui codirige le conseil politique de campagne de M. Jadot. Motif du différend ? « Cécile ne l’a pas dit comme ça, mais elle a fait comprendre que nos amis parlementaires aimeraient que Jadot se couche. L’idée, c’est de regarder si on peut avoir un label commun pour les législatives afin de construire une majorité parlementaire. » Ce que deviendrait M. Jadot dans ce scénario coule de source : « S’il y a un accord sur les législatives, ça relativise considérablement la présidentielle » indique M. Contassot. Notez que Contassot est membre actif de l’association souhaitée par Cécile Duflot, « Convention pour une République écologique », association créée après son échec à la primaire des écolos pour contourner l’élection de Jadot.

Cécile Duflot aurait mieux fait de suivre ses protégés, JVP et Cosse, quand ils ont basculé du côté obscur de la force. N’oublions pas sa main tendue à François Hollande mi-décembre 2015, bien après son départ du gouvernement en  mars 2014 : « Pour bâtir une coalition de transformation, je tends la main à François Hollande. Qu’il revienne à l’esprit de 2012 et rassemble enfin écologistes et communistes désireux de rejoindre un bloc majoritaire de transformation. Il faut porter une plate-forme de combat. » En février 2017, signe que le rapprochement s’opérera bientôt, cette interview donnée par Cécile Duflot à Libération* dans laquelle elle reprend directement les éléments de langage de la campagne hamoniste et vante les mérites du candidat « de gauche ».

Peu importe le flacon pourvu qu’on ait l’ivresse. Mais aujourd’hui Cécile Duflot risque fort d’enterrer EELV et le message écologique, dilué dans le gloubi-boulga socialiste. Pour en savoir plus, lire « L’écologie à l’épreuve du pouvoir » de Michel Sourrouille (Sang de la Terre, 2016)

* http://www.lefigaro.fr/elections/presidentielles/2017/02/08/35003-20170208ARTFIG00130-pousses-par-duflot-hamon-et-jadot-negocient-leur-rapprochement.php

5 réflexions sur “Europe Ecologie – Les Verts à l’épreuve du pouvoir”

  1. Il est temps de débarrasser ce parti des créatures purement politiques et de botter les arrières – trains pachydermiques de Cosse et Duflot , gauchomondialistes patentées représentatives de l’ image pastèque de ce parti .
    Waechter et Cochet , 2 personnes conscientes du désastre initié par l’ explosion démographique pourraient refonder ce parti et reprendre dans ses statuts un contenu malthusien loin des foutaises progressistosociétales des 2 folles mentionnées plus haut
    (immigration soi- disant utile pour le pays, métissage obligatoire, vivre ensemble , théorie du gentil migrant férocement persécuté dans son pays ) .

  2. La présidentielle est surtout une affaire de stratégies, d’alliances etc.
    Nous avons déjà dit ici que le plus important pour l’écologie était que les idées progressent. Aujourd’hui nous pouvons constater que c’est le cas chez au moins 3 candidats (Jadot, Hamon, Mélenchon).
    On pourra toujours déplorer des divergences, certains points de vues chez les uns et les autres… mais la seule chance que nous avons actuellement de voir l’écologie progresser au niveau politique, c’est une alliance entre ces trois. Waechter ne viendrait que compromettre cette chance en se présentant. D’autre part, il peut aussi avoir sa place et son rôle à jouer en cas de victoire.
    Si cette alliance échouait, non seulement nous aurions ce que nous aurions… mais l’image de la politique en serait encore plus entachée. Nous assisterions à une progression des idées néfastes en tous genre, sans oublier le  » tous pourris !  » et le  » à quoi bon ?  » … bref de toutes ces idées qui vont à l’opposé de ce que nous devons espérer.

    Il n’est absolument pas certain que les « puristes » fassent avancer la Cause.

  3. L’écologie se porterait mieux si elle avait choisi la voie proposée par Antoine Waechter. Il tente aujourd’hui de réunir les parrainages pour les prochaines élections. C »est selon moi, celui qu’il faut soutenir si l’on veut vraiment mettre la protection de la nature au cœur du débat.

  4. L’écologie se porterait mieux si elle avait choisi la voie proposée par Antoine Waechter. Il tente aujourd’hui de réunir les parrainages pour les prochaines élections. C »est selon moi, celui qu’il faut soutenir si l’on veut vraiment mettre la protection de la nature au cœur du débat.

Les commentaires sont fermés.