Le CNRS (Centre national de la recherche scientifique) et l’Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale) sont invités par le gouvernement à repenser profondément leur organisation, qui risquent d’être ainsi transformés en holdings privées d’autonomie Veut-on découper les organismes de recherche en instituts plus dociles ? Veut-on améliorer la prévisibilité de leur action ? Veut-on oublier toute transdisciplinaire ? Veut-on au contraire un acteur puissant capable d’orienter la stratégie ? (cf. LeMonde du 26.03.2008).
En fait la condition première à toute réorganisation n’est pas de restructurer d’une manière ou d’une autre, mais de repenser l’évaluation même de la recherche. Le plus important pour les politiques est de savoir fixer un processus qui conduit à la prise de décision lorsque des questions font controverses. En effet notre incapacité collective à organiser des débats sur les questions techno-scientifiques est la cause de la situation « compliquée », voire inextricable, dans laquelle nous sommes aujourd’hui : nous payons toujours plus pour une société technoscientifique de moins en moins efficace.
Dans la recherche et l’innovation, il doit y avoir implication accrue des profanes, c’est-à-dire d’acteurs qui ne sont ni scientifiques ni techniciens professionnels. Nous sommes en effet entrés dans une société de connaissance disséminée qu’il faut savoir utiliser. Nous sommes aussi rentrés dans une société de défiance envers les techno-sciences. Sans mise en démocratie effective des choix scientifiques, c’est au bout du compte le marché qui continuera de piloter la recherche. Dans une société ou le lobbying règne en maître, il nous faut affirmer la nécessité de contre-pouvoirs. Il nous faut aussi affirmer que toute recherche possède aussi des limites que le département du CNRS « environnement et développement durable » se doit de rechercher activement !
note complémentaire :
L’Alliance pour la Planète avait fait part à Valérie Pécresse, ministre de la recherche, de son souhait d’intégrer le comité opérationnel « Recherche », via notamment la Fondation Sciences Citoyennes, au côté des autres ONG du collège associatif du Grenelle de l’environnement. La ministre avait répondu que « le comité opérationnel est constitué uniquement des acteurs de la recherche française, aussi bien les organismes publics et les universités que les entreprises les plus impliquées ».
L’absence d’ONG au sein de ce comité opérationnel, dans lequel six industriels sont représentés, marque une rupture avec l’esprit et la méthode du Grenelle de l’environnement (parité des collèges, reconnaissance des associations). Les choix technologiques sont des choix de société, et c’est à juste titre que le Grenelle avait identifié des enjeux majeurs au niveau de la définition des priorités de la recherche française. Il paraît donc injustifiable de ne pas associer les associations à la définition des modalités de mise en oeuvre des travaux de recherche. Il est aussi erroné de ne pas inclure les associations et les citoyens, généralement désignés par le terme de « tiers-secteur scientifique », parmi les « acteurs de la recherche française »
(voir à ce propos le rapport ANRT-Futuris de 2004, ou le récent rapport « Taking European Knowledge Society Seriously » de la Commission européenne en 2007).