Mes principes de base sont bien établis, ils resteront dorénavant les mêmes pendant mon existence :
– La propriété, c’est le vol. L’homme ne travaille pas pour lui-même mais pour la collectivité. Il n’a aucun droit personnel sur « sa » femme, « sa » maison, « son » capital. C’est un locataire perpétuel.
– A travail égal, salaire égal. Il n’y a pas d’inégalité de valeur entre le travail d’un éboueur et celui d’un PDG. Ils sont aussi utiles à la société l’un que l’autre, ils dépendent autant l’un de l’autre. Pourquoi alors un salaire différent ? L’unité monétaire devrait être définie par l’heure de travail.
– Le même enseignement pour tous. Les injustices, les fausses valeurs, viennent le plus souvent de l’ignorance de la masse. C’est par l’éducation permanente et égalitaire qu’on arrivera à éliminer disparités et résistances aux réformes nécessaires.
Note du 18 novembre 1969, le moral revient : « On ne peut montrer son cul, mais on doit montrer son carnet de chèque ! Je ne sais pas ce que signifie intelligence et diplôme, souveraineté nationale et patriotisme, morale et religion. Je refuse ma nationalité française. Je suis né dans ce qu’on appelle Bordeaux par inadvertance, je pourrais aussi bien être hindou et crever de faim. Je refuse mon baptême parce que je ne peux serrer la main de Jésus Christ ; les paroles teintées d’eau bénite ne me transportent pas au septième ciel. Je refuse la langue que je parle parce qu’elle ne me permet pas de comprendre l’hébreu ou le zoulou. Je refuse l’enseignement qui conduit à diviser la société en castes, je refuse un gouvernement qui ne sert qu’à m’engluer dans les papiers de sa bureaucratie. Je vis dans une région de rêve qui a éliminé ses rancœurs et ses heurts. Je voudrais transformer le droit de la propriété : les biens à la mort de leurs soi-disant propriétaires reviennent à la collectivité. Les biens immeubles perçoivent un loyer qui est versé à une caisse de construction et d’amélioration. Les capitaux ne portent plus intérêt. D’ailleurs le capital disparaît, on ne reconnaît que le facteur travail. Les revenus sont fondés sur l’heure de travail. Le sens de l’utopie, ça permet d’avancer. »
J’ai quelques discussions animées avec des copains-copines. Le 20 février 1970, Daniel me soutenait que l’homme est doué de naissance, moi au contraire que c’est le milieu qui faisait tout : on ne naît pas bête ou intelligent, on le devient. D’après son point de vue, un crétin restera un crétin. Pour moi, il suffit de s’en occuper attentivement, de le rééduquer s’il n’est pas déjà trop tard. Daniel soutient l’inégalité sans chercher à établir l’égalité. Plus tard mes études de sociologie me montreront à quel point j’avais raison. La plasticité cérébrale et très grande, le conditionnement culturel une réalité. « On ne naît pas femme, on le devient » (Simone de Beauvoir), et tout le reste à l’avenant. (à suivre)
NB : pour lire la version complète de cette autobiographie, ICI
Bonjour Biosphère
Justement, et je suis étonné que vous ne connaissiez pas ce célèbre proverbe.
bonjour Michel C
le texte parle de capacités cérébrales et non de force physique comme le fait votre comparaison cheval/âne… Comparons ce qui est comparable.
Dans ce dernier chapitre , le 20 février 1970 Daniel avait pourtant raison.
Le milieu y fait pour beaucoup certes, mais il ne fait pas tout.
Parce que d’un âne on ne fera jamais un cheval de course. Et là non plus on ne choisit pas de naître bourricot ou alezan.
Mais c’est vrai, on pourra toujours le faire courir un peu plus vite, plus ou moins bien sûr … soit avec une grosse carotte soit avec un gros bâton, ou alors les deux… mais jusqu’à une certaine limite et pas plus.
Et encore » s’il n’est pas déjà trop tard « … comme il est justement dit. Parce que d’un vieux baudet on ne peut plus rien en tirer, il est bien trop sclérosé.
Quoi qu’il en soit le Système fonctionne à merveille. Que ce soit avec les bourricots, les percherons, les chevaux de course, les jeunes et les sclérosés etc. Et même avec ses détracteurs.
Super presse-citron, le Système sait en tirer jusqu’à la dernière goûte. Avec le temps les « rebelles » d’antan se ramollissent… plus ou moins bien sûr… mettent des bémols à leurs « convictions », font des entorses à leurs « principes », on en voit même épouser ce qu’ils haïssaient jadis. Bref, ces tartuffes s’embourgeoisent et rentrent dans les clous. Le plus marrant, c’est que généralement ils ne s’en rendent même pas compte.