Haïtiens assignés à résidence

Aujourd’hui Haïti est un cas d’école de l’interdiction d’émigrer. Washington et son intervention massive après le tremblement de terre a surtout pour but d’empêcher un exode qui jetterait des centaines de milliers de d’Haïtiens vers la Floride. Si les Etats-Unis ont décidé d’accorder une protection temporaire aux Haïtiens présents sur leur sol avant le 12 janvier, ils ont prévenu qu’ils n’accueilleront aucun boat people. En Europe, l’attribution d’un statut de protection temporaire permettant d’accueillir des réfugiés est du ressort du Conseil de l’UE ; son application aux victimes du séisme n’est pas à l’ordre du jour. Actuellement il n’y a pas de statut pour les réfugiés victimes de catastrophes naturelles ; il y a de fortes chances pour que ce non-droit perdure.

Alain Supiot constate une réalité : « La doxa libérale actuelle prône le démantèlement de toute frontière pour les marchandises et les capitaux, tandis que de nouvelles barrières sont érigées chaque jour contre la circulation des hommes. Les frontières doivent être, à l’échelle des grandes régions du monde, ouvertes ou fermées en fonction des impératifs sociaux qui leur sont propres. » (LeMonde des livres du 22 janvier). D’un point de vue biosphèrique, la relocalisation des activités est absolument nécessaire pour amortir les chocs écologiques qui ont commencé ; cela exige à la fois la territorialisation des marchandises, des  capitaux et des humains. Comme l’exprimait déjà Malthus à la fin du XVIIIe siècle, « l’émigration, en supposant qu’on en pût faire un libre usage, est une ressource qui ne peut être de longue durée ». Les produits textiles importés, la nourriture qui fait des milliers de kilomètre, la fuite des capitaux, les flots d’immigrés, tout cela appartiendra bientôt au passé.

L’opposition à l’immigration incontrôlée est souvent assimilée à tort à la xénophobie anti-immigrés. Mais dans une perspective écologique, l’immigration n’est pratiquement jamais souhaitable. Lorsqu’elle se fait massivement, elle ne fait que mondialiser le problème de surpopulation. De plus, ce n’est que lorsque les groupes humains se sont enracinés dans une zone particulière, au fil de plusieurs générations, qu’ils développent un sens des limites en termes de ressources.

5 réflexions sur “Haïtiens assignés à résidence”

  1. On se croirait dans « le malade imaginaire » : « la surpopulation ! La surpopulation, vous dis-je ! »

    « De plus, ce n’est que lorsque les groupes humains se sont enracinés dans une zone particulière, au fil de plusieurs générations, qu’ils développent un sens des limites en termes de ressources. »

    Faudrait-il en déduire que nos frères africains devraient se contenter de leurs conditions de vie arriérées locales, qui ne sont bien sûr pas dues au sous-développement, au pillage et à la corruption, mais à leur ponction indues sur la biosphère pour cause de surpopulation ?
    Si je comprend bien, vous refusez aux populations des pays pauvres le droit d’aller chercher ailleurs une vie meilleure, mais en plus vous souhaitez leur interdire de construire chez eux les moyens de leur bonheur ?
    Il faudrait donc qu’ils crèvent de misère pour sauver la planète ?

    Mais de quel droit, ô experts au sang froid ?

    Comment osez-vous écrire des choses aussi inhumaines dans leurs implications ?

    Et puis, je ne comprend pas : il y a quelques semaines, vous vous érigiez en pourfendeurs des états-nations, et pour une communauté d’intérêt à l’échelle de l’humanité, en maudissant les frontières.
    Aujourd’hui, nous seulement vous défendez la territorialisation, mais vous en exigez le durcissement au nom bien sûr de la sauvegarde de la planète, avec un argumentaire à faire rougir de plaisir un Hortefeux, un Besson ou un LePen.

    A force d’osciller entre le rouge et le vert, vous voici presque brun, messieurs de biosphère. Pour préserver la pureté du territoire, halte aux flots d’immigrés ! comme vous dites.

    Salutations,
    Jean-Gabriel Mahéo

  2. MIchel Marceau

    Suite…

    Il ne faut cependant pas oublier que la croissance très rapide de la population depuis les années 50 a été un facteur déterminant de dégradation de l’environnement en Haiti et par conséquence du niveau de vie de la population. L’exode de la classe moyenne vers l’étranger n’a pas aidé.

    Ce qui laisse penser que ce scénario pourrait se reproduire partiellement en Afrique; la croissance de la population augmente rapidement, la gouvernance est généralement médiocre, les personnes qualifiés migrent, l’environnement se dégrade. Les ressources étant plus importantes la dégradation sera probablement moins importante mais sans changement le processus d’agonie sera simplement plus lent. Mais il y a de l’espoir entre autre avec la présence chinoise.

  3. MIchel Marceau

    Suite…

    Il ne faut cependant pas oublier que la croissance très rapide de la population depuis les années 50 a été un facteur déterminant de dégradation de l’environnement en Haiti et par conséquence du niveau de vie de la population. L’exode de la classe moyenne vers l’étranger n’a pas aidé.

    Ce qui laisse penser que ce scénario pourrait se reproduire partiellement en Afrique; la croissance de la population augmente rapidement, la gouvernance est généralement médiocre, les personnes qualifiés migrent, l’environnement se dégrade. Les ressources étant plus importantes la dégradation sera probablement moins importante mais sans changement le processus d’agonie sera simplement plus lent. Mais il y a de l’espoir entre autre avec la présence chinoise.

  4. MIchel Marceau

    J’avais relevé à René Dumont une de ses contradictions. Il avait affirmé, dans l’un de ses livres, que l’immigration massive des populations pauvres de pays surpeuplés était souhaitable. Par contre il dénonçait la sur-consommation des citoyens des pays riches. Donc a moins de créer de vastes réserves de pauvres dans les grands pays riches et en faire des citoyens de seconde classe cette proposition de tiens pas la route.

    En Haiti le problème principal n’en est pas un de sur-population mais de mauvaise gestion d’une élite corrompue.

  5. MIchel Marceau

    J’avais relevé à René Dumont une de ses contradictions. Il avait affirmé, dans l’un de ses livres, que l’immigration massive des populations pauvres de pays surpeuplés était souhaitable. Par contre il dénonçait la sur-consommation des citoyens des pays riches. Donc a moins de créer de vastes réserves de pauvres dans les grands pays riches et en faire des citoyens de seconde classe cette proposition de tiens pas la route.

    En Haiti le problème principal n’en est pas un de sur-population mais de mauvaise gestion d’une élite corrompue.

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