Horrible, la société idéale non violente ?

Les policiers n’étaient pas armés. De toute façon il n’étaient plus en uniforme, ils étaient anonymés et n’intervenaient d’ailleurs que rarement. Plutôt secouristes qu’agent de la force publique. Car en ce temps là il n’y avait plus de crimes, de viols, de vols, ou même d’altercations. Plus personne ou presque n’avait l’idée d’agresser quiconque, tout cela était désormais du passé, l’intelligence collective était passée par là. La pensée même d’atteinte à l’intégrité d’une personne était devenue inconcevable grâce à une éducation constante à la non violence.

La société des purs (écolos) avait commencé par agir à la racine du mal, les parents, la source première d’une socialisation bienveillante ou défaillante. Les couples se formaient en toute liberté jusqu’à ce que la mort les sépare. Les enfants étaient donc entourés toute leur vie par des parents compétents. Dès l’adolescence, tout le monde suivait un entraînement à la parentalité. On prenait alors conscience que le droit à la procréation était d’abord et surtout une lourde responsabilité qui engageait sur plusieurs années. La pression du groupe était telle que les personnes perturbées n’avaient même pas idée de fonder une famille. L’éducation était fondée à la fois sur la libre parole, le respect des autres et le souci de mère nature.

Certes les première années de la mise en place de cet apprentissage à la bienveillance, il y a eu malheureusement quelques ratés ; certains individus se laissaient encore aller à des tendances agressives, elles n’en faisaient qu’à leur tête, oubliant d’œuvrer pour le bien collectif. Elles étaient définitivement exclues du groupe. L’homogénéité culturelle non violente devenait la norme sociale, acceptée puis intériorisé par tous et toutes.

Les jeux d’enfant dans ce futur proche ne célébraient que le plaisir de jouer ensemble à main nue. Pas besoin de matériel sophistiqué. Pensez à ce tableau de Bruegel l’Ancien. La scène se déroule dans un village flamand au XVIe siècle. Dans un cadre bien structuré par la perspective, plus de 250 enfants y jouent à plus de 90 jeux différents. Nul besoin de jouets industriels, de salles de sport et de jeux vidéos pour s’amuser collectivement. Pas de pistolet en plastique ou électronique pour se faire peur, dans notre société idéale Doom a complètement disparu.

Doom » : trente ans de violence dans le jeu vidéo (1993-2023)

Pierre Trouvé : « C’était le 10 décembre 1993, minuit. Des milliers d’internautes téléchargent simultanément le premier épisode de Doom. Ce jeu vidéo soigne un élément alors rare, la violence graphique. L’arme au poing, les premiers joueurs découvrent les couloirs de la base de l’UAC sur Phobos, ne laissant que des cadavres sur leur chemin. On débute avec un petit pistolet et l’on termine avec le fameux BFG 9 000, qui élimine tous les ennemis. Action frénétique, usage novateur de la 3D, effets visuels sanglants… Les joueurs sont magnétisés. Les polémiques sont instantanées. Aux Etats-Unis, Doom sort le lendemain des premières auditions du congrès sur le thème de la violence dans les jeux vidéo. En Allemagne, le jeu est interdit à la vente aux mineurs. Malgré de nombreuses études menées sur le sujet depuis presque vingt-cinq ans, jamais l’existence d’un lien de cause à effet entre les jeux vidéo et des événements tragiques n’a été établi. Pourtant Doom accompagne la fascination pour la guerre et les armes… »

(à suivre) Chronique horrible à retrouver bientôt dans un autre épisode…

20 réflexions sur “Horrible, la société idéale non violente ?”

  1. David Graeber et David Wengrow montrent qu’il n’existe aucune « histoire naturelle » de notre espèce. Rien, en tout cas, qui puisse être narré comme un grand récit.

    La connaissance accumulée par les archéologues et les anthropologues indique que tous les schémas classiques d’organisation sociale et politique ne sont en aucun cas des normes, pas plus qu’ils ne s’insèrent dans une forme d’évolutionnisme des sociétés humaines. Il existe des sépultures princières dans des sociétés de chasseurs-cueilleurs, des structures mégalithiques érigées par des populations non sédentaires, des cités immenses sans la plus petite trace de royauté, des organisations sociales complexes sans pouvoir centralisé, des proto-Etats sans révolution agricole, des sociétés de l’âge du bronze où la position des femmes était sans doute plus enviable qu’elle ne l’est aujourd’hui dans la majorité des régions du monde…

    1. Merci pour cette info. Tant qu’à bien faire faisons un peu de pub pour leur livre :
      – Au commencement était… Une nouvelle histoire de l’humanité (publié en 2021)

      Je vous invite à aller voir ce que Wikipedia en dit. Le résumé est très détaillé.
      Quant à sa réception, notamment par la communauté scientifique, impressionnante !
      Je vous conseille aussi d’aller lire sur Babelio les commentaires (critiques) .
      ( babelio.com/livres/Graeber-Au-commencement-etait )

      Voilà donc un livre qui devrait aider à DÉcoloniser les imaginaires.
      En tous cas une bonne idée de cadeau pour Noël.
      Vive l’anarchie ! 🙂

  2. commission scientifique sur la parentalité. Voulue par le gouvernement, des membres démissionnaires ont été choqués de voir que leurs travaux étaient présentés par Aurore Bergé comme une réponse aux émeutes survenues après la mort de Nahel M., le 27 juin. Ils imaginaient travailler ces prochains mois sur les conditions actuelles d’exercice de la parentalité la feuille de route de la commission devrait « concerner les options permettant d’épauler les parents dépassés, de dénouer les conflits familiaux, de prendre en charge la violence et les dépendances des jeunes ».

    Aurore Bergé ministre des solidarités et des famille avait détaillé les mesures punitives envisagées contre les parents et déjà actées par le gouvernement, telles que la mise en place de « travaux d’intérêt général pour les parents défaillants ».

    1. Paroles, paroles, que du vent de macrelle!
      Ma mère, directrice d’école primaire , a fait quelques signalements pour supprimer les allocations familiales des parents défaillants comme la non scolarisation des enfants.
      Je peux vous dire qu’elle ne l’a fait que très rarement. Il suffisait de discuter et d’avertir les parents pour que tout rentre dans l’ordre.
      C’est toujours dans la loi mais plus personne ne le fait.
      🤮

  3. Concevoir un société idéale est une utopie et reconstruire une société démocratique sur de petites structures, peu nombreuses est évidemment un respect de la voix de chacun donc à l’échelle humaine.
    Il me semble que c’est la définition de l’anarchie!
    Je suis pour… mais c’est un doux rêve qui ne prend pas en compte la féroce nature humaine de certains qui écrasent les autres et aussi la loi du nombre, il n’est pas possible de concevoir un ensemble humain qui permette à certains de concevoir un progrès intellectuel et matériel œuvrant pour un futur meilleur ou alors c’est avoir une vision étriqué du futur qui serait sans futur. Une espèce de meilleur des mondes.

    1. L’anarchie… ça oui c’est une belle utopie !
      La nature humaine … mais c’est quoi ça ?

      1. @ Esprit critique
        « La nature humaine, c’est quoi ça ? »
        Vous savez tous les fantasmes, les pulsions, l’iceberg caché des pensées interdites pour les gens civilisés mais qui pour certains s’expriment et pourrissent la vie des autres 😢

        1. Oh bien sûr, si ON veut, si vous voulez quoi. Si par «nature humaine» vous entendez cette incroyable capacité à débiter et faire d’énormes conneries.
          Je trouve toutefois que c’est un peu léger comme définition. D’autant plus qu’il a existé, et qu’il existe encore, certains spécimens qui dérogent à la règle.
          Rares il est vrai, n’empêche que ceux là invalident cette misérable théorie.
          Oh bien sûr, je n’ai pas la naïveté ni la prétention de croire que je ferais partie de ces sapiens dignes de ce nom. Vous non plus je suppose. MDR !

  4. La question de la société idéale à mettre en place est abordée par beaucoup d’auteurs, dont la célèbre Utopie de Thomas More (1516). Le fait que l’utopie ne s’est pas réalisé ne veut pas dire que cela ne peut être. Tout est question de socialisation, de conditionnement social. L’horrible dans le titre de notre article veut dire qu’une société culturellement non violente serait certes complètement aseptisée. Mais dans le bon sens, viable, conviviale et durable. L’imaginaire dans une société se fabrique. Actuellement l’humain moyen est aliéné, fataliste dans une société appauvrie, consumériste et imbu de la supériorité des humains sur la nature dans notre courte période d’abondance mondialisée.

    Or nous allons vers l’effondrement de cette société thermo-industrielle, et une recomposition culturelle se fait jour. C’est pour cela que ce blog existe, c’est pour cela que le militantisme écolo devient de plus en plus visible.

  5. Il aura fallu des siècles pour admettre que la Terre, aussi bien que le Soleil, n’étaient pas le centre de l’univers, et que l’Homme «descendait» du singe. Des décennies pour que se dégagent de larges consensus scientifiques sur une foultitudes de relations de causes à effets, comme la toxicité de l’amiante, le rôle du CO2 dans le réchauffement etc. etc.
    C’est ainsi que progresse la Connaissance, disons même… l’intelligence collective.
    Hélas il s‘en trouve toujours certains pour nier la réalité (déni). La raison en est toute simple. Cette réalité, qu’ils ne peuvent accepter, vient de toute évidence à l’encontre de leurs intérêts (matériels, financiers et/ou idéologiques). En fait elle porte atteinte à l’idée qu’ils se font du monde (dont leur petite personne) et de l’ordre des choses. Cette réalité vient ainsi perturber leur équilibre biologique (homéostasie).
    ( à suivre )

    1. Il faudra probablement encore beaucoup de temps, d’énergie, de sang et de larmes, pour qu’enfin ON admette que cette violence sur les écrans est aussi néfaste que la Pub, les ondes électromagnétiques et j’en passe. Que leurs conséquences sont néfastes à tous points de vue, l’humain, la société, la nature etc.
      Et encore plus de temps pour admettre la même chose de la Compétition. Pour DÉpasser bon nombre de drôles de croyances, et d’idées (reçues), ne reposant finalement sur rien de bien sérieux ou solide. Notamment celles qui veulent que la Compétition et la Guerre soient dans l’Ordre Naturel des Choses, qu’elles sont inscrites dans nos gènes, notre striatum, bref cette fumeuse «nature humaine».

  6. La question hélas ne se pose pas en ces termes.
    Il ne s’agit pas de savoir si ce serait une société merveilleuse, débarrassée de presque toute violence et se consacrant à des activités nobles et créatives ou au contraire une société horrible car complètement aseptisée, car tout cela ne se produira pas, cela relèverait de la fin de l’Histoire, une hypothèse tout à fait hors des réalités.
    Depuis les derniers 30 000 ans où l’homme est représenté par une seule espèce à peu près constante dans ces caractéristiques intellectuelles (sans doute un peu déclinante dans ses qualités physiques) cela ne s’est jamais produit, c’est un pari bien curieux alors même que le monde apparaît de plus en plus violent au quotidien comme dans les relations internationales, que nous allons justement aller vers le contraire, je n’y crois pas.

    1. Une société aux rapports humains onctueux (« monades urbaines (R. Silverberg) ou demolition man) « 😁😁😁
      Voilà qui plairait à certain commentateur mais comme vous le dites , la (mal)chance que cela se produise est très proche de zero et c’est heureux .
      J’ ai bien une idée de ce que devrait éliminer une société idéale mais MS me sanctionnerait impitoyablement .
      Peu nombreuse , elle pourrait être basée sur l’ agriculture , l’ artisanat et la petite industrie et offrirait à chacun une bonne protection sociale .

      1. Votre dernière phrase exprime en effet ce qui serait probablement la seule solution durable.
        J’ignore évidemment quelle est sa probabilité de réalisation. Notons que curieusement c’est ce que suggérait le romancier René Barjavel à la fin de son roman Ravage, : reconstruire sur de petites structures, peu nombreuses et essentiellement agricoles ou artisanales.
        Cela suppose un renoncement à beaucoup de choses et il n’est de toute façon pas certain que l’Histoire se décrète, les choses se font souvent hors de la volonté des hommes, c’est un enchaînement non maîtrisé.
        D’accord avec vous évidemment pour dire que les monades urbaines sous leur aspect onctueux décrivent en réalité un enfer, ou la liberté (hors la liberté sexuelle qui devient d’ailleurs presque une obligation) n’existe plus.

    2. @ Didier Barthès. Que vous n’y croyez pas ne prouve en rien que cette société idéale (cette utopie) ne verra jamais le jour. Notamment parce que ceci ou cela voudrait qu’elle soit impossible à concrétiser (ce qui reste toujours à prouver).
      Vous parlez d’un pari… oui en effet c’en est un. Et alors ? J’imagine que comme moi vous croyez à l’évolution, que vous savez que Sapiens est relativement jeune, qu’il a encore (théoriquement) une certaine marge de progression. Rien ne nous interdit donc d’imaginer un Sapiens enfin digne de ce nom, libéré de la Compétition, de la Hiérarchie, ne courant plus comme un con après le Pognon, les Honneurs et j’en passe.
      Bien entendu ni vous ni moi ne serons là pour la voir, de nos propres yeux, cette société idéale. Et bien sûr, il est probable que nous n’ayons pas encore tout vu, dans l’horreur.
      En attendant… je préfère imaginer un Sapiens bisounours qu’un Sapiens cannibale.

      1. Ah mais Michel C, on peut tout imaginer, mais je répète qu’aujourd’hui cela me semble le plus improbable, l’évolution (si l’on est darwinien) sélectionnait les plus adaptés, je ne suis pas sûr que ce soit encore le cas dans nos sociétés. En ce sens je ne vois pas trop la marge de progression dont vous parlez. Bon disons que je suis plus pessimiste que vous. Il vaudrait mieux que vous ayez raison, certes, mais à part cette foi déclarée en l’homme dans vos propos j’ai du mal à voir de bonnes raison d’y croire. L’homo sapiens à 30 000 ans dans sa forme actuelle mais on semble avoir repéré des premiers spécimens il y a 300 000 ans, et en 300 000 ans jamais rien d’idéal, alors penser que demain tout ira bien… alors que la biosphère est dans un état catastrophique et que nous violons toutes les règles démographiques de l’écologie (encore une fois trouvez un prédateur de notre taille présent à plus de quelques millions d’exemplaires ) non, vraiment pas.

    3. Didier Barthès,
      Je me permets une remarque qui est une marotte de biologiste, la notion d’espèce humaine.
      Oui, il existe à ce jour une seule espèce Homo sapiens sapiens et un seul genre Homo mais non il n’a pas existé plusieurs espèces au sens strict comme Homo neandertalis, erectus ou sapiens.
      il existe de nombreuses branches du genre Homo qui se sont diversifiées et ont évolué plus ou moins séparément de l’Asie (Homo erectus) à l’Europe-Asie (Homo neandertalis) et l’Afrique (Homo sapiens plus récent, max -300 000 ans).
      Toutes ces sous-espèces sont interfécondes et se sont hybridés.
      Donc Homo sapiens n’est pas une espèce, c’est une sous-espèce et les individus d’aujourd’hui Homo sapiens sapiens sont tous issus de l’évolution de ces sous-espèces plus ou moins hybridés.
      Cela est issue des progrès de l’analyse génétique des squelettes anciens et des individus d’aujourd’hui. Voir Patou-Mathis Neandertal de A à Z.

      1. Bonjour TSP (Thierry )
        Etes vous sûr que toutes ces espèces étaient interfécondes ? Homo erectus est assez ancien et a vécu dans de nombreux endroits et pendant des temps bien plus long qu’homo sapiens, certes nous sommes d’une même branche et l’on peut penser qu’homo sapiens descend de certains homo erectus (à priori en Afrique ). Pour autant, au bout d’un certain temps rien ne prouve qu’il aient été encore interféconds. Même avec l’homme de Neandertal, pourtant plus proche, (qui lui aussi descend d’homo érectus mais plutôt en Eurasie) il est normal que nous ayons des proximités, on a montré qu’il y avait eu des croisements, cela n’indique pas que tous les individus de ces deux groupes aient été interféconds, (il y a bien interfécondité parfois entre âne et cheval et entre lions et tigres pourtant tout le monde s’accorde à dire que ce sont des espèces différentes) Cela dit, oui les frontières sont floues autour du concept d’espèce.

        1. Sapiens descend d’erectus, qui lui descend du singe, qui lui descend de l’arbre, Neandertal aussi, c’est bon tout ça ON le sait. Qu’il reste encore des maillons manquants, des théories bancales, des choses à prouver etc. ça c’est normal. La Connaissance avance lentement, à petits pas, et l’intelligence collective n’en parlons pas. Mais ça ne change rien au fait qu’il ne reste plus que Sapiens aujourd’hui. C’est peut-être con mais c’est comme ça. La question ici est démontrer (prouver par +b) que Sapiens est con damné à rester aussi con. Voire à le devenir encore plus, toujours plus. Bon courage !

        2. Didier Barthès
          La notion d’espèce chez les hominidés a été dévoyée par les anthropologues, paléontologues qui ont décrit des espèces distinctes à partir de critères morphologiques des squelettes or ils n’avaient aucun moyens de connaître l’interfécondité.
          Et aujourd’hui encore la notion d’espèce pour les biologistes est complexe à cause de cela.
          La définition exacte est : ensemble d’individus se ressemblant et pouvant avoir une descendance.
          À cette définition, s’ajoute des critères géographiques ou de comportements qui peuvent entraîner une impossibilité dé fécondation pouvant entraîner ensuite une dérive génétique.
          Aujourd’hui, depuis 10 ans, les paléontologues sont obligés de revoir leur copie car des analyses génétiques d’os anciens d’individus du genre Homo ont montré des croisements entre Homo sapiens venant d’Afrique
          Et Homo neandertalis du proche orient et donc on retrace le parcours de sapiens.
          … suite

          modération à Tsp :
          Evitez les hors sujet s’il vous plaît.
          Aucune mention de « la société idéale » dans votre discours…

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