L’identité nationale n’est pas une notion qui divise, mais une réalité construite qui rassemble. Grâce à un bourrage de crâne, il y a « nous » et il y a « eux », mon ethnie et les étrangers, les inclus et les exclus. Si l’expression ne date que des années 1980, son origine est plus ancienne. Se réclamer de l’identité nationale, c’est la formule modernisée pour inciter encore et toujours à l’amour de la patrie, au nationalisme. Que de crimes n’a-t-on commis en son nom : le choc des nations et toutes ses guerres sur deux siècles, le colonialisme et son cortège d’atrocités, le culte du drapeau et ses flots de sangs « impurs ». Je suis en total accord avec Claude Lévi-Strauss, « J’ai connu une époque où l’identité nationale était le seul principe concevable des relations entre les Etats. On sait quels désastres en résultèrent ».
Je ne peux que rejeter une fabrication de l’histoire qui n’est que bricolage : choix d’une langue unique, service militaire obligatoire, papiers d’identité, contrôle à tous les coins de rue. Nos langues maternelles ne sont pas uniques mais nous pourrions adopter un espéranto. Le service militaire ne fait que préparer à la guerre de tous contre tous, soyons objecteurs de conscience. Car je suis membre de la race humaine et mon territoire, c’est notre Terre. Mais l’identité « nationale », c’est aussi le support d’une communauté d’intérêt. Nous savons tous les ravages qu’a entraîné la conquête de « nouvelles frontières » par les peuples et l’extermination physique ou mentale des peuples autochtones pour conquérir de nouvelles ressources (cela commence sans doute avec homo sapiens contre les néandertaliens). Nous voyons aujourd’hui le processus mondial d’acculturation sous l’égide du modèle de croissance des pays occidentaux et l’accélération de notre course vers le mur des limites de notre planète. Nous ressentons que demain il y aura des guerres du climat ponctuées de guerres pour l’eau et la terre.
Donc l’avenir sera double s’il est pacifique, une relocalisation des hommes et des activités (à chacun son territoire) mais aussi une ouverture d’esprit à la multiplicité des formes de vie et de culture de notre biosphère ; nous penserons global et nous agirons localement (identification au glocal, plutôt qu’identité nationale). Le « nous » sera toujours relatif ou bien il nous projettera violemment les uns contre les autres.
NB : Pour aller aux racines de l’identité nationale, lire LeMonde du 7 novembre
Le débat sur l’identité nationale n’intéresse pas que la droite extrême et l’extrême droite. Les Ateliers de l’Eclipse, association d’artistes-recycleurs, sont sortis de leur légendaire politique de réserve (quoique l’on ne nous ait pas encore donné le Goncourt) pour s’exprimer dans le Nouvel Observateur.
En gros, le débat est désormais clos puisque l’identité nationale, ça n’existe pas.
Bisous rouillés.