La Belgique décriminalise la prostitution

Selon le discours des Verts français, « La prostitution n’est pas un élément naturellement constitutif de la vie en société. » C’est vrai, la sexualité tarifée relève du culturel. Mais la sexualité ordinaire aussi. Il n’y a donc aucune règle définitive qui puisse nous permettre de privilégier a priori la répression totale de la prostitution ou la légalisation intégrale des travailleurs du sexe. Voici une analyse comparative du statut de la prostitution en France et en Belgique.

Lire, l’écologie face aux abolitionnistes de la prostitution

Jean-Pierre Stroobants : Les travailleurs et travailleuses du sexe (TDS) vivent une révolution depuis le 1er juin 2022. Une loi votée en mars leur permet de sortir de voir leur activité décriminalisée. Les prostitués (femmes dans une proportion de 95 %) auront les mêmes droits que les autres travailleurs indépendants, dont celui de bénéficier de la sécurité sociale, du chômage, de l’accès aux soins, d’un congé maternité, etc. Et tous les tiers qui soutiennent leur activité ne peuvent plus être poursuivis, sauf en cas de profit anormal. La réforme est accompagnée d’une répression plus sévère du proxénétisme et des abus sexuels. Le concept de consentement est précisé : sans consentement explicite d’une personne, tout rapport sexuel avec elle sera punissable. L’âge de la majorité sexuelle (16 ans) ne change pas, mais un rapport avec un mineur ou une mineure de 14 au moins échappera à la sanction si la jeune femme ou le jeune garçon y consent et que son/sa partenaire n’a pas plus de 17 ans. Octroyer un statut à la prostitution consentie est le meilleur moyen de lutter contre la prostitution forcée. C’est le premier État européen à adopter de telles mesures, et le deuxième au monde après la Nouvelle-Zélande. Le statut de la prostitution est donc différent de celui de la Suède (la prohibition), de celui des Pays-Bas (une légalisation réglementée, soumise à un permis d’exercer) ou de la France ( pénalisation du client depuis 2016).

Quelques commentaires

RVDB : Sans être expert sur le sujet, il me semble que cette approche belge est celle qui est le plus dans l’intérêt de celles et ceux qui se retrouvent à pratiquer cette activité. Les lois répressives ne me semble pas avoir réussi à faire disparaître la prostitution, juste à la cacher, ce qui a fragilisé les personnes qui se sont retrouvées sous la coupe de proxénètes.

Michèle de Dordogne : Les Belges vivent vient dans un pays bien plus pragmatique que le nôtre : les gens en fin de vie meurent quand ils le veulent et comme ils le veulent, celles qui se prostituent ne sont plus considérées comme des pestiférées.

François Aubert : C’est notre bien-pensance qui a poussé à « l’abolition » de la prostitution en scandant « il n’y a pas de prostitution heureuse ». On peut répondre aussi bien qu’ il n’y a pas de travail qui ne soit -peu ou prou- prostitution ! La loi française a été votée en 2016 alors que seuls 87 députés ont pris part au vote final (64 pour, 12 contre et 11 abstentions)..Le résultat final est une aggravation de la situation des prostitués. Je mets « prostitués » car pour moi le masculin devient le neutre dès que les deux sexes sont visés (je n’arrive pas à m’habituer à l’hypocrite « celles et ceux » qui alourdit tous les discours).

FDD : La moraline victorienne française refuse d’admettre que l’on ait le droit d’accepter des rapports sexuels contre rémunération. Pourtant, de tout temps, l’argent est entré dans les relations sexuelles, ne serait-ce que par l’obligation faite au mari d’entretenir (le joli verbe…) son épouse.

Michel SOURROUILLE : L’exercice de la sexualité procure naturellement du plaisir quand on se laisse aller. Il y a prostitution parce qu’il y a frustration. Si les humains passaient plus de temps à faire l’amour comme les Bonobos, sans esprit de conquête et chaque fois qu’il faut réduire les tensions sociales, sans doute n’y aurait-il plus de prostitution (ni même de guerres). L’amour libre, le sexe libéré, implique aussi de lutter contre les rapports de domination. Comme on disait en d’autres temps, « peace and love », l’amour et la paix. Réconcilier nature (liberté sexuelle) et culture (règles régissant le rapport entre les sexes), n’est-ce pas là l’objectif premier des écologistes ?

SJ : Rendez-vous dans dix ans pour une étude comparative sérieuse France/Belgique sur le seul critère important : quel système protège le mieux (ou moins mal) les prostitué(e)s?

Lire sur notre blog, La prostitution est un boulot comme un autre

4 réflexions sur “La Belgique décriminalise la prostitution”

  1. Claude Renouard

    Bonjour
    Excusez .Pour moi , je trouve très triste su on assimile prostitution et travail.C est bien se moquer des gens qui travaillent avec l idée de prendre du plaisir pour soi , d être satisfait de faire pour une collectivité , ou un fragment de celle ci.
    C est surtout refuser de voir que la prostitution se fonde d abord sur la misère. On peut habiller cela comme on peut , il reste que les personnes qui ,pour l essentiel doivent se prostituer sont des centaines de milliers et le sont par manque absolu de moyens. Que cette situation fait le bonheur de milliers de maquereaux et de dizaines de mafia d une violence épouvantable.Ces personnes prostituées , elles , sont absolument sans voix et pour cause.
    Quand elles parlent , c est tout ce qu’on on veut sauf librement.

  2. Vieux bonobo

    Là aussi, il serait peut-être intéressant d’écouter d’abord celles et ceux qui peuvent en parler le mieux. C’est à dire les TDS. Qu’ils nous disent si ces nouvelles lois vont dans leur sens ou pas, si elles améliorent leurs conditions de travail etc. Eh oui, sans être moi non plus un expert sur le sujet, je fais partie de ceux qui pensent que la prostitution est un boulot comme un autre. Un boulot, un travail, un supplice (tripalium), appelez ça comme vous voulez. Eh oui, je fais partie de ceux qui moins ils en font et mieux ils se portent. Trimer, en baver, en chier, souffrir, ça non ! Glander, faire la sieste, l’amour, ou le con, ça oui ! 🙂

    1. et bien dansez maintenant

      D’ailleurs qui est le mieux placé pour parler de la prostitution?
      Pour qu’une activité soit il faut un producteur (prostitué ou agriculteur…) et un consommateur. Dans ce « contrat » les 2 sont aussi bien placés pour en parler.
      Dans un marché régulé, n’écouter que le producteur signifierait que le consommateur ferme sa gueule et consomme ce que la réglementation a décidé pour lui et son bien.
      Dans un marché qui serait libre, à chaque producteur son consommateur, à chaque consommateur son producteur.
      Pour un fait sociétal comme la prostitution ou un bien vital comme la production alimentaire, le peuple entier, producteur, consommateur et même non consommateur se doit de choisir les règles collectives, limites et objectifs.

      1. VIEUX BONOBO

        Vous avez raison, le con-sot-mateur est aussi bien placé que le producteur pour en parler. Manque de pot, je ne suis ni l’un ni l’autre. Le comble serait alors que je légifère. Voyez, si je devais, on ne sait jamais, participer un jour à une conférence citoyenne pour traiter ce sujet… je commencerais par aller faire un tour aux putes, comme on dit vulgairement. Et non pas en tant que con-sot-mateur, mais en tant qu’investigateur. Et je discuterais aussi bien vec les un(e)s qu’avec les autres.

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