« Les taux de croissance sont en baisse depuis quarante ans… Les appels au retour d’une « croissance forte » semblent désuets et irréalistes… La prise en compte du caractère limité des ressources énergétiques et la nécessité de contenir la hausse des températures à l’échelle de la planète pourraient réduire encore un peu davantage le potentiel de croissance…. Un tel horizon effraye : sans croissance, un pays ne peut prospérer. Cette affirmation, si profondément ancrée dans notre idéal collectif, ne devrait-elle pas être réexaminée ?… Si l’on regarde du côté des enquêtes mesurant le « bonheur individuel », il apparaît que sur le long terme la croissance n’y est pas corrélée… Prospérer sans croissance, c’est d’abord un enjeu et une ambition politique… »* Les réactions des internautes sur lemonde.fr méritent lecture :
– Première fois que je lis dans un journal « reconnu » que notre système est en train de changer. Le paradigme de la croissance aurait-il du plomb dans l’aile ?
– Cette chronique entre-ouvre timidement la porte au débat sur la décroissance. Ou on l’organise, ou elle sera sauvage. C’est le retour de malthusianisme qui s’annonce.
– Dans un monde fini, une croissance infinie est une folie. Combien de temps encore allons-nous pouvoir massivement consommer ce que l’on ne produit plus ?
– « Prospérité sans croissance » est aussi le titre d’un livre fort intéressant de Tim Jackson, dont on s’étonne qu’il ne soit pas cité ici. D’autant plus que lui ne s’en tient pas au constat, ni à l’affirmation générale qui fait le titre de l’article. Il envisage non seulement les moyens, mais aussi le type de société qui en résulte : plus frugale, massivement investie dans sa conversion écologique. Un bon aperçu du prix de notre survie !
– Il ne faut pas être grand clerc pour se rendre compte que croissance nulle et productivité croissante signifient chômage de masse et paupérisation de la population.
– Allez voir du côté du collectif Roosevelt et de ses propositions sur le partage du travail et d’éléments de réorientation de l’activité vers plus d’écologie et moins d’ostentation et de consommation vaines et destructrices.
– C’est la volonté de vouloir continuer la croissance qui est la source de tout les dysfonctionnements
– Le plaisir, le bonheur sont irrémédiablement de la sphère privée : la vraie divergence et la difficulté à rompre avec les illusions des idéologies de la croissance, c’est sans doute là.
– L’Homme étant ce qu’il est, le risque est élevé, en cas de croissance molle durable, de parvenir à une société de plus en plus inégalitaire.
– Sans croissance, c’est le déclin assuré des classes moyennes au vu de l’appétit sans cesse croissant de quelques uns qui veulent toujours plus. Quand aux salariés lambda, ce sera dur, très très dur pour eux.
– Que fait-on de ceux qui jugent que la croissance de leurs revenus, l’achat de superflu, le luxe sont indispensables à leur épanouissement personnel ? On les envoie en camps de rééducation ?
– Comment peut on parler de croissance quand la consommation des ménages moteur dominant de la croissance en France est financée par de la dette publique, opium des politiques qui sont des malades mentaux de la dépense pour satisfaire leurs électeurs qui sont les cocus du système.
– Ce qui est sûr, c’est que nos politiciens sont à la ramasse sur le sujet, le populisme a de beaux jours devant lui.
– Il y a eu dans le passé des idéologies de la non-croissance, de la fin des changements, du bonheur par l’immobilité. La plus illustre a été celle de la dernière dynastie impériale chinoise. « Nous avons tout » avait répondu l’empereur Qianlong à l’ambassadeur d’Angleterre qui parlait de commerce international.
* LE MONDE éco&entreprise du 10 décembre 2013, Oublions les « trente glorieuses », une prospérité sans croissance est possible
propos de Lucas Chancel et Damien Demailly (Institut du développement durable et des relations internationales – Iddri-SciencesPo)