Les programmes de la NASA ont créé les images iconiques qui ont nourri notre imagination et les connaissances qui permettent l’émergence d’une préoccupation écologique mondiale. Une rupture visuelle se produit avec les premières images de la Terre grâce au programme Apollo. Les photos « Lever de Terre » (1968) et « La bille bleue » (1972) : soudain, notre planète apparaît dans son intégralité, perdue dans l’immensité noire. Que penser ? Que faire ?
Youness Bousenna : Côté pile, Gaïa (la Terre-mère) s’appréhende comme une totalité organique. La vie a modelé en profondeur son environnement terrestre, suggérant que la biosphère forme une « machine trop puissante » pour être seulement passive. La chimie moderne démontre que la Terre fonctionne comme un vaste cycle, par exemple le carbone relie la respiration du règne animal (qui en expulse) et végétal (qui s’en nourrit). Côté face, ces technologies, issues d’une collaboration mêlant l’armée, la recherche et l’industrie, furent d’abord conçues au service d’un « géopouvoir » servant le fantasme d’une maîtrise toute-puissante de la Terre. Les humains se croient les pilotes tout-puissants d’une planète assimilée à une machine.
Ces deux visions reposent sur un dénominateur commun : la solution aux problèmes environnementaux viendra des experts et de la technique, plus que de la démocratie. James Lovelock (1919-2022) en arrive à prôner une suspension de la démocratie, il déteste le mouvement politique écologiste, soutient le nucléaire et la géo-ingénierie. Son soutien infaillible à l’industrie se double de conflits d’intérêts constants.
Le point de vue des écologistes écartelés entre culte de Gaïa et technoscience
La figure de Lovelock est effacée aujourd’hui au profit du géochimiste russe Vladimir Vernadski (1863-1945), qui a théorisé la notion de biosphère en 1929. Elle est définie comme la pellicule à la surface de la Terre transformée par la vie. Aujourd’hui elle est tellement transformée par les humains qu’on a pu parler d’anthropocène.
La crise écologique nous ramène au temps du mythe : nous vivons un moment indéterminé, où notre conception même de la Terre est bouleversée. «Il est aujourd’hui tard, beaucoup trop tard pour sauver la planète telle que nous la connaissons», expliquait James Lovelock en 2009 à l’AFP, à quelques mois de la conférence de Copenhague sur le climat (COP15) qui s’était soldée par un échec retentissant. «Préparez-vous à d’énormes pertes humaines», disait-il.
L’ancien ministre de l’écologie Yves Cochet tient le même discours, « Bientôt les politiques auront pour tâche principale de diminuer le nombre de morts ». Que ce soit guerres, famines ou épidémies, il est vrai qu’il y a beaucoup à faire pour réguler une planète Gaïa surpeuplée, surarmée et sur-consommatrice…
En savoir plus grâce à notre blog biosphere
James Lovelock est mort le 27 juillet 2022
extraits : « La régulation de la fécondité participe du contrôle démographique, mais la régulation du taux de mortalité n’est pas la moins importante. Maintenant que la Terre court le danger imminent d’évoluer vers un état chaud et inhospitalier, il semble amoral de s’acharner à vouloir prolonger notre espérance de vie au-delà de sa limite biologique normale.Si nous voulons continuer d’exister sans craindre les catastrophes naturelles, nous devons dès maintenant soumettre la croissance démographique à de fortes contraintes. En fin de compte, c’est Gaïa, comme toujours, qui opérera la réduction de population et éliminera ceux qui enfreignent ses règles… »
Bruno Latour et Gaïa, la Terre-mère
extraits : « S’il est vrai que les humains ont construit artificiellement leur propre environnement, à l’intérieur duquel nous sommes confinés, il faut nous intéresser à ce dont nous dépendons, la température globale, la biodiversité. Cela change complètement le rapport au sol, c’est cela « atterrir ». Gaïa, la « Terre-mère », cette notion résume justement le changement de « lieu » que nous ressentons avec la pandémie. Pour exercer quelque forme politique que ce soit, il faut une Terre, un lieu, un espace… »
La revanche de Gaia, un réchauffement irréversible
extraits : La situation actuelle rappelle à James cette année 1938, où les gens, les politiciens, tout le monde savait que la grande guerre arrivait, mais personne n’agissait de manière sensée. De la même façon aujourd’hui le désastre peut survenir soudainement, la catastrophe est à la porte, mais l’espèce humaine ne fait rien. La Biosphère peut ajouter qu’on préfère se battre pour une caricature de Mahomet et pour épuiser les dernières gouttes de pétrole. Il n’y a pas de rationalité à long terme de l’action humaine…. (écrit le 5 juin 2006 par Michel Sourrouille)
Extraits : En vérité la foi en dieu, la confiance dans notre technique ou notre engagement en faveur du développement durable passe à côté d’une réalité : notre dépendance. Si nous ne prenons pas soin de la Terre, elle le fera elle-même en nous rendant indésirables. Les croyants feraient bien de porter un regard neuf sur notre demeure terrestre et y voir un lieu saint, partie intégrante de la Création, mais que nous avons désacralisé. Maintenant que nous sommes plus de six milliards d’individus affamés ou avides, aspirant au style de vie des pays développés, c’est-à-dire à la vie urbaine, nous empiétons de plus en plus sur le domaine de la Terre vivante. Puisque le seuil fatidique du réchauffement climatique a bien été franchi, peut-être devons-nous prêter une oreille attentive aux « écologistes profonds » comme Arne Naess et les laisser nous guider….
– « Les humains se croient les pilotes tout-puissants d’une planète assimilée à une machine. »
(Youness Bousenna)
Je trouve cette déclaration absurde. Ce n’est pas parce qu’elle peut être assimilée à une machine… qu’ON doit automatiquement se croire tout-puissant. Les meilleurs pilotes… de motos, de bagnoles, d’avions etc. qui s’y sont cassé les dents, ou cramé la moustache … en savent quelque chose.
Quand à la question, du titre, je ne vois pas non plus en quoi elle nous avance.
La Terre est une planète, notre planète. Divinisée depuis longtemps, comme le soleil, la lune et j’en passe. Ce qui ne nous a pas rendus moins cons. Mais est-elle une machine ? D’abord, qu’entend-on par machine ? La Terre n’a pas été construite par l’Homme c’est évident. La Science nous explique sa formation, son histoire etc. (à suivre )
(suite) Et pareil des êtres vivants :
– « Pour la science contemporaine, dont les bases sont matérialistes, les êtres vivants sont des systèmes matériels complexes, qui maintiennent leur organisation, et donc leur originalité, en échangeant matière et énergie avec leur environnement, comme l’a notamment analysé Ilya Prigogine. Ainsi, les êtres vivants seraient des machines d’un genre particulier ou « d’un autre ordre ».» (Wikipédia : Machine)
La Terre est-elle alors, elle aussi… une machine « d’un autre ordre » ?
Tout ce qu’ON peut dire, c’est que l’hypothèse Gaïa est controversée.
En tous cas pour moi, James Lovelock n’est pas un dieu.
Quoi qu’il en soit je recommande vivement la lecture des livres de James Lovelock, la théorie Gaïa est vraiment intéressante même si certains ont voulu la caricaturer en mettant une intentionnalité dans les relations entre la Terre et le vivant.
Ce qui est intéressant c’est que la vie sur Terre participe par les multiples échanges chimiques qu’elle entretient au maintien des conditions… nécessaires à la vie sur la Terre et ceci sur longue période, car ce qui est extraordinaire est que la Terre soit restée habitable 3,8 milliards d’années
Vous nous recommandez vivement la lecture des livres de James Lovelock. Je suppose que les traductions en français font parfaitement l’affaire. Dont les plus célèbres :
– La Terre est un être vivant, l’hypothèse Gaïa (Traduit par Paul Couturiau, Christel Rollinat, chez Flammarion, 1979)
– Gaia. Une médecine pour la planète (Traduction Bernard Sigaud, 2001)
Je suppose donc que vous accusez là les traducteurs (et les éditeurs) d’avoir intentionnellement mal traduit, d’avoir fait dire à Lovelock des choses qu’il n’a jamais dites… et ceci juste pour caricaturer cette théorie et patati et patata. N’importe quoi ! .
L’homme est un poux qui se prend pour le pilote parce qu’il réside sur la tête.
Il y a aussi des poux qui résident plus bas, on les appelle morpions.
Petite histoire. C’est un morpion qui rencontre un autre morpion :
– Eh salut ta, ça va ?
– Oh que non, j’ai chopé la crève, je suis frigorifié. BRRR !!!!
– Et comment t’as chopé ça ?
– Eh ben je croyais avoir trouvé mon petit coin paradis, bien au chaud, dans une bonne grosse foufoune… et voilà que je me suis retrouvé dans la moustache d’un motard.