La France est à court de poissons à partir du samedi 19 mai : c’est ce qui se produirait si ce pays n’avait recours aux importations*. En 1990, cette date fatidique tombait le 6 septembre ; en 2011, c’était le 13 juin. Dans l’Union, seuls trois pays, l’Estonie, l’Irlande et les Pays-Bas, sont à peu près autosuffisants en produits de la mer. Les Vingt-sept commencent donc à épuiser les stocks halieutiques des pays du Sud. Cette « dépendance » en termes de pêche aux apports extérieurs de la France et de l’Europe n’est rien ou presque si on la compare à la dépendance aux importations de pétrole. Cette enclave de pays riches n’a pas encore pris conscience que son niveau de vie est conditionné par l’exploitation des pays du tiers-monde et l’état des réserves mondiales.
C’est pourquoi, à la mesure de notre degré de dépendance, il faudrait ajouter la connaissance des pics. Le temps est cyclique, tout ce qui est né mourra, tout ce qui monte doit redescendre. N’écoutez jamais ceux qui vous parlent de croissance sans parler de pic. Comme le pic pétrolier, de nombreux phénomènes évoluent selon une courbe en cloche. Par analogie au peak oil, le peak fish** ou pic de production des pêcheries, est dépassé. En 1995, la capture de poissons a atteint son tonnage maximum avec 95 millions de tonnes. Depuis, la pêche mondiale plafonne autour de 90 millions de tonnes. Les ressources halieutiques sont renouvelables, mais la surpêche a détérioré les chaînes trophiques grâce au pétrole à bas prix. Pétrole et pêche ont partie liée, on consomme en moyenne 1 litre de gazole pour pêcher un kilo de poisson.
La solution ? Des chalutiers plus petits, sortant moins souvent, laissant aux stocks de poissons le temps de se régénérer. Vivement le retour à la marine à voile… et au régime tendance végétarienne !
* Le Monde.fr | 18.05.2013, Le dernier poisson français de l’année
Une solution pourrait être la création de vaste zones marines sans pêche du tout où les espèces pourraient se reconstituer et se soumettre à la sélection naturelle. Au bord de ces zones il y aurait « fuite » de poissons vers les zones de pêche. Cela dit, il faut globalement très sensiblement réduire les quantités pêchées. Il n’y a rien d’étonnant à ce qu’une économie de prédation n’ait aucun avenir sur une planète de sept et bientôt neuf milliards d’habitants. Par définition, les prédateurs doivent être beaucoup moins nombreux que les proies, nous sommes en train d’inverser cette règle de la nature