En tant qu’espèce biologique, Homo sapiens nous semble avoir peu de risques de disparaître à brève échéance même si, à l’échelle géologique il est bien évident que le monde a commencé sans l’homme et s’achèvera sans lui. Notre nombre, notre polymorphisme génétique, notre polyvalence et notre adaptabilité sont en effet tels qu’il restera bien quelque part des poches de résistances pour ré-ensemencer l’anthroposphère.
Plus probable à terme est une dégradation de notre milieu par nos actions délétères. Car l’homme, néoplasme de l’évolution, est bien le «cancer de la planète», dont les métastases peuvent d’ores et déjà être observées dans tous les recoins de la planète. On dirait que l’homme est destiné à s’exterminer lui-même après avoir rendu le globe inhabitable. Quant à l’ambition qui consisterait à piloter la biosphère, de la remodeler par l’invention, de maîtriser par une technologie supérieure les effets néfastes de cette technologie, et ainsi de suite à l’infini, cette prétention est par définition condamnée à l’échec et avec elle la folie «tranhumaniste ». La nature est bien plus complexe que l’intelligence qu’elle a engendrée.
Ce qui est bien plus probable et tout aussi inquiétant que la disparition de l’homme est celle de nos civilisations. Tétanisés par les enjeux électoraux, les politiciens n’osent pas aborder la question de fond et dire les choses en face : nous avons vécu au-dessus de nos moyens depuis plus d’une génération, la porte de l’eldorado se ferme. Comment satisfaire les revendications exacerbées par le consumérisme ? Comment dessiller les yeux éblouis par une illusion technoscientiste ? Comme la déplétion du gaz suivra de peu celle du pétrole, comme aucune autre source d’énergie n’est susceptible de les remplacer, l’avenir de notre civilisation me paraît singulièrement compromis. Il est de moins en moins douteux que la société occidentale, dont l’opulence globale est fondée sur le pillage des ressources planétaires, et qui a abdiqué tout idéal pour exalter le profit, est voué à l’échec. Bref, le temps du monde fini commence… »
(extraits du livre «Le futur a-t-il un avenir ? (pour une responsabilité socio-écologique)« de Philippe Lebreton
éditions Sang de la Terre 2012, 380 pages pour 24,50 euros)